Le Canada dépose un nouveau projet de loi pour réglementer les projets éoliens en mer1

Introduction

Le ministre des Ressources naturelles du Canada, Jonathan Wilkinson, a présenté le 30 mai 2023 un projet de loi visant à permettre le développement de l’énergie éolienne en mer pour la première fois dans le Canada atlantique. Le projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada – Terre-Neuve-et-Labrador et la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada – Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers[2], modifiera la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada – Terre-Neuve-et-Labrador[3] et la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada – Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers[4] qui, dans leur forme actuelle, ne permettent pas l’approbation de projets d’énergie éolienne en mer.

Actuellement, les lois sur les accords atlantiques mettent en œuvre des accords entre le Canada et les provinces respectives sur la gestion conjointe des ressources pétrolières extracôtières. Le projet de loi C-49 moderniserait les lois sur les accords atlantiques en établissant notamment un cadre pour le développement et la réglementation des projets d’énergie renouvelable en mer dans les deux provinces et leurs zones extracôtières. Le projet de loi C-49 élargit également la réglementation des projets pétroliers en cours et clarifie les règles de compétence concernant les frontières maritimes intérieures.

Le nouveau cadre réglementaire

Les modifications importantes introduites par le projet de loi C-49 devraient permettre de rationaliser les demandes d’approbation des droits sur les fonds marins en introduisant un permis unique pour les « terres submergées » afin de mener à bien les projets d’énergie renouvelable en mer. Ce système remplacerait le système de tenure actuel, qui prévoit la délivrance de plusieurs permis dans le cadre du développement de projets pétroliers.

En vertu du projet de loi C-49, le pouvoir de réglementation de l’énergie éolienne en mer serait accordé aux deux offices extracôtiers existants, gérés conjointement, qui sont actuellement exclusivement responsables de la réglementation des projets pétroliers et gaziers en mer : l’Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers[5] et l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers.[6] Dans le cadre des modifications, ces offices seront renommés Régie Canada-Nouvelle-Écosse de l’énergie extracôtière et Régie Canada-Terre-Neuve-et-Labrador de l’énergie extracôtière, (les « régies »).

Les régies seraient habilitées à régir divers aspects des activités liées aux énergies renouvelables en mer, tels que la sécurité, la protection de l’environnement, le démantèlement et les redevances. Les régies seraient également habilitées à procéder à des évaluations environnementales, à des auditions publiques et à des procédures de règlement des litiges liés aux projets d’énergie renouvelable en mer.

L’exploration, le développement et la production de ressources énergétiques renouvelables en mer, telles que l’énergie éolienne, marémotrice ou houlomotrice, seraient autorisés par le biais d’une demande adressée aux régies, mais la décision de lancer des appels d’offres serait soumise à l’approbation des ministres fédéraux et provinciaux.

Modifications des règlements existants

Le projet de loi C-49 propose des modifications à la réglementation actuelle des activités pétrolières en mer, afin de l’aligner sur les nouvelles dispositions relatives aux énergies renouvelables en mer. Certaines de ces modifications sont les suivantes :

  • des exigences nouvelles ou modifiées concernant la consultation des gouvernements provinciaux, des peuples autochtones et d’autres parties avant de délivrer des autorisations ou d’adopter des règlements sur les activités pétrolières en mer;
  • des pouvoirs élargis pour les régies afin qu’elles puissent agir et réglementer les activités pétrolières en mer, notamment en matière de sécurité, de protection de l’environnement, de démantèlement et de redevances; et
  • des mesures supplémentaires concernant les évaluations environnementales, les auditions publiques et les procédures de règlement des litiges liés aux projets pétroliers en mer.

Nouvelles réglementation et normes environnementales

Le projet de loi C-49 comprend également une série de modifications plus générales concernant les aspects environnementaux, de compétence et d’application des lois existantes. Les principales modifications apportées aux règles de gestion des gisements et champs extracôtiers transfrontaliers devraient permettre d’assurer la cohérence et la coopération entre les juridictions concernées.

À l’instar d’autres projets de loi fédéraux récents, le projet de loi C-49 élargirait les outils d’application de la loi et de conformité existants, tels que les inspections, les audits, les ordonnances, les sanctions administratives pécuniaires et les infractions, afin de garantir la sécurité et la protection de l’environnement dans le cadre des activités extracôtières.

Sur le plan procédural, le projet de loi C-49 prévoit également une protection accrue des renseignements confidentiels et de nouvelles règles sur la divulgation d’informations dans l’intérêt public, sous réserve de certaines exceptions et procédures.

D’un point de vue environnemental, le projet de loi C-49 prévoit que les normes relatives aux Zones de protection marine[7] s’appliquent à toutes les zones extracôtières régies par le règlement. Les parcs éoliens en mer devraient être autorisés dans les zones marines protégées. Le projet de loi C-49 précise également que les activités liées aux énergies renouvelables en mer ne seraient pas considérées comme des activités industrielles clés, mais que les activités connexes qui entrent en conflit avec les objectifs de conservation fixés par le gouvernement fédéral pourraient néanmoins être interdites.

La nouvelle procédure fédérale d’évaluation de l’impact sera applicable au développement de l’énergie en mer. Pour les projets pétroliers, les futures autorisations de découverte importante seront limitées à 25 ans, remplaçant la durée indéterminée actuellement en vigueur. Toutefois, les licences de découverte importante existantes demeureraient exemptées de la limite de 25 ans.

Compensation pour les droits existants

Avant de lancer un appel d’offres, le projet de loi C-49 exigera que les autorités gouvernementales désignées, à savoir les ministères fédéraux ou provinciaux, ou les régies, identifient les zones propices au développement, à la conservation ou à la pêche. La loi proposée ne fournit cependant pas de détails sur les compensations potentielles pour les membres de l’industrie de la pêche qui pourraient être exclus des zones extracôtières en raison de l’approbation de projets d’énergie renouvelable.

Le président de l’Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers a déclaré que les conditions associées aux permis d’exploitation des fonds marins et aux régimes d’indemnisation sont encore en cours de détermination par les gouvernements. Rien n’indique dans le projet de loi C-49 que le processus d’indemnisation impliquerait des tiers, comme des promoteurs de parcs éoliens.

Prochaines étapes

Dans l’ensemble, le projet de loi C-49 représente un effort ambitieux pour moderniser la réglementation des ressources énergétiques en mer. En établissant un cadre réglementaire fédéral-provincial unifié et en introduisant de nouvelles mesures de protection de l’environnement, le projet de loi vise à promouvoir le développement durable, à renforcer la coopération et à assurer une gestion responsable et efficace des ressources. Les gouvernements de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse devraient introduire des lois similaires pour compléter le cadre proposé dans le projet de loi C-49.

Alors que le projet de loi C-49 doit encore être adopté, la Nouvelle-Écosse s’est déjà fixé pour objectif de délivrer des licences pour cinq gigawatts d’énergie éolienne en mer d’ici à 2030[8] en vertu de la Marine Renewable Energy Act dans le but déclaré[9] d’encourager la production d’hydrogène vert. La location dans le cadre de ce régime devrait commencer à partir de 2025.

Dans le cadre de cette initiative, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a publié, le 14 juin 2023[10], le module 1[11] de la feuille de route de la Nouvelle-Écosse sur l’énergie éolienne en mer[12], qui détaille la vision de la province pour l’industrie éolienne en mer, la réglementation et les possibilités d’investissement. Ce module décrit le travail restant à accomplir pour compléter le régime législatif et réglementaire des projets d’éoliennes en mer. Les deux autres modules, qui seront publiés plus tard dans l’année, fourniront des orientations sur l’infrastructure, la chaîne d’approvisionnement, la consultation publique et les questions environnementales.

 

  1. Cet article a été initialement publié par McCarthy Tétrault LLP (27 juin 2023), en ligne : <www.mccarthy.ca/en/insights/blogs/canadian-energy-perspectives/prepare-offshore-winds-canada-introduces-bill-c-49-amending-atlantic-accords-acts-regulate-offshore-wind-energy-projects-atlantic-canada>.

* Dominique Bilodeau, Louis Boulanger, Kimberley Howard et Jacob Stone sont associés chez McCarthy Tétrault.
Elena Drouin est avocate au sein du cabinet.

  1. Projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada-Terre-Neuve-et-Labrador et la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, 1ere session, 44e législature, 2023 (première lecture le 3 mai 2023) [projet de loi C-49].
  2. Site Web de la législation, « Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada — Terre-Neuve-et-Labrador (L.C. 1987, ch. 3) » (18 août 2023), en ligne : Gouvernement du Canada <laws.justice.gc.ca/fra/lois/c-7.5/>.
  3. Site Web de la législation, « Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada — Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers (L.C. 1988, ch. 28) » (18 août 2023), en ligne : Gouvernement du Canada <laws.justice.gc.ca/fra/lois/c-7.8/>.
  4. Office Canada–Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers (OCNEHE), en ligne : <www.ocnehe.ca>.
  5. Office Canada–Terre‑Neuve‑et‑Labrador des hydrocarbures extracôtiers (C-TNLOHE), en ligne : <www.ctnlohe.ca/a-propos-de-nous/conseil-dadministration-de-loctnlhe/>.
  6. « Zones de protection marine » (8 février 2023), en ligne : Gouvernement du Canada <www.dfo-mpo.gc.ca/oceans/mpa-zpm-aoi-si-fra.html>.
  7. Nova Scotia Premier’s Office, « Province Sets Offshore Wind Target » (septembre 2022), en ligne : Province of Nova Scotia <novascotia.ca/news/release/?id=20220920003>.
  8. Keith Doucette, « Nova Scotia sets five-gigawatt target for offshore wind power by 2030 » (20 septembre 2022), en ligne : Atlantic <atlantic.ctvnews.ca/nova-scotia-sets-five-gigawatt-target-for-offshore-wind-power-by-2030-1.6076109>.
  9. Natural Resources and Renewables (Nouvelle-Écosse), « Province Releases Offshore Wind Road Map » (14 juin 2023), en ligne : Province of Nova Scotia <novascotia.ca/news/release/?id=20230614004>.
  10. Natural Resources and Renewables (Nouvelle-Écosse), « Nova Scotia Offshore Wind Roadmap, Module 1 » (mai 2023), en ligne (pdf) : Province of Nova Scotia < cpuc.ca.gov/-/media/cpuc-website/divisions/energy-division/documents/demand-side-management/acc-models-latest-version/2022-acc-documentation-v1a.pdf>.
  11. « Offshore wind », en ligne : Province of Nova Scotia <novascotia.ca/offshore-wind/>.

 

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