Une politique rationnelle ou de « bonne conscience » sur le carbone Transférabilité, subsidiarité et séparation

Introduction1

La politique publique en matière de décarbonisation est dictée dans une large mesure par des objectifs précis en matière de carbone préconisés par les politiciens et les décideurs. Dans les économies occidentales, il s’agit souvent de réductions ciblées de la production totale de carbone atmosphérique, même si de telles réductions sont souvent retardées. Leur mise en œuvre sous-entend souvent une gamme d’approches. Certaines sont relativement décentralisées, comme établir un prix pour le carbone au moyen de taxes ou de permis d’émissions. D’autres sont plus centralisées, comme les subventions pour les technologies sans émission de carbone (p. ex. les technologies éoliennes et solaires). D’autres encore cherchent à promouvoir une utilisation plus efficace de l’énergie en favorisant la conservation et la gestion de la demande.

Parmi les critères d’évaluation utilisés habituellement, mentionnons les suivants : évaluer si l’approche est susceptible d’atteindre les objectifs en matière de carbone (efficacité); si elle présente un rapport coût efficacité (efficience statique); si les conséquences néfastes sur les emplois et les industries peuvent être atténuées et s’il y a un potentiel de création d’emplois (effets macroéconomiques); si elle encourage l’innovation (efficience dynamique); et si elle est réalisable et durable sur le plan politique (soutien public)2. Dans cet ensemble de critères, c’est habituellement le premier et le dernier, à savoir l’efficacité et le soutien public, qui sont dominants dans la détermination des choix. Le soutien public est parfois obtenu grâce aux prétentions de création d’emplois. Les coûts à engager pour atteindre les objectifs sont souvent excessifs, et les ressources consacrées particulièrement à l’innovation sont modestes comparativement aux coûts, par exemple les subventions aux technologies existantes.

Le présent document délivre trois messages essentiels. Premièrement, les initiatives coûteuses de réduction du carbone qui ne peuvent pas être aisément transférées (en particulier dans les pays en développement) ne représentent pas une affectation rationnelle de ressources dans la lutte aux changements climatiques, elles peuvent toutefois nous donner bonne conscience si nous estimons que nous contribuons. Nous sommes d’avis que miser davantage sur l’innovation technologique est essentiel pour que les objectifs mondiaux récemment convenus de « contenir l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels » puissent être atteints3. Deuxièmement, un meilleur équilibre entre des approches et des outils décentralisés et centralisés doit être trouvé. Cet équilibre peut être éclairé par le principe de subsidiarité. Troisièmement, l’efficacité, l’efficience et la viabilité des programmes de décarbonisation seraient améliorées s’il y avait une séparation plus claire et une relation sans lien de dépendance entre les décideurs et les organismes de règlementation.

Faits stylisés

Sur les nombreux facteurs à considérer qui pourraient raisonnablement être pris en compte lors de l’élaboration de politiques et de règlements fédéraux, provinciaux et territoriaux sur le carbone, nous en avons isolé quelques-uns que nous estimons particulièrement importants à l’appui de nos arguments.

Premièrement, la demande mondiale d’énergie continue d’afficher une forte croissance. Cette demande est suscitée tant par la croissance démographique que par l’augmentation du PIB par habitant, en particulier dans les pays en développement. La demande énergétique et le PIB sont étroitement liés : mieux nous réussirons à réduire la pauvreté dans le monde, plus l’injection de carbone dans l’atmosphère sera importante, ce qui mène à son tour à un appauvrissement environnemental

Deuxièmement, les approvisionnements en hydrocarbures sont abondants et les prix resteront probablement bas dans un avenir prévisible. La révolution dans le domaine de l’exploitation des schistes a fondamentalement modifié les marchés du pétrole4. Les prix des hydrocarbures faibles ou modérés réduisent les incitations économiques à passer à des combustibles de remplacement. Le Canada est pourvu de vastes réserves de ressources de pétrole non classiques, en particulier du bitume. Les approvisionnements en gaz naturel augmentent dans le monde entier (la Chine investit actuellement dans la mise en valeur du gaz de schiste) et l’offre de charbon est, en fait, illimitée.

Troisièmement, l’histoire nous apprend que les transitions d’énergie prennent de nombreuses décennies à s’accomplir. On prévoit que la transition de 80 % d’hydrocarbures (où nous en sommes aujourd’hui) à 20 % d’hydrocarbures s’étendra également sur de nombreuses années. La transition de la biomasse au charbon a pris environ 60 ans (de 1840 à 1900). La transition qui nous a permis de passer du charbon au pétrole et au gaz naturel s’est étendue sur 70 ans (de 1900 à 1970).

Quatrièmement, le besoin d’innovation peut stimuler l’évolution technologique. L’histoire regorge d’exemples qui soutiennent l’aphorisme suivant : la « nécessité est la mère de l’invention ». La machine à vapeur Newcomen, qui a été initialement conçue pour pomper l’eau des mines de charbon, a entraîné la révolution industrielle. Il s’agit d’un exemple particulièrement éclairant de motivations économiques qui poussent l’innovation. Par contre, le « Manhattan Project » a été dicté par des impératifs de sécurité, la peur que les nazis soient les premiers à mettre au point des armes atomiques dévastatrices5.

Contexte historique

Pour placer notre discussion portant sur la politique sur le carbone dans un contexte politique plus large, il est utile d’apprécier la mise en perspective historique. Pendant une grande partie du XXe siècle, la politique et la règlementation en matière d’énergie a suivi les trajectoires générales des points de vue sociétaux sur le véritable rôle du gouvernement. La Grande Dépression des années 1930 a représenté pour beaucoup l’ultime déficience du marché, alors que les marchés, laissés à eux-mêmes, ont été incapables de fournir suffisamment d’emplois. Au cours des décennies suivantes, le proverbial pendule politique a oscillé vers la gauche avec des rôles toujours croissants des gouvernements à divers niveaux, y compris dans les industries de l’énergie.

Toutefois, la stagflation des années 1970 a constitué un cuisant échec des pouvoirs publics et les politiques macroéconomiques ne pouvaient pas résoudre les deux fléaux de l’inflation et du chômage, qui ont été aggravés par les chocs des prix pétroliers6. Ce n’était pas entièrement, ni peut-être même pas principalement un échec des politiques macroéconomiques, monétaires et budgétaires. Le fardeau règlementaire s’est beaucoup alourdi au cours des décennies précédentes, au point où de nombreuses industries ont été fortement règlementées. Un nombre croissant de données indiquent que la règlementation et les interventions gouvernementales sont allées trop loin et ont donné lieu à des appels en faveur d’une réduction de l’intervention de l’État. Le pendule politique a commencé à osciller vers la droite avec l’élection de Margaret Thatcher, de Ronald Reagan et, au Canada, de Brian Mulroney. Diverses industries ont connu la dérèglementation, certaines avec un succès retentissant, par exemple l’industrie des télécommunications. On a misé davantage sur les forces du marché et la privatisation. La croissance économique des décennies suivantes était étroitement liée à la dérèglementation qui est survenue.

Dans le domaine de l’énergie, l’exemple probablement le plus marquant est la révolution des hydrocarbures de schiste, qui n’aurait sans doute pas pu avoir lieu en l’absence la dérèglementation du gaz naturel en Amérique du Nord. La propagation du forage horizontal et de la fracturation hydraulique a par la suite entraîné un changement important dans les marchés du pétrole, comme nous l’avons soutenu précédemment.

Dans les domaines où la règlementation continue d’être exigée, les organismes de règlementation avant-gardistes sont passés des approches globales à des variantes assouplies : « la concurrence dans la mesure du possible, la règlementation, si nécessaire ». Dans le domaine de l’énergie, le modèle de règlementation traditionnel du « coût du service » a changé pour passer à une « règlementation incitative », la variante la plus répandue de cette dernière étant la « règlementation par le plafonnement des prix ».

Le verdict du drame idéologique du XXe siècle qui a dressé les sociétés fondées sur des modèles de marché contre celles qui sont fondées sur une planification centrale a été rendu sans équivoque en faveur des premières7. Le message fondamental de cette concurrence des idées était que les déficiences du marché justifiaient des corrections et non le remplacement par une planification centrale démocratique.

Au XXIe siècle, il semble que dans certaines régions, la dérèglementation est allée trop loin. L’échec d’Enron en 2001 était petit en comparaison du précipice financier de 2008.

Aujourd’hui, les industries de l’énergie font face à ce que certains ont soutenu être la déficience du marché ultime : les externalités générées par la combustion d’hydrocarbures, qui constituent la source d’environ 80 % de l’énergie dans le monde entier. La décarbonisation est devenue un objectif de plus en plus prédominant des décideurs, souvent avec un recours plus grand et non moindre aux forces du marché. Le système de plafonnement et d’échange est un exemple particulièrement frappant où les droits de propriété sous la forme de permis d’émission sont créés et donnent lieu à une négociation pour réduire les coûts de la décarbonisation8.

Les impératifs liés aux changements climatiques peuvent conduire à une nouvelle ère de règlementation croissante. En suivant cette voie, on ne doit pas ignorer les leçons du siècle dernier : une règlementation pourrait être nécessaire, mais elle devrait être appliquée lorsque c’est nécessaire de le faire et d’une façon judicieuse.

Une question d’équilibre

Au moment d’établir des politiques sur le carbone, les décideurs évaluent les conséquences économiques, environnementales et en matière de sécurité d’une voie précise, et établissent un équilibre entre les facteurs à considérer dans chaque domaine et les autres, ce qu’on appelle le « trilemme énergétique ». (Dans l’immédiat, nous remettrons à plus tard l’examen des questions d’équité.)

Les facteurs économiques à considérer devraient comprendre, au minimum, une analyse coûts-avantages pour déterminer quelles politiques et quels programmes se révèlent les plus rentables pour l’atteinte des objectifs. Il faut en outre souvent tenir compte de questions économiques plus vastes, par exemple les répercussions sur les pertes d’emplois, la création d’emplois et la croissance économique générale.

Les facteurs environnementaux à considérer varient en fonction des éléments particuliers d’une politique. Ils peuvent être locaux, régionaux ou nationaux et peuvent également englober plusieurs niveaux. Par exemple, les fermes éoliennes peuvent nuire à l’environnement local des habitants, mais fournir un approvisionnement en énergie propre et sans carbone qui profite à tous.

Les facteurs liés à la sécurité à considérer, dans un premier temps, se rapportent habituellement à un approvisionnement d’énergie fiable et à la disponibilité d’une infrastructure et de la protection de celle-ci. (Les sources d’énergie renouvelables intermittentes, par exemple, ont entraîné une foule de questions sur le contrôle de systèmes préoccupantes, mais non ingérables.) Par ailleurs, la sécurité énergétique peut également jouer un rôle important dans la promotion de la sécurité nationale9.

Il y a également des interactions entre les trois éléments du trilemme. L’accès à l’énergie favorise la croissance économique et la prospérité. La vigueur de l’économie a été et continue d’être essentielle au maintien de la sécurité nationale. Aujourd’hui, les changements climatiques sont considérés de plus en plus comme un problème de sécurité, particulièrement si les changements climatiques locaux entraînent des sécheresses, des pénuries d’eau et de nourriture, ou l’élévation du niveau de la mer qui provoque des inondations dans des régions densément peuplées avec pour conséquence la migration de populations.

Une fois qu’un certain niveau de prospérité économique est atteint, un surcroît d’attention est porté aux questions environnementales10. Un pays qui éprouve de la difficulté à satisfaire aux besoins essentiels de sa population n’est pas susceptible de consacrer d’importantes ressources pour passer du charbon relativement bon marché à des combustibles plus chers, mais plus propres, comme le gaz naturel ou des sources d’énergie renouvelables. Même les économies avancées ont du mal à atteindre un équilibre entre les objectifs environnementaux, les besoins économiques et les désirs de leurs populations.

C’est un principe fondamental de l’économie que les mécanismes de tarification qui tiennent compte des coûts sous-jacents conduisent à une affectation rationnelle et socialement optimale des ressources. Les marchés relativement efficaces ayant des distorsions de prix limitées sont socialement souhaitables. Le bon fonctionnement des marchés exige également des investissements soutenus dans les immobilisations et dans la recherche et le développement pour stimuler l’innovation. Reconnaissant que la politique sur le carbone suit une trajectoire évolutive, un processus décisionnel prévisible du gouvernement avec des délais de mise en œuvre raisonnables, des processus règlementaires efficaces et efficients et des protections simples qui permettent aux entreprises d’exercer leurs activités sans obstruction inutile, constituent tous des éléments importants qui contribuent à l’efficacité économique et à la prospérité.

Parallèlement, les politiques sur le carbone et les décisions concernant l’énergie, à quelques exceptions près, ont des impacts différents dans les divers segments de la population. Elles donnent rarement lieu à une amélioration au sens de Pareto. En effet, dans la plupart des cas, il y a des individus et des groupes qui sont affectés négativement, et d’autres qui tirent des avantages. Comment traiter ces impacts en termes de répartition et d’égalité?

Conceptuellement, il est important de distinguer la productivité et l’efficacité économique des conséquences distributionnelles. Même si des mesures de compensation appropriées peuvent convenir aux parties touchées, on souhaite y arriver avec une distorsion des prix ou une incidence sur la productivité minimales11. L’atténuation des impacts est souvent une affaire complexe et délicate qui peut exiger un compromis politique 12..Des économistes soutiendraient que, dans la mesure du possible, les mécanismes de marché ne doivent pas être perturbés afin de faire face aux impacts distributifs, particulièrement si ces impacts peuvent être traités par d’autres mécanismes13.

Subsidiarité et paration

Comment quelqu’un qui n’est pas un expert en matière d’économie, de théorie politique ou de gouvernement en vient à réfléchir de manière raisonnable à une répartition et à une attribution adéquates des rôles en ce qui a trait à une politique rationnelle sur le carbone? Comme point de départ, il faut prendre en compte le principe de subsidiarité : les décisions doivent être prises et les tâches doivent être effectuées au niveau le plus bas auquel elles peuvent être prises et effectuées de façon compétente. Le gouvernement devrait s’acquitter des responsabilités seulement si des individus ou des groupes d’individus ne peuvent s’acquitter de ces responsabilités de leur propre chef avec compétence.

Il y a matière à tenir un grand débat sur la signification et la précision de ce principe, mais l’orientation générale favorise la décentralisation qui promeut une variété d’approches pour résoudre les problèmes et stimuler l’innovation. Ce principe laisse entendre également que les citoyens devraient, dans toute la mesure du possible, prendre leurs responsabilités, de peur que leur capacité à le faire dans un « État providence » se détériore au fil du temps14. La centralisation du contrôle et de la prise de décisions concentre le pouvoir, ce qui exige la mise en place d’un système de freins et de contrepoids pour éviter les abus. Une centralisation inutile peut également conduire à une affectation inefficace des ressources.

On peut avoir recours à ce principe pour justifier des marchés et penser rationnellement aux limites règlementaires. Il est aussi utile pour fixer les limites entre les responsabilités des autorités locales, provinciales et fédérales. (Pourquoi la défense est-elle une responsabilité fédérale alors que la collecte des ordures est une responsabilité municipale?) Dans une autre variante, c’est la pierre angulaire du traité de Maastricht qui est à l’origine de l’établissement de l’Union européenne, dans ce cas, ce principe limite l’atteinte à la souveraineté nationale.

Dans le sillage de « l’échec des pouvoirs publics » des années 1970 et du mouvement en faveur de la dérèglementation qui en a découlé, la maxime succincte qui a fait écho à ce principe s’articule comme suit : « la concurrence dans la mesure du possible, la règlementation, si nécessaire ». Ce slogan, qui est étroitement lié à l’idée de subsidiarité, est repris dans de nombreux contextes, mais particulièrement lors de la dérèglementation de diverses industries au Royaume-Uni.

Un deuxième concept connexe est celui de la « séparation » qui est central en sciences politiques en tant que mécanisme fondamental qui, entre autres, limite la concentration du pouvoir, améliore la transparence et améliore potentiellement la confiance du public dans le processus décisionnel15. Dans le contexte de l’énergie et de l’environnement, il peut servir à définir la relation entre les décideurs et les organismes de règlementation16.

Comment ces principes s’appliquent-ils à la politique de décarbonisation? 

Comme premier exemple, prenons l’établissement du prix du carbone par comparaison avec les programmes de tarifs de rachat. Les taxes sur le carbone et les approches du système de plafonnement et d’échange cherchent à limiter la production de carbone, mais laissent aux personnes, aux entreprises et aux marchés le choix de la technologie à utiliser. Par exemple, une entreprise d’électricité qui s’efforce de réduire ses coûts du carbone peut remplacer le charbon par le gaz naturel ou par la production d’énergie hydraulique, éolienne ou solaire. Il s’agit d’une approche relativement décentralisée. Les programmes de tarifs de rachat, compte tenu de la mise en œuvre jusqu’à maintenant, ont généralement obligé le gouvernement, par l’intermédiaire de l’organisme de règlementation, à choisir les technologies qu’il préfère et à établir les prix et les conditions contractuelles pour l’électricité ainsi produite. Cette approche est plus centralisée. Les gouvernements sont-ils plus qualifiés pour miser sur des technologies que les entreprises? Le principe de subsidiarité tend à démontrer le contraire. Les tarifs de rachat peuvent se justifier si une approche plus décentralisée s’avère politiquement impossible, trop coûteuse sur le plan administratif ou s’il y a une autre déficience du marché qui ne peut être facilement surmontée.

Comme deuxième exemple, prenons les politiques d’innovation. Les technologies actuelles demeurent trop coûteuses pour lutter contre les changements climatiques. Les économies en développement ne les adopteront probablement pas à une échelle suffisante pour réduire les injections de carbone à des niveaux qui permettraient de stabiliser les concentrations. Des percées importantes (p. ex. dans le stockage d’électricité) et des améliorations progressives continues (p. ex. dans les technologies éolienne et solaire) sont nécessaires. Doit-on en laisser la responsabilité au marché, ou cette approche doit-elle être plus centralisée? Il convient sans doute mieux de laisser les entreprises prendre les décisions en ce qui a trait aux innovations qui peuvent être monétisées, dans un laps de temps relativement court, par des brevets et l’acquisition de droits de propriété intellectuelle, et par une croissance des ventes et des profits. En revanche, la recherche fondamentale qui n’entraîne pas directement des avantages financiers (par exemple, parce que les résultats ne sont pas brevetables) doit être encouragée et financée par les gouvernements. On ne peut pas s’attendre à ce que les entreprises consacrent d’importantes ressources aux programmes qui sont peu susceptibles de rapporter des profits, même s’ils peuvent procurer d’énormes avantages sociétaux. Dans ce cas, la subsidiarité aide à déterminer les rôles des marchés et de la décentralisation d’une part, et des gouvernements et de la centralisation d’autre part.

Comme troisième exemple, établissons la distinction entre une politique et une règlementation. Les actifs dans les industries énergétiques sont à long terme. En revanche, les gouvernements sont soumis aux pressions électorales qui peuvent mener à l’adoption de politiques qui sont parfois motivées davantage par des réalités politiques à court terme que par des objectifs sociétaux à long terme. Aussi difficile qu’elle puisse être, cette tension peut être atténuée par une distinction claire entre l’élaboration de politique et la règlementation17.

Visualiser le défi

Pour concevoir une politique rationnelle sur le carbone, il faut comprendre les sources et les utilisations de l’énergie, et des flux de carbone qui en résultent. Des représentations visuelles particulièrement utiles sont contenues dans les diagrammes des flux d’énergie et des flux de carbone, comme ceux qui sont présentés dans les figures 1 et 2 (voir pages 24-25). Les diamètres des « canalisations » doivent être plus ou moins proportionnels aux flux d’énergie et de carbone. Même un examen sommaire est utile18.

En 2014, le total de l’énergie primaire (au haut du diagramme) approche 21 000 pétajoules (PJ). Un peu moins de 80 % de cette énergie se compose d’hydrocarbures (charbon, pétrole et gaz naturel). Le charbon est principalement utilisé pour la production d’électricité et représente moins de 10 % de l’énergie primaire totale consommée sur le marché intérieur. Les parts du gaz naturel et du pétrole dépassent 30 % de l’énergie consommée sur le marché intérieur. Les sources renouvelables – hydraulique, éolienne, solaire, géothermique – représentent environ 13 % du total. Les 10 % restants sont produits à partir de sources nucléaires.

Examinons maintenant la demande en énergie qui se répartit entre les secteurs résidentiel, commercial, industriel et des transports. L’énergie dans chacun de ces secteurs produit des « services énergétiques » ou est perdue sous forme « d’énergie rejetée », cette dernière représente environ 50 % de l’énergie totale. Le secteur le moins efficace est celui des transports dans lequel 75 % de l’énergie est « rejetée ». Le secteur le plus efficace est le secteur industriel dans lequel seulement 20 % de l’énergie est « rejetée ». Il peut sembler globalement que les humains sont lamentablement inefficaces, puisqu’ils « gaspillent » plus de la moitié de l’énergie que nous produisons, mais ce gaspillage s’explique surtout par l’état de la technologie et la deuxième loi de thermodynamique qui stipule que quand l’énergie est transformée d’une forme à une autre, une partie est dissipée dans l’environnement. En fait, nous avons accompli des progrès considérables. En effet, le feu utilisé pour se chauffer et pour cuisiner à l’ère préindustrielle « gaspillait » 95 % ou plus de l’énergie incorporée dans le bois qui brûle.

La figure 2 montre les niveaux des émissions de dioxyde de carbone provenant des différentes sources d’énergie illustrées à la figure 1. On pourrait considérer ces deux diagrammes comme des faux jumeaux : le premier cartographiant l’offre et la demande sur les marchés énergétiques canadiens, le deuxième illustrant l’importante externalité correspondante. Ces faux jumeaux fournissent de précieux renseignements de part et d’autre19 .

Comparons le charbon et le gaz naturel. Même si le gaz naturel est nettement plus utilisé que le charbon, le gaz naturel émet nettement moins de dioxyde de carbone par unité d’énergie 20. En fait, le gaz naturel a une empreinte carbone qui équivaut à peu près à la moitié de celle du charbon. Le pétrole, pour sa part, a une empreinte carbone qui équivaut à peu près aux deux tiers de celle du charbon.

Ces figures semblent indiquer que remplacer le charbon par le gaz naturel dans la production d’électricité peut avoir une incidence importante, voire spectaculaire, sur les émissions de CO2. Même remplacer le pétrole par du gaz naturel dans les transports peut aussi être efficace pour réduire les émissions de carbone. La disponibilité du gaz de schiste, exploitable à de faibles coûts de production, combinée avec son avantage carbonique, semble annoncer « l’âge d’or du gaz ». Certains soutiennent que le gaz naturel est le combustible de transition qui nous fera passer de l’ère des hydrocarbures à un monde futur à faibles émissions de carbone21.

Le remplacement du charbon par le gaz naturel et les énergies renouvelables est survenu dans l’industrie de l’électricité en Ontario et fait partie du cadre de planification de l’Alberta. Aux États-Unis, la disponibilité de gaz naturel bon marché ainsi que des initiatives gouvernementales ont dicté un changement majeur pour passer du charbon au gaz pour la production d’électricité22.

À l’échelle mondiale, la situation n’est guère encourageante. La part du charbon dans les émissions mondiales provenant de la combustion est juste en dessous de 50 %, la part du pétrole est d’environ 30 % et celle du gaz naturel est de 20 %23. On pourrait penser qu’un remplacement généralisé du charbon par le gaz naturel aurait pour effet de réduire considérablement la croissance des émissions, mais cela ne serait pas une solution à long terme, car le gaz naturel est évidemment un hydrocarbure. De plus, en Chine, où le charbon est abondant et moins cher que le gaz naturel, l’utilisation du charbon domine celle du gaz naturel d’un ordre de grandeur24 : une nouvelle centrale électrique alimentée au charbon est construite toutes les quelques semaines. Comme le revenu par habitant s’accroît en Chine, l’utilisation des hydrocarbures dans les transports continuera à augmenter rapidement.

Conclusions

Des historiens nous ont signalé que nous souffrions de « présentisme », un état où les circonstances, les attitudes et les événements actuels jouent un rôle crucial dans le façonnement de nos points de vue. À leur avis, il est préférable d’adopter un point de vue historique. Dans l’élaboration de la politique rationnelle sur le carbone, deux leçons essentielles sont négligées à nos risques et périls. La première est que les transitions énergétiques prennent de nombreuses années. Par conséquent, si la décarbonisation est essentielle, nous devons être réalistes concernant les délais. Une transition accélérée peut se produire, mais elle s’appuierait fort probablement sur l’innovation technologique. La deuxième leçon à retenir est que les marchés et des mesures incitatives peuvent fournir des mécanismes très puissants pour réussir la transition.

Les scientifiques et les ingénieurs ont habituellement une conception différente de celle des économistes par rapport à ce qui constitue une politique rationnelle. Pour les premiers, une intervention opportuniste au moyen de la résolution de problèmes constitue habituellement le point focal. Les économistes, qui plaisantent souvent pour ignorer un problème25, se concentrent en premier lieu sur la création de mesures incitatives qui sont compatibles avec des résultats souhaitables sur le plan social. Les politicologues, reconnaissant que la politique est « l’art du possible » restreignent les recommandations des économistes et des scientifiques en mettant l’accent sur ce qui est réalisable. Les politiciens, les organismes de règlementation et les avocats doivent bien sûr mettre en pratique les idées.

Étant donné leur rareté, les ressources – qu’elles soient obtenues par l’entremise de subventions, d’impôts, en raison d’une baisse de productivité économique ou par d’autres mécanismes – doivent impérativement être dépensées prudemment. La prudence exige d’adopter non seulement une perspective locale, mais également une perspective mondiale. Le transfert de compétence est un élément clé qui doit faire partie du mécanisme d’évaluation de la politique. Des dépenses de plusieurs milliards de dollars au Canada qui permettraient de réduire les émissions de carbone sur le territoire national, mais pas ailleurs doivent être soupesées par rapport à l’utilisation de ces fonds en appui à la recherche et au développement de technologies qui sont plus susceptibles d’être adoptées ailleurs, en particulier dans les économies en développement où la demande en énergie connaît une progression exponentielle26.

L’architecture de nos structures politiques et règlementaires, et leur relation avec les marchés est indispensable. Nous estimons que la subsidiarité est un point de départ utile pour évaluer les rôles et les responsabilités appropriés, et déterminer quelles décisions devraient être centralisées et décentralisées. De plus, la subsidiarité s’avère utile dans la formulation et l’évolution d’une politique rationnelle en matière d’innovation, surtout, pour déterminer ce que les marchés pourraient générer et ce qui requiert le soutien et les ressources du gouvernement. Nous estimons aussi qu’une accentuation de la séparation entre l’établissement de politiques et la règlementation réduirait les aspects négatifs de la prise de décisions politisée.

Étonnamment, les diagrammes des flux d’énergie et des flux de carbone des gouvernements provinciaux et fédéral ne sont pas disponibles sur une base commune et comparable. Leur plus grande disponibilité éclairerait et faciliterait le débat public, les discussions et l’élaboration des politiques. Parmi les stratégies qui donnent « bonne conscience » et qui doivent être rationalisées, mentionnons celles dont le coût est particulièrement élevé, celles qui sont susceptibles d’exporter la production intérieure de carbone vers d’autres pays (ce qu’on appelle la fuite de carbone)27, et celles qui ne risquent pas d’être utilisées ailleurs ou adoptées à grande échelle.

Le défi du carbone intensifie les pressions sur les démocraties libérales. Nous avons déjà observé des tendances politiques polarisantes et potentiellement déstabilisantes, principalement de nature populiste. Selon toute vraisemblance, ces mouvements prennent racine dans la mondialisation, ou plus précisément dans la distribution de ses fruits. Si la croissance ralentit à cause des contraintes liées au carbone, les tensions sociales dans les démocraties libérales pourraient s’accroître avec une concurrence accrue pour la « richesse économique »28. L’innovation, qui est au cœur de la prospérité des démocraties libérales, ouvre la voie la plus prometteuse vers la route de la résolution ultime du défi du carbone.

Figure 1 – Canada Energy Flow
La figure ci-dessous est uniquement disponible en anglais.

Figure 2 – Carbon Flow Emissions
La figure ci-dessous sont uniquement disponible en anglais.

* Département de sciences économiques, Université de Toronto, 150, rue St. George, Toronto (Ontario), M5S 3G7, Canada; yatchew@chass.utoronto.ca. Le présent document se fonde sur un exposé présenté dans le cadre du Canadian Energy Law Forum, qui a eu lieu du 18 au 20 mai 2016, à Montebello, au Québec. L’auteur tient à remercier Gordon Kaiser et les participants au Forum pour leurs précieux commentaires. Le soutien du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada est également salué avec reconnaissance. Toutes les erreurs qui pourraient subsister sont de la responsabilité de l’auteur. Veuillez ne pas citer sans l’autorisation écrite de l’auteur.

  1. Des parties du présent document puisent directement et fortement dans des écrits antérieurs de l’auteur, en particulier Adonis Yatchew, « Economics of Energy:  Big Ideas for the Non-Economist » (2014)1:1 Energy Research and Social Science 74-82 et la conclusion du document « Energy Projects, Social Licence, Public Acceptance and Regulatory Systems In Canada: A White Paper » de John Colton, Kenneth Corscadden, Stewart Fast, Monica Gattinger, Joel Gehman, Martha Hall Findlay, Dylan Morgan, Judith Sayers, Jennifer Winter et Adonis Yatchew, École de politique publique, Université de Calgary, mai 2016.
  2. Consulter Richard Green et Adonis Yatchew, « Support Schemes for Renewable Energy: An Economic Analysis » (2012) 1 Economics of Energy & Environmental Policy 83-98. Consulter également Brian Rivard et Adonis Yatchew, « Integration of Renewables into the Ontario Electricity System » The Energy Journal [à paraître en 2016], pour une évaluation récente des programmes pour l’électricité renouvelable en Ontario.
  3. Accord de Paris, Doc off UNFCCC, 21e sess, annexe point 4(b), Doc NU/CP/2015/L.9/Rev.1 (12 décembre 2015), en ligne : UNFCCC <http://unfccc.int/resource/docs/2015/cop21/fre/l09r01f.pdf>.
  4. La capacité de l’OPEP d’exercer un pouvoir de marché a été gravement minée. Dans ce qui constitue peut-être le changement le plus profond dans les marchés pétroliers depuis 1973, l’extraction de pétrole par des méthodes non classiques a bouleversé les marchés pétroliers pas seulement parce qu’elle offre une nouvelle source d’approvisionnement, mais surtout parce qu’elle est évolutive. Le coût d’un puits de gaz de schiste est de quelques millions de dollars (comparativement aux milliards de dollars pour un champ gazier sous-marin). L’Arabie saoudite a modifié sa stratégie afin de mettre l’accent sur sa part de marché plutôt que de chercher à influencer les prix du marché. Consulter Adonis Yatchew, « Discerning Trends in Commodity Prices », Macroeconomic Dynamics [à paraître en 2016].
  5. Des économistes ont produit une documentation abondante sur cette question sous la rubrique « endogenous technological change » (le changement technologique est endogène).
  6. L’inflation a finalement été vite maîtrisée aux États-Unis grâce aux mesures prises par une autorité monétaire indépendante et crédible sous la direction de Paul Volcker. La croissance économique a repris peu après. Si la politique en matière d’énergie et de climat revêt une telle importance, il serait alors opportun que les organismes de règlementation concernés jouissent d’une plus grande indépendance.
  7. La libéralisation, la marchandisation et la privatisation ne se limitaient pas aux démocraties occidentales. La forte croissance de la Chine au cours du présent siècle peut être imputée à de modestes politiques de libéralisation qui ont commencé à être mises en place à la fin des années 1970. La dissolution de l’Union soviétique a entraîné le passage à une économie de marché et à une démocratie pluripartite dans un certain nombre des satellites et des anciennes républiques soviétiques. Certains pays d’Amérique du Sud se sont également engagés dans un programme de dérèglementation, avec plus ou moins de succès. Cette période de dérèglementation dans les économies moins développées a entraîné non seulement une croissance, mais également, par de nombreuses mesures, une réduction des inégalités dans le monde alors que des centaines de millions de personnes sont sorties des formes les plus extrêmes de pauvreté, (consulter Kenneth Rogoff, « Inégalités, Immigration et hypocrisie », Project Syndicate, 8 mai 2015.)
  8. Le système de plafonnement et d’échange repose sur les travaux de l’économiste lauréat du prix Nobel, Ronald Coase. Le théorème de Coase propose que des droits de propriété sur une externalité soient créés et montre que sans égard à leur distribution, des avantages sociaux optimaux sont obtenus.
  9. Il y a de nombreux cas au cours de l’histoire où un approvisionnement énergétique fiable a primé dans les facteurs à considérer liés à la sécurité nationale. Le désir de l’Occident d’assurer la libre circulation du pétrole par le détroit d’Hormuz et la dépendance de l’Europe à l’égard du gaz naturel russe constituent deux exemples contemporains ayant de vastes ramifications géopolitiques. À l’époque de la guerre froide, le monde était divisé en sphères d’influence. À la suite de l’effondrement de l’Union soviétique, ce modèle d’ordre mondial a permis de profiter d’une brève accalmie. Mais récemment, une Chine expansionniste et une Russie renaissante ont fait apparaître de nouvelles fractures idéologiques. Tout comme beaucoup soutiennent qu’il incombe au Canada de faire sa part pour atténuer les changements climatiques et combattre la pauvreté mondiale, on pourrait également faire valoir qu’il a le devoir de protéger les idéaux de la démocratie libérale sur lesquels le Canada est fondé et de soutenir les mouvements démocratiques naissants de ses alliés et de ceux qui veulent le devenir. Sa capacité de le faire dépend de sa prospérité et de son indépendance énergétique.
  10. Selon ce qu’on appelle la « courbe environnementale de Kuznets ».
  11. Par exemple, une hausse des prix de l’énergie dans un monde en voie de décarbonisation (p. ex. en raison de la hausse des coûts des énergies renouvelables ou du prix du carbone) peut entraîner des répercussions importantes sur les familles à faible revenu, ce qu’on appelle l’effet de la « pauvreté énergétique ». De telles circonstances, toutefois, ne justifient pas la baisse des tarifs d’électricité pour tous les utilisateurs. On préconise des mécanismes de redistribution qui ne faussent pas les signaux des prix de l’énergie, comme un allégement fiscal ou des transferts directs, plutôt qu’une simple baisse des prix pour tous les consommateurs, peu importe leurs revenus.
  12. Consulter Michael J. Trebilcock, “Dealing with Losers: The Political Economy of Policy Transitions” (2014) Oxford University Press.
  13. Plus récemment, l’idée d’une « légitimité sociale » a gagné en popularité. Aussi amorphe soit-elle, cette idée suppose un appui communautaire soutenu aux projets, qu’il s’agisse de pipelines, de corridors de transport, de mines ou d’autres infrastructures. La légitimité sociale, tout compte fait, rendrait probablement l’établissement d’une politique rationnelle sur le carbone plus difficile encore, une tyrannie de la minorité, pour ainsi dire. Premièrement, il y aura probablement une hausse des mesures incitant à un « comportement de maximisation de la rente ». La menace du véto, ou même l’obstruction, dote le groupe touché d’un endettement qui peut se traduire par une extraction de rentes qui sont disproportionnées par rapport aux impacts. Deuxièmement, une exigence de légitimité sociale accroît l’incertitude règlementaire et politique associée à un projet donné, décourage l’investissement ou exige des rendements supérieurs à ce que mériterait le risque inhérent de l’engagement proposé. Dans ce cas, les prix des marchés des capitaux sont faussés. Troisièmement, elle peut affaiblir les droits fonciers, entravant ainsi le fonctionnement du marché. À cet égard, la poursuite des objectifs environnementaux et la protection des ressources communes peuvent, dans certains cas, être améliorées grâce au renforcement plutôt qu’à l’affaiblissement des droits fonciers. L’idée d’une légitimité sociale a également été associée aux notions d’équité et de justice sociale dans le marché, dans certains cas en théorie, dans d’autres en pratique.
  14. Dans un autre contexte, les « parents hélicoptères » sont critiqués pour faire la microgestion de la vie de leurs enfants, entravant ainsi leur développement normal.
  15. Pensons à la séparation des pouvoirs, à la séparation de l’Église et de l’État et à la séparation du gouvernement de l’économie (p. ex. en lien avec la propriété privée).
  16. Le contraste entre la règlementation de l’énergie et la règlementation de la masse monétaire. Les banques centrales des démocraties occidentales sont en grande partie à l’abri des pressions politiques parce que les électeurs ont bien compris que leurs représentants élus ne peuvent pas véritablement influencer la politique monétaire. En revanche, la politique budgétaire, qui détermine par exemple les impôts et les dépenses publiques, est soumise au contrôle des gouvernements élus; les initiatives dans ces domaines constituent souvent la raison principale des contestations politiques.
  17. Consulter Adonis Yatchew, « How to redeem Ontario’s electricity industry », The Globe and Mail (15 décembre 2015).
  18. De tels diagrammes sont définis comme des diagrammes Sankey. Consulter notamment ceux produits par le Laboratoire national de Lawrence Livermore aux États-Unis, en ligne : <https://flowcharts.llnl.gov/>.
  19. La répartition des sources d’énergie affiche une variation importante selon la province ou le territoire. Les provinces du Québec, du Manitoba et de la Colombie-Britannique sont dotées de généreuses ressources hydrauliques. L’Alberta, pour sa part, dispose d’importantes ressources en hydrocarbures, et, sans surprise, elle a utilisé ces ressources non seulement pour son propre approvisionnement énergétique, mais également pour la création d’emplois et d’exportations. Des diagrammes semblables ont peut-être été réalisés pour chaque province et territoire, mais ils ne semblent pas être diffusés par des sources publiques.
  20. Ces figures ne comprennent pas de données sur les émissions de gaz à effet de serre au cours du processus d’extraction. L’incidence des émissions de gaz à effet de serre des molécules de méthane est plus de 20 fois supérieure à celle du dioxyde de carbone, et le méthane qui s’échappe dans l’atmosphère (que l’on appelle les émissions fugitives de méthane) peut considérablement accroître l’empreinte carbone du méthane à l’échelle mondiale.
  21. Consulter MIT Energy Initiative, The Future of Natural Gas, Cambridge, MIT, juin 2011.
  22. Le coût du combustible pour la production d’électricité au gaz naturel a parfois été inférieur à celui du charbon sur une base d’équivalence en BTU. Consulter US Energy Information Administration, Electricity Monthly Update, 26 juillet 2016, en ligne: <https://www.eia.gov/electricity/monthly/update/resource_use.cfm#tabs_spot-2 >.
  23. International Energy Agency, CO2 Emissions From Fuel Combustion, 2015, en ligne : <https://www.iea.org/publications/freepublications/publication/CO2EmissionsFromFuelCombustionHighlights2015.pdf >.
  24. Il est difficile d’obtenir des données précises sur les émissions chinoises. En 2012, 68 % de l’énergie consommée provenait du charbon et 90 % provenait d’hydrocarbures. Zhu Liu, China’s Carbon Emissions Report 2015, Cambridge, Harvard Kennedy School Belfer Center, mai 2015.
  25. « Posons une hypothèse : Nous avons un ouvre-boîte » est une blague bien connue sur la solution d’un économiste pris au piège sur une île avec une énorme quantité de boîtes de conserve, mais pas d’outils.
  26. Les coûts de l’énergie solaire ont baissé de façon très marquée, mais nous n’en sommes pas encore au point où ils sont largement abordables dans les pays en développement. Certains soutiennent qu’en l’absence de crédits d’impôt, l’énergie solaire pour l’usage résidentiel restera « bien au-dessus de la parité avec le réseau dans la plupart des États américains pour les années à venir » (traduction d’un extrait tiré de David Rotman, « Paying for Solar Power », MIT Technology Review, 17 août 2015). Les prix des ensembles de batteries de Tesla ont aussi baissé considérablement, au moment même où la capacité de stockage a augmenté. (Kevin Bullis,« Why We Don’t Have Battery Breakthroughs », MIT Technology Review, 10 février 2015). Ils demeurent toutefois encore trop élevés pour une utilisation résidentielle généralisée.
  27. Par exemple, les contraintes liées au carbone qui entraînent la migration de l’industrie manufacturière du Canada, qui dépend relativement peu du charbon, vers, par exemple la Chine où le charbon est la principale source de combustible, peuvent augmenter les émissions mondiales de carbone.
  28. Séparément, les démocraties libérales devraient subir des pressions encore plus grandes venant des démocraties dites non libérales (un terme problématique, en soi), mais ce sujet et son lien avec les politiques à l’égard du carbone et de l’énergie devraient être abordés dans un document distinct.

Laisser un commentaire