Éditorial

On reconnaît de plus en plus que, parmi les nombreux défis à relever dans la mise en œuvre des mesures visant à atteindre les cibles de réduction des émissions du gouvernement, l’élaboration d’approches réglementaires novatrices jouera un rôle crucial. Dans l’article principal de ce numéro de la Publication trimestrielle sur la réglementation de l’énergie, intitulé « Une réglementation agile pour l’innovation en matière d’énergie propre : Examen de l’expérience initiale de deux institutions canadiennes », Colleen Kaiser et Geoff McCarney affirment que les organismes de réglementation de l’énergie du Canada « doivent devenir plus agiles par nature » afin d’accélérer la transition vers une économie à faibles émissions de carbone et de capter une plus grande partie du marché de la croissance propre. L’article examine l’expérience précoce de deux exemples d’« institutions de réglementation agiles » : L’Espace innovation de la Commission de l’énergie de l’Ontario et Vancouver Zero Emission Building Exchange.

L’élaboration et la mise en œuvre de mesures précises qui vont au-delà de l’adoption de simples objectifs ambitieux constituent un autre défi de taille dans la transition vers une économie à faibles émissions de carbone. Il n’est peut-être pas surprenant que les mesures de mise en œuvre qui sont proposées, à la suite d’un examen critique, ne soient pas toujours à la hauteur. Il semble que ce soit le cas de la Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité adoptée récemment[1]. La Loi prescrit comme cible relative aux émissions de gaz à effet de serre « la carboneutralité d’ici 2050 », sans prescrire des mesures permettant d’atteindre cette cible. Dans son analyse critique, sous-titré « Un placebo législatif? », Andrew Roman conclut que la Loi « préten[d] à tort que l’adoption d’une cible dans une nouvelle loi sera utile et efficace pour rendre le monde vivable pour nos enfants et petits-enfants… Il ne s’agit pas tant une loi que d’une déclaration de relations publiques présentée comme une loi. »

Le droit en ce qui concerne les droits des peuples autochtones continuent d’évoluer, particulièrement en ce qui a trait aux projets d’exploitation des ressources et d’infrastructure énergétique. Dans leur article intitulé « Les effets cumulatifs peuvent porter atteinte aux droits issus de traité », Wally Braul et al. analysent une décision récente de la Cour supérieure de la Colombie-Britannique selon laquelle la Colombie-Britannique a porté atteinte aux droits de la Première Nation de Blueberry River en vertu du Traité no 8 en autorisant pendant plusieurs décennies des développements industriels sur le territoire traditionnel de la Première Nation. Les auteurs concluent que l’interprétation par la Cour de la loi régissant la violation des droits issus de traités, et des obligations de la Couronne en vertu du Traité no 8 est susceptible d’éclairer d’autres tribunaux canadiens qui statuent sur des allégations d’atteinte aux droits issus de traités découlant d’effets négatifs cumulatifs des décisions de la Couronne autorisant l’exploitation des ressources : « En tant que telle, cette décision a potentiellement des répercussions de grande portée dans tout le pays. »

Une grande partie de la jurisprudence sur les droits des peuples autochtones s’est articulée autour de l’obligation de consulter et, s’il y a lieu, d’accommoder. Dans « Réconciliation : L’intérêt public et un accord équitable », Gordon E. Kaiser[2] analyse une décision récente de la Cour d’appel de l’Alberta qui tient compte du rôle de la réconciliation dans le contexte de la responsabilité de l’Alberta Utilities Commission à l’égard de l’intérêt public. Il conclut qu’« en pratique, l’organisme canadien de réglementation de l’énergie doit, lorsqu’il détermine l’intérêt public dans des affaires concernant des intérêts fonciers autochtones, déterminer si le règlement économique conclu entre les intérêts autochtones et le service public est un accord équitable. »

Le contenu du dernier numéro de la Publication trimestrielle sur la réglementation de l’énergie reflétait le rôle important de l’hydrogène dans la liste des technologies émergentes visant à faire progresser la décarbonisation, et soulignait que le Canada s’est doté d’un programme fédéral d’hydrogène et examinait le programme d’hydrogène de la Colombie-Britannique. Dans le présent numéro, Bob Heggie passe en revue la feuille de route de l’hydrogène récemment annoncée par l’Alberta dans « L’Alberta entre dans la course canadienne à l’hydrogène ».

Ce numéro de la Publication trimestrielle sur la réglementation de l’énergie comprend également des rapports sur deux récents webinaires transfrontaliers commandités par la section canadienne de l’Energy Bar Association. Dans « L’Alberta est-elle le prochain Texas? – Les leçons tirées de la crise énergétique du Texas », faisant référence à la crise de l’électricité au Texas en février 2021, Bob Heggie rend compte des points de vue sur la crise de deux anciens présidents de la Federal Energy Regulatory Commission, d’un ancien président de l’Alberta Energy and Utilities Board et d’un ancien président de l’Alberta Electric System Operator. Article de Gordon E. Kaiser « Le Canada et les États-Unis peuvent-ils s’entendre sur un tarif sur le carbone? »

Le numéro se termine par un examen par Kenneth A. Barry de l’ouvrage de Bill Gates How to Avoid a Climate Crisis. Barry résume ainsi sa pensée : « [M. Gates] a apporté une vision déterminée, mais réaliste, une mine d’or de faits et un arsenal de recommandations à la tâche indubitablement complexe de la lutte contre le changement climatique sur ses nombreux fronts…L’ouvrage est idéal à titre de guide d’entrée dans le dédale d’informations, de prédictions et d’obstacles politiques qui entourent le changement climatique. »

  1.  LC 2021, c 22 (sanctionné le 29 juin 2021).
  2. Gordon E. Kaiser est codirecteur de rédaction de la Publication trimestrielle sur la réglementation de l’énergie.

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