Introduction : définition et causalité
L’obligation de desservir un service public comprend l’obligation d’investir – dans les centrales électriques, les réseaux de transmission, les oléoducs, les compresseurs, l’équipement de commutation, les câbles, les poteaux et les stations de pompage qui sont nécessaires afin de s’acquitter de l’obligation de desservir. Les actionnaires d’un service public présument que l’obligation de payer des clients de leur société sera équivalente à l’obligation d’investir – afin que les prix payés permettent au service public de recouvrir son investissement sur une période raisonnable et de rentabiliser le capital investi qui n’a pas été recouvré au cours de cette période.
Toutefois, des inégalités peuvent se produire – des situations dans lesquelles le service public a procédé à un investissement obligatoire mais les clients n’on pas payé pour cet investissement, créant ainsi un risque « coût échoué ». Voici sept exemples possibles :
Obsolescence : Les tramways sont remplacés par des automobiles, laissant les tramways avec un nombre insuffisant de clients pour éponger les coûts.
Mauvaise projection de la demande : Un service public crée une capacité en fonction de projections raisonnables de la croissance de la demande qui s’avèrent fausses, menant à l’abandon d’une centrale ou à un excès de capacité.
Taux d’escompte : L’organisme de réglementation du service public permet à ce dernier d’octroyer des escomptes à d’importants clients mobiles sous le coût intégralement réparti2. Ce qui assure une certaine contribution au coût fixe, mais qui laisse le service public dans une position où il ne pourra pas recouvrir la portion du coût fixe représentée par l’escompte.
Programmes d’efficacité énergétique Lorsque la conception tarifaire du service public est axée sur le recouvrement de coûts fixes au moyen de frais variables, la baisse de consommation résultant des programmes d’efficacité énergétique rend difficile le recouvrement de ces coûts.
Élimination de la concession exclusive : Comptant sur une concession exclusive, le service public établit une infrastructure, mais avant que cet investissement ne soit entièrement recouvert auprès des clients, le gouvernement élimine l’exclusivité octroyée. Les clients traditionnels du service public migrent vers de nouveaux fournisseurs avant d’avoir payé pour les frais engagés.
Élimination du monopole des services publics: Lorsqu’un service public contrôle une installation de monopole naturel, comme un réseau de distribution ou de transmission, il peut utiliser ce contrôle pour bloquer la concurrence dans d’autres marchés, comme les ventes d’électricité et de gaz. Le service engage donc des frais pour desservir ses clients captifs. Lorsque le gouvernement retire le contrôle du service public sur les installations de monopole, les clients qui y étaient captifs migrent vers de nouveaux entrants, laissant le service public avec des coûts non recouverts.
Clients se tournant vers l’auto-approvisionnement : Les clients qui se tournent vers la production autonome (individuellement, au moyen de panneaux solaires, ou en groupes, au moyen de microréseaux) pour lesquels le service public a investi dans son infrastructure dans le passé laissent le service public dans l’incapacité de recouvrir l’investissement engagé dans le passé pour le compte de ces clients.
Pour chacun de ces exemples, les événements qui se sont produits après l’investissement du service public, ont laissé dans le service public dans l’incapacité de recouvrir cet investissement, du moins de la part des clients visés par l’investissement. Il en résulte donc un coût échoué. Un coût échoué est défini comme un excédent de la valeur comptable3 sur la valeur marchande, où la valeur comptable représente la portion de l’investissement prudent initial du service public encore non recouvert auprès des clients au moment où ceux-ci cessent de payer le tarif réglementé et la valeur marchande est la valeur marchande des biens attribuables à cet investissement.
Bien que ces sept exemples constituent différentes versions de coûts échoués, le débat moderne porte principalement sur les trois derniers : l’élimination de la concession exclusive, l’élimination du contrôle des services publics sur les installations goulots et les clients se tournant vers l’auto-approvisionnement. Dans ces trois contextes, le coût échoué découle de la confluence de cinq facteurs :
- Les services publics sont exigeants en investissements.
- La demande s’accroît de façon progressive, alors que les principaux ajouts à l’infrastructure se font en dents de scie. Ces ajouts arrivent sur le réseau par grands blocs, avant la demande réelle, parce que les économies d’échelle réduisent leur coût unitaire à long terme. Ces facteurs signifient qu’à presque n’importe quel moment, le service public aura un excédent de capacité.
- Dans la tarification traditionnelle, le coût d’investissement pour les infrastructures est amorti, c’estàdire qu’il est attribué aux contribuables sur la durée de vie utile de la centrale. Si les organismes de réglementation s’attendent à ce qu’une centrale ait une durée de vie de 30 ans, ils établissent des taux pour recouvrer 1/30 du coût initial à chacune de ces années. Cette fraction annuelle, multipliée par le coût initial équivaut à la dépense de dépréciation. (Les tarifs sont également établis de façon à permettre une rentabilisation raisonnable du coût non encore recouvré.)
- Si le gouvernement crée une concurrence avant l’année où l’investissement a été fait et entièrement recouvert par les clients grâce à la dépréciation des dépenses (ce qui sera toujours le cas pour au moins une partie de l’infrastructure du service public), une partie de l’investissement initial du service public n’aura pas encore été recouvertes auprès des contribuables. Si tous les clients du service public se trouvent de nouveaux fournisseurs, le service public aura des coûts comptables non recouverts.
- Le service public ne pourra recouvrer ces coûts comptables que s’il est en mesure de trouver des acheteurs pour l’infrastructure (ou pour les éléments de production de cette infrastructure) à un prix de marché équivalent ou supérieur à la valeur comptable non recouvrée. Si le recouvrement anticipé, c.àd. la valeur marchande, est inférieure au coût comptable non recouvré, la différence est appelée un coût échoué.
Aux États-Unis, la question des coûts échoués a refait surface au cours des décennies, allant de l’obsolescence des tramways dans les années 1940 aux centrales nucléaires et marchés d’acquisition de gaz dans les années 1980, de même qu’aux débats actuels sur les installations solaires et les centrales au charbon coffrées. Toutes ces circonstances ont un point en commun : elles résultent de décisions du gouvernement ou de forces économiques (elles peuvent avoir été encouragées ou tolérées par suite de décisions gouvernementales), le recouvrement auprès des contribuables de tout investissement fait par un service public en fonction d’une obligation établie par une entité gouvernementale n’est plus une certitude.
La partie I du présent article porte principalement sur la question d’ordre juridique : Quelles sont les attentes légitimes des actionnaires en ce qui a trait au traitement des investissements prudents de leur service public par le gouvernement? La réponse à cette question réside dans la clause relative aux recettes enchâssée dans la Constitution américaine, dans le petit nombre de cas où cette disposition est appliquée aux industries des services publics et dans les lois assujetties aux contraintes créées par cette clause.
La partie II décrit comment les organismes de réglementation ont mis en application ces principes juridiques au cours des trois dernières décennies, plus particulièrement en ce qui concerne trois catégories de transitions d’industrie : l’élimination de la concession de vente au détail exclusive dans les secteurs de l’électricité et du gaz naturel, le dégroupement du service de transport d’électricité du commerce de gros et le dégroupement du service de transport de gaz naturel du commerce de gaz de gros.
La partie III porte sur le contraste entre (a) l’approche traditionnelle relativement à l’investissement échoué, qui traite des coûts après le fait, et (b) les approches modernes, qui visent à établir les responsabilités et déterminer les risques avant le fait.
I. La question d’ordre juridique : Quelles sont les attentes légitimes des actionnaires?
A. La clause relative aux recettes de la Constitution américaine
Le cinquième amendement de la Constitution américaine stipule, en partie, que « nul bien privé ne doit être pris aux fins d’utilisation publique sans indemnisation équitable »4. Appliquant cette disposition au contexte des services publics, le juge Brandeis a décrit quel bien est « pris », pour lequel une « indemnisation équitable » est exigible :
« La chose consacrée par l’investisseur à l’utilisation publique n’est pas un bien particulier, tangible ou intangible, mais le capital engagé dans l’entreprise. Du capital ainsi investi, la Constitution américaine garantit au service public la possibilité d’obtenir un rendement équitable5 » [traduction].
Le bien privé « pris » est l’investissement de l’actionnaire engagé prudemment par le service public pour s’acquitter de son obligation de desservir. L’« indemnisation équitable » est le montant en dollars reçu par le service public lorsqu’il exige le prix établi par l’organisme de réglementation. Le problème d’« indemnisation équitable » survient lorsque le service public n’est pas en mesure de recouvrer son investissement ou qu’on l’empêche de rentabiliser cet investissement. Supposons qu’un service public avec une concession exclusive procède à un investissement prudent de 90 millions de dollars dans un bien ayant une durée de vie de 30 ans. Après dix ans, le service public a recouvré 30 millions grâce aux tarifs perçus, tout en rentabilisant le montant non recouvert. Si le gouvernement permet ensuite aux clients de migrer vers d’autres fournisseurs, n’y a-t-il pas là une incapacité d’assurer une « indemnisation équitable »? La réponse dépend, en partie, de la valeur marchande du bien. Si la valeur marchande du bien n’est que de 54 millions de dollars, alors que sa valeur comptable (le montant non recouvré du coût initial) est de 60 millions, il y a un coût échoué de 15 millions de dollars. La question à savoir si le recouvrement de ce 15 millions de dollars constituait un droit constitutionnel n’a jamais été tranchée par un tribunal fédéral. Voici l’orientation judiciaire dont nous disposons6.
B. Jurisprudence aux termes de la clause relative aux recettes
La Cour Suprême des États-Unis mentionne que l’analyse de la clause relative aux recettes devait tenir compte des « répercussions économiques de la réglementation sur le requérant et, plus particulièrement, de la mesure dans laquelle la réglementation a interféré avec les attentes distinctes reposant sur l’investissement7 ». Les cas exigeant l’application de cette clause aux services publics établissent le principe suivant : à l’intérieur de limites vaguement définies, les investisseurs des services publics n’ont aucune garantie constitutionnelle de recouvrir des coûts échoués. La réglementation gouvernementale expose plutôt les services publics au risque de ne pas recouvrir son investissement prudent. Mais, l’orientation jurisprudentielle est floue, menant les décideurs à prendre des décisions d’accommodement qui ont résisté à toute contestation judiciaire. Après avoir décrit quatre cas souvent cités, nous discuterons des compromis qui ont été faits en matière de politique dans les industries de l’électricité et du gaz.
1. Charles River Bridge v Proprietors of Warren Bridge8
Dans ce litige datant d’un temps révolu, les parties se disputaient à propos des meilleurs moyens de traverser la rivière Charles dans le Massachusetts. Voyons d’abord les faits, puis le raisonnement de la Cour.
Premièrement, le traversier : La législature du Massachusetts permettait au Collège de Harvard d’exploiter un service de traversier sur la rivière Charles reliant les villes de Charlestown et de Boston et d’en conserver les profits.
Puis, le pont no 1 (le pont de la rivière Charles) : Pour faciliter la traversée de la rivière, la législature a octroyé à Thomas Russel une charte pour construire un pont à l’endroit où était exploité le traversier. La charte de 40 ans permettait à la nouvelle entreprise, les propriétaires du pont de la rivière Charles, de prélever un péage. Pendant ces 40 années, le propriétaire du pont aurait payé à Harvard une indemnisation annuelle raisonnable pour les recettes qu’elle aurait perçues pour le traversier si le pont n’avait pas été construit. Après 40 ans, le pont appartiendrait à l’État du Massachusetts. Le pont a ouvert en 1786; sa charte a ensuite été prolongée à 70 ans.
Ensuite, le pont no 2 (le pont Warren) : En 1828, à mi-chemin de la durée de la charte du pont de la rivière Charles, la législature a accordé une charte à une deuxième entreprise, les propriétaires du pont Warren, afin de construire le deuxième pont à proximité (à environ « 50 perches » du pont de la rivière Charles). La charte exigeait des constructeurs qu’ils concèdent le pont à l’État après avoir recouvert ses coûts, mais au plus tard six ans après sa mise en service. Après en avoir pris possession, l’État a mis fin au péage, offrant le passage gratuitement sur le pont Warren .
Puis, l’action en justice: Les propriétaires du pont de la rivière Charles ont poursuivi l’État, parce que le pont Warren maintenant gratuit avait « détruit » la valeur de l’infrastructure, pour lequel ils disposaient d’une charte qui, selon eux, devait être exclusive et perpétuelle.
Pour terminer, la décision : La Cour Suprême a jugé que le plaignant, le pont de la rivière Charles, pouvait obtenir gain de cause en faisant la preuve que l’État n’avait pas respecté le contrat.
« Il est bien établi, par les décisions du présent tribunal, que la loi de l’État peut être rétrospective dans son caractère, et peut donner lieu au dessaisissement de droits acquis, sans toutefois violer la Constitution des États-Unis, à moins qu’elle ne porte également atteinte à l’obligation d’un contrat. Ici, il n’y a pas eu de violation parce que la charte du pont Charles n’a jamais résigné le pouvoir continu de la législature de faire le nécessaire pour promouvoir le bonheur et la prospérité de la communauté par laquelle il [c.àd. le gouvernement] est établi » [traduction].
L’octroi d’une charte pour la construction d’un deuxième pont, même si cela détruisait la valeur du premier pont, était la façon du gouvernement de promouvoir l’intérêt public :
« [D]ans un pays comme le nôtre, libre, actif et entreprenant, toujours croissant en nombre et en richesse, de nouvelles voies de communication sont jugées nécessaires quotidiennement, tant pour les déplacements que pour le commerce; et sont essentielles au confort, à la commodité et à la prospérité de la population » [traduction].
Si le plaignant, le pont de la rivière Charles, pouvait contrer des décisions juridiques, comme celle de l’octroi de la législature au pont Warren, les améliorations publiques seraient impossibles, avec de terribles conséquences :
« [V]ous verrez bientôt les vieilles sociétés d’autoroutes à péage sortir de leur sommeil et demander au présent tribunal de rejeter les améliorations qui ont pris leur place. Les millions de [dollars] qui ont été investis dans les chemins de fer et les canaux, sur les voies de transport anciennement occupées par les sociétés d’autoroutes à péage, seront compromis. Nous devrons revenir sur les améliorations du dernier siècle et nous arrêter jusqu’à ce que les revendications des vieilles sociétés d’autoroutes à péage soient satisfaites; et il faudra permettre à ces États de se prévaloir de la science moderne et de prendre part à ces améliorations, qui contribuent maintenant à la richesse et à la prospérité, ainsi qu’aux commodités et au confort, de toutes les autres parties du monde civilisé9 » [traduction].
2. Market Street Railway Co. v Railroad Commission of California10
Market Street Railway exploitait des tramways et des autobus à San Francisco et ses environs. En raison de la concurrence issue de sociétés de transport municipales et d’autres moyens de transport, la compagnie perdait des clients. La Commission de l’État a réduit les tarifs de Market Street, estimant que ces tarifs inférieurs (de six cents) stimuleraient la circulation suffisamment afin de rentabiliser de six pour cent le tarif de base. Le service public a contesté la réduction du tarif, la qualifiant de déni inconstitutionnel d’une indemnisation juste et équitable.
Confirmant la décision sur le tarif, le tribunal a expliqué que la Constitution n’avait pas de sympathie pour une société dont les services n’étaient plus nécessaires :
« [S]’il n’y avait plus aucune réglementation, cet appelant constituerait une unité particulièrement mal en point d’une industrie généralement en déclin. Le problème de la conciliation des besoins du client et des droits des investisseurs dans une entreprise qui n’est plus à son zénith d’opportunité et d’utilité, dont l’investissement a déjà été miné par les forces économiques et dont les possibilités de gains sont déjà envahies par la concurrence d’autres moyens de transport, est un problème bien différent. […] La clause d’application régulière de la loi a été utilisée pour éviter la destruction gouvernementale des valeurs économiques existantes. Elle n’a pas été et ne peut pas être utilisée pour assurer des valeurs ou restaurer des valeurs qui ont été perdues par l’opération de forces économiques11 » [traduction].
Le tribunal a ajouté ce qui suit :
« Normalement, un service public aurait droit à des tarifs suffisants pour assurer une confiance dans l’intégrité financière de l’entreprise de façon à maintenir son crédit, d’attirer du capital, de connaître du succès, de maintenir son intégrité financière, d’attirer du capital d’indemniser ses investisseurs pour les risques assumés. Mais ces assurances, de toute évidence, sont inapplicables à une entreprise dont l’intégrité financière est déjà désespérément minée et qui ne pourrait en aucun cas attirer du capital de façon substantielle, et dont les investisseurs reconnaissent comme perdu ce qu’ils y ont apporté12 » [traduction].
3. Jersey Central Power & Light v Federal Energy Regulatory Commission13
Après avoir dépensé raisonnablement 397 millions de dollars pour un projet de centrale nucléaire, Jersey Central a prudemment abandonné le projet. Par la suite, le service public a demandé à la Federal Energy Regulatory Commission (FERC) d’approuver des tarifs de vente au détail plus élevés pour recouvrir les coûts. La FERC a appliqué sa politique de l’époque concernant les centrales prudemment abandonnées : accorder le recouvrement et non la rentabilité de l’investissement14. La FERC a rendu sa décision de façon sommaire, c.àd. sans tenir d’audience sur l’incidence que cela pourrait avoir sur le service public sur le plan financier.
Après examen, la Cour d’Appel du district fédéral de Columbia a voté 5 contre 4 pour renvoyer l’affaire devant la FERC afin d’avoir une audience sur les effets financiers. L’opinion majoritaire a d’abord maintenu que d’imposer au service public d’assumer les coûts associés à l’investissement prudent, mais inutile ne violait pas la clause relative aux recettes. Cette conclusion concorde avec les arrêts de Market Street Railway et de Charles River Bridge. Mais la majorité a également maintenu que le service public devait avoir la chance de démontrer, au moment de l’audience, que la politique, si maintenue, le place dans une position où le maintient de l’intégrité financière, critère exigé par Federal Power Commission v Hope Natural Gas 15 ne pourra pas être atteint.
4. Duquesne Light Co v Barasch16
Anticipant un accroissement de la demande, Duquesne a entamé la construction d’une centrale nucléaire. Lorsque la croissance de la demande a ralenti, le service public a changé son plan et interrompu la construction. La Commission de la Pennsylvanie a déclaré que le service public avait agi avec prudence en tout point : la prévisibilité de la demande, la décision d’entamer la construction, de choisir le nucléaire, d’interrompre la construction et tous les frais engagés à chaque étape – tout avait été fait avec prudence. Toutefois, la législature de la Pennsylvanie avait adopté une loi exigeant que les coûts d’une centrale abandonnée soient assumés par les actionnaires, parce qu’une centrale abandonnée ne pouvait pas être utilisée par les clients ni utile à ceux-ci17. Duquesne a fait valoir que la clause relative aux recettes exigeait le recouvrement.
La Cour suprême des États-Unis en désaccord avec la décision a donc tranché en faveur du maintien l’application de la loi. La Pennsylvanie était libre d’édicter des lois qui imposaient le risque de coûts raisonnables mais fâcheux aux actionnaires. « [L]e but de la réglementation des services publics par l’État ne consiste pas à ‘prendre’ des biens simplement parce qu’elle refuse de permettre le recouvrement des investissements en capital qui ne sont pas ‘utilisés et utiles au service du public.’ » Par ailleurs, en mettant en application le critère du « résultat final » exigé par Hope Natural Gas, la Cour a conclu que l’effet économique du rejet (0,4 pour cent du besoin en revenus annuel du service public) ne dépossède pas les actionnaires parce qu’il était si négligeable.
Un intervenant, la Pennsylvania Electric Association, a fait valoir de son côté que la Constitution exigeait nécessairement le recouvrement des coûts raisonnables, peu importe leur utilité et peu importe l’effet économique d’un rejet. Cet argument, s’il avait été accepté par la Cour, aurait interdit aux organismes de réglementation d’attribuer aux actionnaires le risque de conséquences raisonnables mais non économiques. La Cour a rejeté l’argument, le disant incompatible avec Hope :
« Nous croyons que l’adoption d’un tel règlement nous obligerait à revenir sur 45 ans de décisions judiciaires dans ce domaine, ce qui serait aussi injustifié que déstabilisant. Hope a clairement confirmé que « la Commission n’était pas tenue d’utiliser une formule ou une combinaison de formules particulières pour déterminer les tarifs18 […] ».
La Cour a donc réaffirmé cette prémisse par le biais de certaines affaires soutenant que la Constitution n’isole pas les services publics des conséquences non économiques, qu’il s’agisse des forces du marché, d’obsolescence ou de malchance, même si ces services publics ont agi avec prudence19. Si un bien n’est pas « utilisé et utile », la Constitution ne fait pas payer les clients.
Exception pour une promesse explicite du gouvernement : Toutefois, la Cour suprême a rendu une décision dans laquelle elle reconnaissait un droit constitutionnel de recouvrir les coûts échoués. Mais, elle reconnait une promesse explicite du gouvernement qu’elle jugeait être un contrat. Une loi d’État de 1877 autorisait la Louisiane, plus précisément la ville de la Nouvelle-Orléans à (a) établir une société privée, la New Orleans Waterworks Company et à (b) octroyer à cette société un privilège exclusif, pour 50 ans, en vue d’approvisionner la ville et ses résidents en eau construisant et installant toute infrastructure nécessaire. Cet octroi comprenait une obligation de desservir : d’installer suffisamment de canalisations et d’offrir suffisamment d’eau pour « répondre aux besoins de la population ». Aux termes de la loi, après 50 ans, la ville avait le droit d’acheter la centrale, si la ville ne l’avait pas fait, l’octroi serait prolongé pour un autre 50 ans, mais sans privilège exclusif. La loi autorisait également la société à établir ses propres tarifs, pourvu que les « profits nets ne dépassent pas dix pour cent par année ».
Comme le prévoyait la loi, la ville a octroyé la concession à la New Orleans Waterworks Company, qui a offert le service. Mais deux ans plus tard, les Louisianais ont amendé leur constitution en ajoutant la disposition suivante :
« [L]es dispositions concernant un monopole dans la charte de toute société actuellement en exploitation dans l’État, sauf pour celles que pourraient contenir les chartes de compagnies de chemins de fer, sont par la présente abrogées. » En vertu de cette disposition, la ville a éliminé le monopole de Waterworks et autorisé Robert C. Rivers à installer les canalisations nécessaires sous les rues de la ville pour alimenter son hôtel en eau.
Waterworks a intenté une poursuite en vue de stopper Rivers et a eu gain de cause. L’octroi exclusif de la ville à Waterworks était un contrat et même une constitution d’État ne pouvait l’invalider :
« La permission donnée à [Rivers] par le conseil de ville pour la pose de canalisations dans les rues dans le but d’acheminer l’eau à son hôtel est manifestement en dérogation de l’octroi de l’État à [Waterworks], puisque, si cette entité peut accorder une telle utilisation des voies publiques à [Rivers], elle pourrait tout aussi bien accorder une utilisation similaire à tout autre citoyen et à des entreprises de toutes sortes, diminuant, voire détruisant ainsi sur le plan matériel la valeur du contrat de [Waterworks], en vertu duquel elle a dépensé des fonds considérables et rendu des services au public qui auraient tout aussi bien pu être exécutés par l’État ou la ville aux dépens du public20 » [traduction].
La ville pouvait briser le monopole de Waterworks, mais elle devrait payer :
« Les droits et concessions qui ont été octroyés au titre de tels contrats peuvent être pris par le public, sous réserve d’une indemnisation juste de l’entreprise, en vertu du pouvoir d’expropriation de l’État […] De cette façon, la promesse brisée au public suivra ceux qui ont fait d’importants investissements après avoir reçu l’assurance par l’État que le contrat avec lui sera exécuté21 » [traduction].
La Cour suprême des États-Unis voyait donc (a) une promesse légale de situation de monopole comme un contrat, (b) l’attente créée par le contrat comme un droit de propriété et (c) la rupture de ce monopole par la constitution de l’État comme une violation de contrat, exigeant une indemnisation en raison du dommage au droit de propriété. Il est à noter que la reconnaissance par la Cour de la relation comme étant contractuelle était cruciale pour sa conclusion de protection constitutionnelle aux termes de la clause relative aux recettes. La réalité moderne, par contre, est que la relation entre l’organisme de réglementation et le service public n’est pas un contrat. Comme l’établit un traité de premier plan :
« [L]es tribunaux ne devraient pas déclarer que le gouvernement a conclu un contrat […] à moins qu’il ne soit clair qu’une entité gouvernementale ayant l’autorité pour le faire ait conclu un contrat avec la partie privée d’une façon qui limite le pouvoir d’agir du gouvernement dans l’avenir. Les décisions gouvernementales concernant l’utilisation de biens ou des activités commerciales seront habituellement de nature réglementaire et non contractuelles22 » [traduction].
* * *
Les coûts échoués s’entendent tout simplement de ce que les économistes appellent des coûts irrécupérables – les coûts engagés antérieurement que le service public n’est pas en mesure de recouvrir. Les mêmes circonstances qui mènent à des coûts échoués irrécupérables signifient également que le service public est privé de l’entrée de profits relativement sûrs provenant des clients captifs qu’assuraient ces achats23. Ces deux déceptions pour les actionnaires – coûts échoués irrécupérables et profits à venir auxquels il faut renoncer – se confondent parfois dans le terme « coûts échoués », mais elles sont bien différentes. Les tribunaux et les commissions prennent cette première signification très au sérieux, mais non la deuxième, ce qui s’explique en examinant les facteurs économiques de plus près. Lorsqu’un service public reçoit ses coûts non recouvrables, il peut investir cet argent dans n’importe quelle entreprise et réaliser le profit qu’il n’arrive plus à gagner auprès de ses clients anciennement dépendants. Si le gouvernement devait accorder des fonds pour les coûts non recouvrés en plus de fonds pour le profit perdu, le service public recevrait le profit auquel il a dû renoncer deux fois : une première fois lorsqu’il est indemnisé par le gouvernement et une deuxième fois lorsqu’il investit l’indemnisation reçue.
II. Électricité et gaz : Trois décennies d’applications
A. Élimination des concessions de vente au détail exclusives
Lorsqu’un État introduit une concurrence dans la vente au détail dans un marché traditionnellement desservi par un service public franchisé, le service public est confronté au risque classique du coût échoué : les coûts non recouvrables, lorsque la valeur marchande de l’investissement associé descend au-dessous de la valeur comptable. Dans le contexte de l’électricité, voici des exemples de catégories de coûts échoués :
- Biens liés à la production;
- Contrats d’achat à long terme d’électricité ou de combustible;
- Actifs réglementaires comme l’impôt différé sur le passif ;
- Investissements immobilisés dans certains programmes sociaux qui ont été faits à la demande d’une commission24;
- Partie non financée des coûts prévisionnels de déclassement d’une centrale nucléaire du service public25;
- Coûts d’indemnités de départ, de reconvention et de maintien en poste, de retraite anticipée et de replacement externe d’employés et dépenses connexes, à des taux raisonnables, pour les employés touchés par la restructuration de l’industrie de l’électricité26.
Le droit constitutionnel des actionnaires à ces coûts dépend du critère de Penn Central, c.àd si les actionnaires avaient « des attentes légitimes reposant sur un investissement » de recouvrir ces coûts. L’application de ce critère exige un examen de la nature de la relation de la concession. Une concession de vente au détail exclusive est établie lorsque l’État (a) définit une région géographique, (b) interdit la concurrence de vente au détail dans cette région et (c) désigne une entreprise comme l’unique vendeur dans cette région des services autorisés par l’État. Dans cette situation, un actionnaire peut légitimement s’attendre à ce que son obligation d’investir sera égalée par une obligation du client de payer27. Toutefois, bien que le terme « exclusif » ait une connotation absolue, il doit y avoir une nuance. La loi ou la jurisprudence peuvent donner lieu à des entrées concurrentielles ou à l’auto-approvisionnement par le client, signalant ainsi que les investissements du service public sont à risque, ce qui peut donc miner l’attente de tout actionnaire de recouvrer pleinement des coûts échoués. Examinons les deux exemples suivants :
1. Service inadéquat :
Au début des années 1980 dans l’état du Maine, le territoire desservi par un service public pouvait être envahi par des non-titulaires en démontrant que le service du titulaire était inadéquat. Lorsqu’une compagnie de téléphone non titulaire a offert des service de téléphonie à rabais et de qualité inférieure (les clients devaient composer des numéros supplémentaires et parfois attendre qu’une ligne se libère), la Maine Public Utilities Commission a permis à celle-ci de rivaliser avec le service public en place à l’intérieur de son territoire exclusif. La cour judiciaire suprême du Maine a tranché en faveur de la Commission :
« [P]our autant que le caractère inadéquat du service existant soit un facteur pertinent dans l’octroi d’un certificat de commodité et de nécessité publiques, la conclusion indiquant qu’il soit nécessaire d’offrir au public un autre type de service non offert auparavant est en soi une conclusion à savoir que le service existant est inadéquat.
[…]
[N]ous estimons qu’il est permis de croire que le public souhaite toujours (et qu’il y a donc toujours une nécessité d’offrir) un service comparable à des coûts moindres28 » [traduction].
2. Pas d’exclusivité :
Au cours des années 1930, le gouvernement américain a prêté de l’argent à des municipalités pour construire des réseaux de distribution d’électricité dans des régions déjà desservies par un service public appartenant au secteur privé. Chaque prêt serait garanti par les recettes de la municipalité provenant des ventes d’électricité de détail. Alabama Power, un service public appartenant au secteur privé, a intenté une poursuite contre le gouvernement américain, soutenant que les nouveaux réseaux municipaux envahiraient son territoire de service. La Cour suprême des États-Unis n’y a vu aucun préjudice constitutionnel :
« [L]e seul fait que [Alabama Power] subira des pertes financières en raison d’une concurrence licite n’équivaut pas à une violation constitutionnelle. Étant donné que le service public ne disposait pas d’une concession exclusive, [s]i ses activités sont freinées ou détruites par les activités des municipalités, il s’agira d’une concurrence licite de laquelle ne résulte aucune transgression de droit […] Ce que [le service public] prévoit, nous le soulignons, est un dommage à quelque chose qu’il ne possède pas – nommément, un droit à l’immunité contre une concurrence municipale licite29 » [traduction].
Compte tenu du manque de clarté dans la jurisprudence et du besoin d’améliorer la voie politique vers la concurrence de vente de détail, les lois sur la concurrence dans la vente de détail d’électricité aux ÉtatsUnis offraient habituellement l’occasion de recouvrer les coûts échoués30. Le mécanisme de recouvrement constituait habituellement une charge incontournable liée au service encore monopolistique de la distribution physique. En exigeant que tous les clients de services de distribution physique paient leur part proportionnelle des coûts hérités, ce mécanisme assurait que la décision d’un client de tâter le marcher ou de rester avec le titulaire serait axée sur des faits prospectifs plutôt que sur les coûts passés31, évitant ainsi le « contournement non économique »32.
B. Dégroupement des services de transmission d’électricité du commerce de gros
Les services publics appartenant au secteur privé réalisent la majorité de leurs ventes à des clients au détail, mais ils ont également des clients de commerce en gros, le plus souvent des petites entreprises appartenant à des municipalités ou des coopératives rurales. Avant l’ère de l’ouverture de l’accès au réseau, ces clients de commerce de gros qui constituaient des entités de distribution seulement (c.àd. des entités sans production ni de transmission) dépendaient de leur service public local appartenant au secteur privé pour la vente d’électricité de gros. Le service public fournissait l’électricité de gros à partir de sa propre production ou en procédant à des achats auprès de tierces parties.
Puis le décret no 888 de la FERC est arrivé. Ce décret datant de 1996 exigeait que les services publics de transmission appartenant au secteur privé offrent un service de transmission aux clients admissibles, y compris les réseaux municipaux ou coopératifs dépendant de la transmission qui sont traditionnellement du ressort des services publics appartenant au secteur privé pour la production d’électricité33. Le décret no 888 leur permettait dorénavant d’aller voir ailleurs pour leur production d’électricité. Leurs décisions d’achat, a déclaré la FERC, pouvaient laisser leur ancien fournisseur de services publics avec des coûts de production non recouvrés, engagés avant le décret no 888 dans l’hypothèse que les clients demeureraient dépendants. La FERC a donc invité le service public à demander un recouvrement extracontractuel de coûts échoués liés à certains contrats préexistants de commerce de gros, si ces coûts étaient « légitimes, raisonnables et vérifiables ». (Pourquoi ce recouvrement était-il d’ordre extracontractuel? L’obligation contractuelle d’un client dépendant peut exiger des achats pour seulement, disons, 11 ans. Mais le service public peut amortir ses coûts de production sur 30 ans, dans l’attente raisonnable que le client renouvelle son contrat –n’ayant pas accès à d’autres fournisseurs – et assume donc les coûts de production pour les 19 années restantes.) La FERC a justifié ce recouvrement extracontractuel au motif que les services publics en place ne pouvaient pas prévoir que la Commission exigerait d’eux qu’ils « altèrent l’utilisation de leurs réseaux de transmission en réponse aux changements fondamentaux qui s’opèrent au sein de l’industrie », soulignant toutefois que son offre de recouvrement extracontractuel « ne protégerait pas un service public contre les risques courants liés à la concurrence, comme l’autoproduction, la cogénération ou la fermeture de centrales industrielles, ne découlant pas de la nouvelle disponibilité d’un accès ouvert et non discriminatoire au réseau34 ».
C. Dégroupement du service de transport de gaz du commerce de gros
Avant les années 1980, une entreprise de distribution locale (EDL) dépendait habituellement d’un seul oléoduc inter-États pour s’approvisionner, parce que (a) l’oléoduc regroupait l’alimentation en gaz avec le service de transport et (b) l’EDL n’avait pas d’accès physique et économique à d’autres oléoducs. Pour desservir leurs EDL dépendantes, les oléoducs se procuraient du gaz auprès de producteurs en vertu de contrats à long terme. Dans les décrets nos 43635 et 63636, la FERC encourageait (décret 436) puis ordonnait (décret 636) aux oléoducs de dégrouper le service de transport du commerce en gros. Ces mesures ont permis aux EDL d’acheter du gaz directement auprès des producteurs. Ce changement dans la structure du marché laissait les oléoducs avec des obligations à long terme existants acheter du gaz auprès de producteurs, mais incertains que les clients d’EDL paieraient pour ce gaz. Les coûts échoués résultants étaient sous deux formes : bien échoués et obligations d’achat ferme.
Coûts échoués : Les coûts échoués de l’industrie des oléoducs, comme la FERC les définit, comprenaient une capacité d’oléoduc en amont pour laquelle un oléoduc en aval ne pouvait pas trouver preneur, plus la capacité d’entreposage d’un oléoduc qui n’en avait plus besoin lorsque son volume de ventes s’est estompé37. La FERC a permis aux oléoducs de recouvrer les coûts de ces biens échoués, si ces coûts avaient été engagés prudemment pour des biens qui n’étaient plus utilisés ou utiles38. Les coûts ne sont échoués que si la valeur comptable dépasse la valeur marchande. Les oléoducs devaient donc déduire des valeurs positives de valeurs négatives :
« [D]ans la mesure où [un oléoduc] reconnait avoir réalisé des gains sur des ventes d’installations échouées et essuyé par la suite des pertes sur des ventes d’installations qu’il tente de recouvrer comme étant des coûts échoués, [l’oléoduc doit, s’il présente une demande de recouvrement de coûts échoués,] détailler les gains antérieurs et réduire le montant proposé pour le recouvrement des coûts échoués par le montant de ces gains39 » [traduction].
La FERC a ensuite donné aux oléoducs deux voies à suivre pour obtenir une indemnisation : la « dérivation » ou la « dépréciation ». Si un oléoduc décidait de dériver son bien (c.àd. d’en transférer la propriété à ses actionnaires), il pouvait présenter une demande de traitement de coûts échoués pour tout montant inférieur à la valeur comptable des installations qu’il avait reçu. Bien sûr, de ces montants serait déduit tout montant reçu dépassant la valeur comptable40. Si l’oléoduc décidait de conserver la propriété du bien, il pouvait en déprécier la valeur à un « niveau économiquement viable » (c.àd. un niveau qui en reflète la valeur marchande) pour ensuite « proposer [pour le recouvrement auprès des clients] la différence entre le coût initial net déprécié de la centrale et la valeur marchande inférieure comme un coût échoué ». L’oléoduc pouvait recouvrer « ce montant déprécié sur une période raisonnable, comme une période de cinq ans ». Pour terminer, en conformité avec sa politique sur les centrales abandonnées (voir le texte sur Jersey Central, Part I.B.3 ci-dessus), la FERC permettait le recouvrement, mais non la rentabilisation, du coût échoué : « un taux de rendement pour le montant des installations dépréciées serait inapproprié, puisqu’il permettrait de tirer un profit d’installations qui ne sont plus économiquement viables, ce qui pourrait également se traduire en un avantage concurrentiel pour l’oléoduc41 ».
Coûts d’achats fermes : La transition au gaz exigeait des milliards de dollars en coûts d’achats fermes – obligations des oléoducs, engagées avant le dégroupement, en vue de payer les producteurs pour le gaz dont les oléoducs ont besoin pour desservir leurs EDL dépendantes :
« Les coûts d’achats fermes sont engagés lorsqu’un oléoduc, pour maintenir ses inventaires destinés aux clients de ventes, conclut un contrat avec le producteur dans lequel il promet de prendre ou de payer le gaz qu’il s’est engagé d’acheter par contrat. Les oléoducs qui se sont constitué de tels inventaires les trouvent difficiles à vendre une fois qu’ils ont accordé un accès à l’oléoduc pour transporter le gaz de leurs concurrents; par conséquent, ils se retrouvent avec des coûts s’élevant dans les milliards de dollars42 » [traduction].
La FERC exigeait des EDL qu’elles assument une partie de ces coûts, une décision que la Cour d’Appel dans le district de Columbia a maintenue, soulignant qu’il s’agissait d’« une décision de répartition de coûts acceptable selon laquelle ceux qui bénéficient de la transition à un marché du gaz naturel concurrentiel sont appelés à absorber un partie des coûts43 ».
III. Les approches traditionnelles par rapport aux réponses modernes
A. L’approche traditionnelle : La discrétion après coup, assujettie aux contraintes constitutionnelles
La catégorie de cas portant sur les coûts échoués a, par définition, traité des coûts après qu’ils aient été engagés. L’exposé qui précède a fait état de l’ampleur du pouvoir de réglementation à l’égard de ces coûts – pouvoir conféré par les lois traditionnelles, telles que les tribunaux les interprètent. Comme l’exigent les avis de la Cour suprême dans Hope et Barasch, les tribunaux se sont refusés à rejeter ou à confirmer des règles particulières, tentant plutôt d’établir si la décision de l’organisme de réglementation est « fondée sur des preuves substantielles et […] considère les intérêts des investisseurs et des contribuables de façon équitable44 ». Les résultats vont du non-recouvrement au recouvrement complet, avec des points qui varient entre ceux-ci.
Aucun recouvrement, aucun rendement : Un oléoduc a dépensé 13 millions de dollars pour des projets d’approvisionnement en gaz synthétique qui ont échoué. La FERC a refusé d’indemniser l’amortissement et la rentabilisation. Maintenant la décision de la FERC, la Cour d’Appel a fait une distinction entre l’imprudence et la malchance : « [L]e problème de répartition du risque dans ce cas n’est pas un problème de faute […] La Natural Gas Act ne garantit tout simplement pas aux actionnaires d’un service public, même géré prudemment, que les contribuables se feront toujours refiler la facture pour les projets d’approvisionnement qui s’avéreront être de lamentables échecs, tout aussi louables qu’auraient pu être les motifs du service public pour entreprendre ces projets ». La Cour a cité une décision antérieure de la FERC soutenant que pour être incluses dans l’assiette tarifaire (et donc pour gagner un rendement), « les dépenses doivent non seulement satisfaire la condition nécessaire d’investissement prudent, mais aussi être ‘utilisées et utiles’ pour assurer la prestation du service45 ».
Amortissement mais aucun rendement : Les décisions de la FERC de dégrouper le service de transport des oléoducs de leurs ventes de gaz ont laissé les oléoducs avec des coûts échoués. Les commissions d’États ont soutenu que, parce que les coûts n’étaient pas « utilisés et utiles », la Natural Gas Act interdit leur recouvrement auprès des clients. La Cour d’appel n’était pas de cet avis, décrivant une position intermédiaire : La Loi autorise la FERC à retirer les biens non utilisés et utiles de l’assiette tarifaire (d’où ils auraient permis la réalisation d’un profit) mais permet aussi le recouvrement des coûts au moyen d’une charge d’amortissement. L’octroi d’un profit sur des installations non utilisées et utiles « serait inapproprié puisqu’il permettrait de tirer un profit d’installations qui ne sont plus économiquement viables, ce qui pourrait également se traduire en un avantage concurrentiel pour l’oléoduc ». Mais, le fait de permettre l’amortissement des coûts « gardera l’oléoduc entier pour le coût direct de son investissement dans les installations […] Les intérêts de l’investisseur n’ont donc pas été totalement ignorés46 ».
Plein recouvrement et rendement : La Cour d’Appel a également dit que la Commission « pouvait également permettre à l’oléoduc de recouvrir non seulement l’amortissement, mais aussi l’intérêt, c.àd. le ‘coût’ de la portion non amortie de l’investissement. La Commission pouvait de plus décider d’inclure les investissements échoués dans l’assiette tarifaire du service public et ainsi faire réaliser un profit aux investisseurs47 ».
Toutefois, cette grande discrétion est assujettie à des contraintes. En voici les principales :
Attentes légitimes des actionnaires remplies : Lorsque les commissions attribuent le risque de résultats prudents mais non économiques, elles doivent le faire clairement et uniformément sur toute la durée d’un investissement. Si la commission s’engage, avant l’investissement, au plein recouvrement de coûts prudents peu importe le résultat, elle doit honorer cet engagement à l’établissement des tarifs, sans quoi il y a risque de cassation en vertu de la loi de l’État (prise de décisions « arbitraires et capricieuses ») ou de la Constitution américaine (sape des « attentes distinctes et fondées sur des investissements » créé par l’engagement réglementaire antérieur)48. Comme le souligne le tribunal dans Barasch :
« Les risques auxquels un service public est confronté sont en grande partie définis par la méthodologie d’établissement de taux parce que les services publics constituent presque toujours des monopoles publics dans l’offre de services essentiels, et sont donc pratiquement immunisés contre les risques habituels du marché. Par conséquent, la décision d’un État de vaciller arbitrairement entre deux méthodes en exigeant parfois des investisseurs qu’ils assument le risque de mauvais investissements alors qu’il leur refuse le fruit de bons investissements à d’autres occasions soulèverait de graves questions constitutionnelles49 » [traduction].
Risques des actionnaires pris en compte dans le rendement autorisé des capitaux propres : Les investisseurs s’attendent légitimement à des rendements plus élevés pour des risques plus élevés. Une commission qui attribue aux actionnaires le risque de résultats prudents mais non économiques doit offrir une indemnisation pour ce risque lorsqu’elle détermine le rendement autorisé de capitaux propres50.
Permettre l’« irrégularité » : Un nouvel investissement concordera rarement parfaitement avec la demande existante. Les améliorations importantes de la capacité sont apportées au réseau de façon irrégulière, créant ainsi des surplus. Le fait de traiter ces surplus comme non utilisés et utiles, pour ensuite refuser un recouvrement et un rendement, fait fi de la réalité physique. Comme l’a déclaré la Cour suprême du Wisconsin :
« [U]n service public, étant tenu d’offrir ses services lorsque le public en juge la situation et le moment appropriés, doit avoir une certaine latitude en ce qui concerne la gestion des centrales; […] dans la détermination de l’assiette tarifaire, les biens ne devraient pas être exclus simplement parce qu’ils ne sont pas réellement en service à ce moment. Nous avons conclu que la commission ne pouvait pas construire une centrale hypothétique qui fournirait théoriquement un service équivalent et, sur ce fondement, soutenir que toute portion du bien existant était un excédent51 [traduction].
B. Réponses modernes : Attribution de la responsabilité et du risque dès le début
Des lois à la jurisprudence, le principal message est que les organismes de réglementation disposent d’une certaine souplesse. Mais, la souplesse réglementaire peut créer une incertitude en matière d’investissement, laquelle peut mener à des hausses dans le coût en capital des services publics. Différentes solutions peuvent être envisagées pour régler ce problème. Elles peuvent être réparties en deux principales catégories : les solutions qui attribuent la responsabilité pour des coûts connus, c.àd. les coûts qui ont été engagés ou qui surviendront, et les solutions qui attribuent les risques liés à des coûts imprévus.
Attribution de la responsabilité pour des coûts connus : La Commission peut calculer la part proportionnelle d’un client aux coûts comptables du service public et ensuite exiger que le client paie ce coût à son départ – soit en une somme forfaitaire, soit sous la forme d’un ajout aux achats continus du client de tout service de monopole dont il aura encore besoin par la suite. Le « découplage » est un type de mesure connexe. Aux États-Unis, la plupart des tarifs comprennent des frais fixes facturés aux clients qui ne permettent que le recouvrement de coûts par client; la plupart des coûts fixes d’un service public sont recouvrés en fonction d’un taux par kWh – ce qui représente des frais variables. Cette pratique crée une tension inutile entre deux buts non sujets à débat : consommer moins d’énergie et donner une occasion raisonnable au service public de recouvrer, et de rentabiliser, ses coûts fixes prudents. Reconnaissant le conflit, certains États ont introduit le « découplage » : isolant le recouvrement de frais fixes des ventes variables. Une approche consiste à soustraire tous les coûts fixes des frais variables et à les inclure dans un frais fixe. Le principe est simple : si le client souhaite que le service public soit prêt à offrir des services, il doit assumer les coûts qui permettent à celui-ci d’être prêt à offrir ses services.
Attribution des risques liés à des coûts imprévus : Certaines législatures d’État ont autorisé leurs commissions à protéger les actionnaires contre certains risques. Ces commissions ont le pouvoir de rendre des décrets avant l’investissement qui engagent les contribuables au recouvrement de coûts pour des immobilisations importantes spécifiées. Chaque situation est distincte de l’approche traditionnelle, qui consiste à différer une décision concernant le recouvrement, ainsi que le recouvrement même, jusqu’à ce que la centrale soit utilisée et utile, c.àd. en service pour les clients. Voici quatre exemples :
- L’Environmental Compliance Plan Pre-Approval Act (loi sur la pré-approbation d’un plan de conformité environnementale) de l’Indiana autorise la Commission à approuver les coûts d’un service public d’avance, si ces coûts appuient un plan de conformité environnementale qui « constitue une stratégie raisonnable et à moindre coût sur la durée de vie de l’investissement, qui est compatible avec l’offre d’un service d’électricité fiable, efficace et économique ». La Commission peut également limiter les contestations de tarif pour les coûts engagés par le service public aux questions de fraude, de dissimulation ou de mauvaise gestion grave52.
- Une loi de la Floride autorise le recouvrement de coûts, avant la mise en exploitation commerciale d’une centrale, pour le choix d’un site, la conception, la délivrance de permis et la construction d’une centrale de production d’électricité fondée sur la technologie nucléaire ou de gazéification intégrée à cycle combiné53.
- Une loi de la Caroline du Nord autorise le recouvrement, avant la mise en exploitation commerciale d’une centrale, des coûts de « développement de projet » pour les centrales nucléaires, sous réserve de certaines conditions concernant le type et la coordination des activités. Les activités admissibles comprennent (sans en exclure d’autres) « l’évaluation, la conception, les travaux techniques, l’analyse environnementale et les coûts pour la délivrance de permis, la délivrance de permis de site préliminaire, la délivrance de permis d’exploitation combinés et la préparation initiale du site54».
- La Baseload Act (loi sur les centrales de base) du Mississippi autorise le recouvrement, avant la mise en exploitation commerciale d’une centrale, de la totalité ou d’une partie des coûts prudents (avant et pendant la construction) associés à une centrale électrique de base. La loi autorise également les examens et approbations périodiques par la Commission de la prudence de la construction, afin de réduire tout autre incertitude associée à de futurs recouvrements de coûts55.
Conclusion
Les situations liées aux coûts échoués combinent toujours deux facteurs clés : les investissements prudents et les circonstances après investissement qui n’avaient pas pu être prévues au moment de l’investissement. Ces développements factuels peuvent être des réductions dans la demande, une augmentation des coûts des intrants, l’obsolescence et les changements dans la politique de réglementation. La question est toujours la suivante : lorsque des actions prudentes produisent des résultats non économiques, qui doivent en assumer les coûts non recouvrés : les actionnaires ou les clients? Les lecteurs espérant des directives claires sur les choses « à faire » ou « à ne pas faire » seront déçus; ceux espérant une grande discrétion réglementaire seront ravis. Le principe de base est le suivant : les organismes de réglementation ont différentes options, allant d’un recouvrement avec profit à aucun recouvrement sans profit, et tous les points entre ceux-ci. Ce qui compte sur le plan constitutionnel, c’est de répondre aux attentes légitimes des actionnaires – étant donné que des mesures réglementaires clairement énoncées dès le début influeront sur ces attentes.
- Avocat et témoin expert, Hempling a conseillé des organismes de réglementation et législatifs de partout en Amérique du Nord et est souvent appelé à prononcer des discours à des congrès internationaux. Il estprofesseur auxiliaire à Georgetown University Law Center, où il enseigne des cours en litiges et sur la réglementation des services publics. Son livre, Regulating Public Utility Performance: The Law of Market Structure, Pricing and Jurisdiction, duquel certaines portions du présent article ont été tirées, a été publié par l’American Bar Association en 2013. Il est également l’auteur d’un livre d’essais sur l’art de la réglementation, Preside or Lead? The Attributes and Actions of Effective Regulators. Hempling a obtenu un baccalauréat avec distinction de Yale University (1) en économie et en sciences politiques et (2) en musique, ainsi qu’un doctorat en jurisprudence avec grande distinction de Georgetown University Law Center. Pour plus de détails, voir www.scotthemplinglaw.com.
- Le coût intégralement réparti s’entend des frais facturés en vue de recouvrir tous les coûts de production, variables et fixes.
- Le coût comptable est le coût initial d’un bien moins la dépréciation accumulée. La dépréciation accumulée est le montant déjà recouvré auprès des clients au moyen des dépenses de dépréciation comprises dans les recettes annuelles nécessaires du service public.
- US Const amend V.
- Missouri ex rel Southwestern Bell Telephone Co v Public Service Commission, 262 US 276, 290 (1923) (Brandeis, J., concordant).
- Dans le cas en l’espèce, il est présumé que la valeur marchande sera inférieure à la valeur comptable, menant à un coût échoué. Mais, le contraire est également possible, produisant ce que l’on peut appeler un « profit lié à un dessaisissement ». Le jour où commence la concurrence, le service public peut être assis sur une véritable mine d’or : une centrale nucléaire en bon état avec un amortissement comptable dans une région à petite capacité avec des prix de marché élevés. Les actionnaires n’auraient donc aucune inquiétude sur le plan constitutionnel. Toutefois, il pourrait y avoir un problème sur le plan juridique. Qui d’entre les actionnaires et les clients devrait recevoir l’excédent de la valeur marchande sur la valeur comptable? Les commissions ont tranché la question de différentes façons, laissant les contribuables récolter tous les gains dans certains cas, les actionnaires dans d’autres, et parfois partageant ces gains entre les deux. Étant donné que le présent article porte sur les coûts échoués, nous ne traiterons pas de l’exemple du « gain » plus en profondeur. Pour en savoir plus sur le traitement du gain, voir Scott Hempling, Regulating Public Utility Performance: The Law of Market Structure, Pricing and Jurisdiction au chapitre 6.C.3.b (American Bar Association 2013).
- Penn Central Transportation Co v New York, 438 US 104, 124 (1978).
- Charles River Bridge v Proprietors of Warren Bridge, 36 US 420 (1837)[Charles River Bridge].
- Ibid aux pp 551-553.
- Market Street Railway Co v Railway Commission of California, 324 US 548 (1945) [Market Street Railway].
- Ibid à 548, 554, 557, 567. Ce qu’entend le tribunal par la clause d’application régulière de la loi est le 14e amendement, qui stipule qu’aucun État ne peut priver une personne de sa vie, de sa liberté ou de ses biens sans une application régulière de la loi. La clause du 14e amendement applique à la clause relative aux recettes du 5e amendement aux États.
- Market Street Railway, supra note 10 à la p 566 (citant Hope Natural Gas v Fed. Power Comm’n, 320 US 591, 603 (1944)).
- Jersey Central Power v Federal Energy Regulatory Commission, 810 F.2d 1168 (DC Cir 1987).
- Cette approche a permis de répartir la douleur à peu près également entre les actionnaires et les contribuables. La FERC a annoncé cette politique de répartition égale dans New England Power Co., 8 FERC 6 61,054 (1979), aff’d sub nom. NEPCO Mun Rate Comm’n v FERC, 668 F.2d 1327 (DC Cir. 1981) (1982).
- Federal Power Commission v Hope Natural Gas 15 320 US 591 (1944). Dans Hope, le tribunal a insisté sur l’intérêt constitutionnellement protégé des investisseurs du service public dans l’« intégrité financière » du service. L’intégrité financière exige « un gain suffisant, non seulement pour les dépenses de fonctionnement, mais aussi pour les coûts en capital de l’entreprise ». Les coûts en capital, à leur tour, « comprennent le service de la dette et les dividendes des actions ». Les gains des propriétaires de capitaux propres, par ailleurs, devraient être proportionnels aux rendements d’investissements d’autres entreprises présentant des risques correspondants. De plus, le rendement devrait être suffisant pour assurer la confiance dans l’intégrité financière de l’entreprise, de façon à ce qu’elle puisse maintenir son crédit et attirer du capital », Ibid à la p 603.
- Duquesne Light Co v Barasch 488 US 299 (1989) [Duquesne].
- 66 Pa Con Stat § 1315.
- Duquesne, supra note 16 à la p 315 (citant FPC v Hope Natural Gas, 320 US à 602).
- Voir Denver Union Stock Yard Co v United States, 304 US 470, 475 (1938) (le maintien de l’exclusion du secrétariat de l’Agriculture de l’assiette tarifaire « des terres et des améliorations utilisées pour une exposition de bétail et pour les voies et les installations de chargement et de déchargement du bétail » parce qu’ils n’ont pas été « utilisés et utiles » pour le service réglementé); et Market Street Railway, supra note 10.
- New Orleans Waterworks Co v Rivers, 115 US 674 à la p 682-83 (1885).
- New Orleans Gas Co v La. Light Co, 115 US 650 à la p 673 (1885).
- Ronald D. Rotunda, et al., Treatise on Constitutional Law: Substance and Procedure § 15.8, à la p 103 n 74 2e édition, St Paul, Minn: West Pun Co, 1986. Voir aussi Parker v Wakelin, 937 F. Suppl. 46, 52 (D. Me. 1996) (citant Nat’l Railroad Passenger Corp v Atchison, Topeka & Santa Fe Railway Co, 470 US 451 à la p 465–66 (1985) (« L’analyse de cette question doit commencer avec la proposition bien établie qu’en l’absence d’une indication claire que la législature a l’intention de se lier contractuellement, la présomption est qu’une loi n’a pas pour but de créer des droits privés contractuels ou acquis mais simplement d’énoncer une politique à suivre jusqu’à ce que la législature en ordonne autrement » [traduction]. (Citations internes omises.)
- J’utilise le terme relativement sûr parce que la tarification traditionnelle en fonction des coûts ne garantit pas un profit; elle n’offre qu’une occasion raisonnable de réaliser un profit équitable. Voir Scott Hempling, Regulating Public Utility Performance: The Law of Market Structure, Pricing and Jurisdiction (American Bar Association 2013) au chapitre 6.B.
- Congressional Budget Office, Electric Utilities: Deregulation and Stranded Costs (1998). Consulté en ligne: <https://www.cbo.gov/sites/default/files/cbofiles/ftpdocs/9xx/doc976/stranded.pdf> (en anglais seulement).
- 66 Pa Con Stat § 2808(c)(1).
- Ibid, § 2803.
- Voir, p. ex. la loi suivante du Dakota du Sud SD Codified Laws § 49-34 A-42
« Chaque service public a le droit exclusif d’offrir un service d’électricité de détail à tout endroit où il dessert un client à compter du 21 mars 1975, ainsi qu’à tout client actuel et futur dans sa région de service désignée » [traduction]. - Standish Tel Co v Pub Util Comm’n, 499 A.2d 458, 459-64 (Me 1985).
- Alabama Power Co v Ickes, 302 US 464 à la p 478 (1938). Voir aussi Tennessee Electric Power Co v Tennessee Valley Authority, 306 US 118 à la p 139 (1939) (rejetant l’argument du service public selon quoi l’entrée de TVA dans son territoire violait la clause relative aux recettes du 5e amendement. À part une déclaration expresse accordant une exclusivité perpétuelle, la concession existante du service public « ne lui confère aucun droit contractuel ou de propriété le protégeant contre la concurrence d’individus, d’autres sociétés de service public ou de l’État ou de la municipalité octroyant la concession ») [traduction].
- Voir 66 Pa Consolidated Stat § 2804(13) (« [L]a Commission a le pouvoir et l’obligation d’approuver une charge de transition concurrentielle [pour le recouvrement de transition] ou les coûts échoués qu’elle juge équitables et raisonnables en vue du recouvrement auprès des contribuables » [traduction].)
- Voir Del Code tit 26, § 1010 (autorisant la commission à imposer une charge incontournable, de façon à protéger les clients d’offres standards « contre une migration considérable de clients délaissant les services d’offres standards, sur quoi ils peuvent être obligés de partager une trop grande part du coût des immobilisations nécessaires pour les desservir ».)
- Le contournement non économique se produit lorsque le coût différentiel total des clients qui assurent leur propre production (le coût unique de construction de la centrale, plus les coûts de fonctionnement) est (a) inférieur au tarif total qu’il paye au service public, ce qui en fait une décision favorable pour le client, mais (b) supérieur aux coûts marginaux du service public (c.àd. le coût de production d’une ou de plusieurs unités d’électricité), ce qui en fait un résultat négatif pour la société. Le contournement non économique dilapide les ressources de la société en augmentant « le coût total que paie l’industrie pour offrir un niveau de service donné ». J. Gregory Sidak et Daniel F. Spulber, Deregulatory Takings and the Regulatory Contract, Cambridge, RU, Cambridge University Press, 1998 à la p 78; voir aussi ibid aux pp 30–31 (texte sur le contournement non économique).
- Promoting Wholesale Competition Through Open Access Non-Discriminatory Transmission Services by Public Utilities, Recovery of Stranded Costs by Public Utilities and Transmitting Utilities, Order No 888, 75 FERC ¶ 61,080 (1996), order on reh’g, Order No 888-A, 78 FERC ¶ 61,220, order on reh’g, Order No 888-B, 81 FERC ¶ 61,248 (1997), order on reh’g, Order No 888-C, 82 FERC ¶ 61,046 (1998), aff’d in relevant part sub nom. Transmission Access Policy Study Group v FERC, 225 F.3d 667 (DC Cir 2000), aff’d sub nom. New York v FERC, 535 US 1 (2002).
- Order No 888, 75 FERC ¶ 61,080 au texte accompagnant les notes 581 à 588.
- Regulation of Natural Gas Pipelines After Partial Wellhead Decontrol, Order No 436, 125 FERC ¶ 61,190, order on reh’g, Order No 436-A, 33 FERC ¶ 61,448 (1985), order on reh’g, Order No 436- B, 34 FERC ¶ 61,204, order on reh’g, Order No 436-C, 34 FERC ¶ 61,404, order on reh’g, Order No 436-D, 34 FERC ¶ 61,405, order on reh’g, Order No 436-E, 34 FERC ¶ 61,403 (1986), vacated and remanded sub nom. Associated Gas Distributors v FERC, 824 F.2d 981 (DC Cir 1987), cert. denied, 485 US 1006 (1988).
- Pipeline Service Obligations and Revisions to Regulations Governing Self-Implementing Transportation; and Regulation of Natural Gas Pipelines After Partial Wellhead Decontrol, Order No 636, 59 FERC ¶ 61,030, order on reh’g, Order No 636-A, 60 FERC ¶ 61,102, on reh’g, Order No 636-B, 61 FERC ¶ 61,272 (1992), reh’g denied, Notice of Denial of Rehearing, 62 FERC ¶ 61,007 (1993), aff’d in part and remanded in part sub nom. United Distribution Co v FERC, 88 F.3d 1105 (DC Cir 1996), cert denied sub nom. Associated Gas Distribs v FERC, 520 US 1224 (1997).
- Voir United Distribution Cos v FERC, 88 F.3d 1105, 1178 (DC Cir 1996); voir aussi Order No 636, 59 FERC ¶ 61,030 au texte accompagnant n.281 (décrivant les biens échoués comme les « [c]oûts des biens d’un oléoduc [traditionnellement] utilisés pour offrir un service de ventes groupé, comme du gaz en entreposage et la capacité d’oléoducs en amont, qui ne peuvent pas être directement attribués aux clients des services dégroupés » [traduction]).
- United Distribution Cos, 88 F.3d à 1178; voir aussi Order No 636-B, 61 FERC ¶ 62,272 à la p 62,041.
- Trunkline Gas Co, 95 FERC ¶ 61,337 à la p 62,241 (2001).
- National Fuel Gas Supply Corp, 71 FERC ¶ aux pp 61,031 61,138 (1995).
- Ibid.
- Pub Util Comm’n of Cal v FERC, 988 F.2d 154, 157, 166 (DC Cir 1993).
- Ibid à la p 169; voir aussi Associated Gas Distribs v FERC, 824 F.2d 981, 1027 (DC Cir 1987) (le maintien du recouvrement des coûts échoués parce que les oléoducs étaient « pris dans une transition inhabituelle » en raison de changements réglementaires indépendants de leur volonté, ayant « conclu des contrats maintenant non économiques à une époque où les représentants de gouvernements critiquent sévèrement les dirigeants d’oléoducs pour les problèmes éprouvés en matière d’approvisionnement et les prédictions continues de hausses des prix de l’énergie »).
- United Distrib Cos v FERC, supra note 37. Voir aussi Permian Basin Area Rate Cases, 390 US à la p 792 (« L’examen judiciaire des décrets de la Commission ne fonctionnera donc avec précision et efficacement que si la Commission indique pleinement et soigneusement les méthodes par lesquelles, et le but pour lequel, elle a choisi d’agir, ainsi que son évaluation des conséquences de son décret pour le caractère et le développement ultérieur de l’industrie » [traduction].)
- Natural Gas Pipeline of America v FERC, 765 F.2d 1155, 1163-64 (DC Cir. 1985) (citant Transcontinental Gas Pipe Line Corp, 58 F.P.C. 2038 (1977), aff’d in relevant part and remanded on other grounds sub nom Tenn Gas Pipeline Co v FERC, 606 F.2d 1094 (DC Cir. 1979)).
- United Distrib Cos v FERC, supra note 37, 1179-1180 (DC Cir 1996) (citant Equitrans Inc, 64 FERC ¶ 61,374, p 63,601 (1993), National Fuel Gas Supply Corp, 71 FERC ¶ 61,031 à la p 61,138 (1995) et Jersey Cent Power & Light Co v FERC, 810 F.2d, p. 1192 (Starr, J., concordant)). Voir aussi NEPCO Mun Rate Comm v FERC, 668 F.2d 1327, 1333 (DC Cir 1981) (soutenant que « le refus de la FERC d’inclure les dépenses de projet dans l’assiette tarifaire, tout en permettant leur recouvrement comme coûts au fil du temps, est une approche valide de l’attribution des risques dans l’annulation de projets »).
- United Distrib Cos, supra note 37, à la p 1179.
- Voir Penn Cent Transp Co v New York, 438 US à la p 124 (L’analyse de la clause relative aux recettes doit tenir compte des « répercussions économiques de la réglementation sur le requérant et, plus particulièrement, de la mesure dans laquelle la réglementation a interféré avec des attentes distinctes, fondées sur un investissement ».)
- Duquesne Light Co, supra note 16 à 315. Voir aussi Verizon Commc’ns, Inc v FCC, 535 US à la p 527 (« [I]l pourrait y avoir une contestation de la prise qui est distincte d’une objection classique à un acte d’agence arbitraire ou capricieux si un organisme responsable de l’établissement de tarifs devait apporter des changements opportunistes aux méthodes d’établissement des tarifs dans l’unique but de minimiser le rendement d’un investissement en capital dans une entreprise de service public » [traduction].)
- Voir, Duquesne Light Co, supra note 16 à la p 312 (La loi de la Pennsylvanie « augmente légèrement le risque global des investissements dans les services publics par rapport à la règle d’investissement prudent. On peut supposer que la PUC rajuste l’élément de prime de risque du taux de rendement de capitaux propres en conséquence »). Voir aussi Scott Hempling, « Riders, Trackers, Surcharges, Pre-Approvals and Decoupling: How Do They Affect the Cost of Equity? » (janvier 2012), en ligne : ElectricityPolicy.com <http://www.scotthemplinglaw.com/files/pdf/ppr_riders_oge_hempling112711.pdf> (en anglais seulement).
- Milwaukee & Suburban Transp Corp v Pub Serv Comm’n of Wisconsin, 108 NW 2d 729, 733-34 (Wis 1961) (infirmer le rejet par la commission des coûts « d’ateliers et de gares » devenus inutilisés en raison de la conversion du réseau de transport du tramway aux trolleys sans rails et aux autobus) (citant Wisconsin Telephone Co v Public Service Comm’n of Wis, 287 NW 122, 158 (Wis 1939)).
- Ind Code § 8-1-27-8(1)(B).
- Fla Stat § 366.93.
- NC Gen Stat § 62-110.7.
- Miss Code Ann § 77-3-105. Pour de plus amples renseignements sur les questions réglementaires concernant la « pré-approbation », voir Scott Hempling et Scott Strauss, Pre-Approval Commitments: When And Under What Conditions Should Regulators Commit Ratepayer Dollars to Utility-Proposed Capital Projects? (National Regulatory Research Institute, 2008), en ligne <http://nrri.org/pubs/electricity/ nrri_preapproval_commitments_08-12.pdf>.