Évolution du droit administratif relatif au droit et à la réglementation de l’énergie en 2022

I. INTRODUCTION GÉNÉRALE

Croire que l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Vavilov[1] mettrait un terme à tous les problèmes importants liés à la sélection et à l’application des normes de contrôle judiciaire était toujours trop espérer. Après de nombreuses querelles judiciaires, professionnelles et théoriques sur une série de questions découlant de l’arrêt Vavilov[2] ou laissées en suspens par celui-ci, la Cour suprême du Canada est revenue à la charge en 2022, mettant fin à une période d’abstinence, et s’est efforcée (avec plus ou moins de succès) de régler certaines des questions les plus importantes soulevées par son arrêt de 2019. Le présent examen annuel consiste principalement en un exposé des arrêts pertinents, chacun d’entre eux ayant une importance différente pour le droit et la réglementation de l’énergie.

Dans la seconde partie de l’examen, je m’éloigne des normes de contrôle judiciaire et je relève un certain nombre d’autres jugements, principalement, mais pas exclusivement de la Cour suprême du Canada, qui traitent d’une série d’autres questions ayant une résonance dans le cadre du droit et de la réglementation de l’énergie : la portée de l’obligation d’équité procédurale et l’application de la doctrine de l’attente légitime dans le contexte de l’établissement de règlements ou de fonctions de type législatif, l’obligation naissante de franchise au cours des procédures réglementaires, l’éventail des recours disponibles en cas de retard abusif et/ou procédural dans le traitement des procédures administratives, et l’élaboration ou l’affinement par la Cour suprême du Canada des critères de reconnaissance de la qualité pour agir dans l’intérêt public dans le cadre de contestations constitutionnelles et de droit administratif.

II. VARIATIONS SUR UN THÈME DE L’ARRÊT VAVILOV

i. Introduction

L’une des ambitions apparentes de l’arrêt Vavilov[3] était l’adoption d’un modèle de norme de contrôle qui couvrirait l’univers du contrôle judiciaire de l’action administrative sur des motifs de fond[4]. Qu’une action administrative soit contestée devant un tribunal par le biais d’une demande de contrôle judiciaire, d’un recours statutaire ou, vraisemblablement, d’une contestation accessoire[5], l’arrêt Vavilov[6] a établi des critères pour déterminer la norme de contrôle appropriée et, par la suite, les considérations selon lesquelles un tribunal devrait effectuer un contrôle dans le cadre de l’application de la norme appropriée.

Il n’est pas surprenant que, depuis l’arrêt Vavilov[7], il y ait eu, il y a maintenant plus de trois ans, un important travail judiciaire sur un certain nombre d’aspects de la sélection des normes de contrôle et de l’adaptation contextuelle des différentes normes de contrôle exposées dans l’arrêt rendu majoritairement dans Vavilov[8]. Par exemple, l’exception précédente à la présomption de contrôle du caractère raisonnable pour les questions de droit dans le cas de questions susceptibles d’être examinées en première instance à la fois par un tribunal et par un organisme administratif s’appliquait-elle toujours? L’omission par la majorité de la Cour suprême de cette catégorie dans sa liste limitée de situations dans lesquelles la présomption de contrôle du caractère raisonnable a été renversée était-elle délibérée ou accidentelle? Compte tenu de l’accent mis par l’arrêt Vavilov sur la primauté des motifs dans la recherche du caractère déraisonnable, comment une cour de révision devrait-elle évaluer le caractère raisonnable en ce qui concerne les décisions pour lesquelles les motifs n’étaient pas exigés ou n’ont pas été fournis par le décideur?

Dans le premier cas, la Cour, sans admettre sa responsabilité, a « rétabli » l’exception dans la liste des situations où la présomption de contrôle du caractère raisonnable est renversée et où les questions de droit sont contrôlées en fonction d’une norme de décision correcte ou de bien-fondé[9]. En ce qui concerne ce dernier point, plusieurs tribunaux ont fourni des indications détaillées sur la manière dont le contrôle du caractère raisonnable doit être effectué en l’absence de motifs[10].

Cependant, étant donné l’ambition de la majorité de voir les principes de l’arrêt Vavilov s’appliquer à l’ensemble des décisions administratives fondées sur des motifs de fond, il existe au moins deux domaines dans lesquels cette approche qualifiée d’universelle a été sérieusement remise en question, mais d’une manière quelque peu différente :

  1. Étant donné que l’arrêt Vavilov exclut apparemment les questions d’équité procédurale de son modèle de norme de contrôle judiciaire, quelles normes doivent être appliquées à de telles contestations? Est-il même approprié de parler de normes de contrôle judiciaire pour les questions de procédure[11]?
  2. Dans le cas principalement, mais pas exclusivement, de la législation subordonnée, existe-t-il d’autres situations où l’universalité de l’approche de l’arrêt Vavilov en matière de contrôle de fond est compromise et où le contrôle judiciaire est toujours effectué par référence aux normes ultra vires traditionnelles ou à l’une de leurs variantes?

De plus, il importe de noter qu’il existe des contextes où ces deux questions se confondent, comme dans le cas des contestations, directes ou accessoires, des règles de procédure prévues par la loi[12] au motif qu’elles ne sont pas conformes aux principes d’équité procédurale.

En 2022, la Cour suprême a apporté une réponse partielle mais non définitive à la première question. Alors que la deuxième question a attiré une attention considérable, tant au niveau judiciaire que théorique, nous attendons toujours une résolution de laquelle des deux conceptions concurrentes (ou peut-être une fusion des deux) devrait prévaloir. Dans cette section de l’examen, je traiterai les deux questions du point de vue des précédents et des principes.

ii. Injustice procédurale – Norme de contrôle judiciaire – L’impact de l’arrêt Abrametz

Dans l’affaire Law Society of Saskatchewan v Abrametz[13], la Cour suprême a réexaminé la question du contrôle des retards dans les procédures administratives, une question à laquelle la Cour avait été confrontée pour la dernière fois en 2000 dans l’arrêt Blencoe v British Columbia (Human Rights Commission)[14]. Dans le cadre d’une procédure disciplinaire engagée par la Law Society, Abrametz avait demandé un sursis en invoquant un retard équivalant à un abus de procédure[15]. Le comité d’audition avait rejeté sa demande et il a fait appel de cette décision auprès de la Cour d’appel de la Saskatchewan, comme le prévoit l’article 56, paragraphe 1, de la Legal Profession Act de 1990[16]. L’audition d’un recours en vertu du paragraphe 56(1) nécessitait l’autorisation d’un juge de la Cour d’appel mais n’était pas limitée quant aux motifs. Abrametz a obtenu gain de cause et un sursis a été accordé[17]. La Law Society a demandé et obtenu l’autorisation de se pourvoir en cassation.

Entre parenthèses, il convient de noter que le cadre dans lequel s’est déroulée l’audience de ce pourvoi devant la Cour suprême était différent de celui de l’arrêt Blencoe[18]. Dans l’arrêt Blencoe[19], les tribunaux ont été saisis d’une demande de contrôle judiciaire en vertu de la Judicial Review Procedure Act[20] de la Colombie-Britannique, déposée après que la plainte pour violation des droits de la personne a été inscrite au rôle pour une audience. Dans sa demande de sursis, Blencoe a allégué un retard excessif dans le traitement d’une plainte pour violation des droits de la personne déposée à son encontre, retard qui équivaut à un déni d’équité procédurale et à un abus de procédure[21]. Contrairement à l’arrêt Abrametz[22], il n’y a pas eu de demande formelle de sursis dans le cadre de la procédure administrative. La Cour suprême de la Colombie-Britannique n’a pas eu à examiner de décision interne sur cette question. La Cour a plutôt mené un procès en première instance sur l’allégation de retard excessif de Blencoe[23]. Les questions relatives à la norme de contrôle judiciaire n’étaient tout simplement pas pertinentes puisque la Cour ne procédait pas au contrôle d’une décision. C’était également une époque où l’idée d’une cour de révision qui s’en remettrait à un tribunal sur des questions de procédure n’aurait guère eu de prise. Même l’affaire Dunsmuir c Nouveau-Brunswick[24] n’aurait lieu que sept ans plus tard. Par conséquent, il n’est pas surprenant que la Cour suprême n’ait pas fait mention d’une norme de contrôle judiciaire.

En revanche, dans l’arrêt Abrametz[25], il y avait une décision réelle à soumettre au contrôle judiciaire dans le cadre d’un régime d’appel statutaire. En fait, il est probable qu’aujourd’hui un tribunal canadien hésiterait à autoriser une telle requête ou demande de contrôle judiciaire sans que l’appelant ou le requérant n’ait d’abord soulevé la question officiellement auprès de l’autorité de réglementation désignée ou du tribunal d’audition[26]. De manière plus pertinente, il s’est également avéré qu’à une époque où la question de la norme de contrôle faisait l’objet d’une attention croissante, la Cour suprême s’est penchée sur la question de sa pertinence en matière de contrôle judiciaire pour des motifs procéduraux.

Jusqu’à l’arrêt Abrametz, le principal précédent sur la norme de contrôle judiciaire à appliquer aux allégations d’iniquité procédurale était l’arrêt du juge LeBel dans l’affaire Établissement de Mission c Khela[27]. Khela avait été transféré involontairement dans un pénitencier à sécurité maximale et avait demandé un contrôle judiciaire de cette décision par le biais d’une demande d’habeas corpus auprès de la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Lorsque l’affaire est arrivée devant la Cour suprême, le juge LeBel a abordé la question de la norme selon laquelle une cour de révision devrait évaluer les questions de procédure. Au départ, sa position semblait simple :

La norme applicable à la question de savoir si la décision a été prise dans le respect de l’équité procédurale sera toujours celle de la « décision correcte »[28].

Cependant, par la suite, en répondant à l’argument selon lequel il y avait eu une injustice procédurale résultant du refus d’accès à certains documents pertinents sur la base de l’évaluation du « risque » par un directeur de prison, le juge LeBel a poursuivi en disant :

Le commissaire, ou son représentant, est le mieux en mesure de décider si ce risque pourrait effectivement se concrétiser. Par conséquent, il faut, dans une certaine mesure, faire preuve de déférence sur ce point envers le commissaire ou le directeur. De même, ces derniers sont mieux en mesure de déterminer la fiabilité de certaines ou de certains informateurs. Par conséquent, il faut, sur ce point également, faire preuve d’une certaine déférence [traduction][29].

Il est évident que la manière de concilier ces deux déclarations pose un problème. La déclaration initiale concernant le maintien du contrôle du bien-fondé pour les questions d’équité procédurale ne se concentre pas simplement sur la détermination du seuil à savoir s’il existe un droit à un niveau quelconque d’équité procédurale; elle s’étend aux détails de ce droit à l’équité procédurale. Pourtant, dans la deuxième déclaration, le juge LeBel semble accepter qu’il existe au moins certaines situations dans lesquelles le décideur a le droit de faire preuve de retenue dans l’évaluation des arguments relatifs au contenu des droits à l’équité procédurale dans un cas particulier. En l’espèce, cette évaluation consistait à déterminer s’il fallait déroger aux droits normaux d’accès aux documents pertinents sur la base d’une évaluation du risque.

L’année suivante, en 2015, le juge d’appel Stratas, dans l’affaire Bergeron c Canada (Procureur général)[30], sans prétendre résoudre le dilemme de l’arrêt Khela, a rendu compte de ce qu’il a décrit comme une « confusion jurisprudentielle » sur la question du rôle de la déférence dans le domaine de l’équité procédurale. Depuis lors, il a continué à documenter la perpétuation de cet état de confusion dans son ouvrage régulièrement mis à jour (et incluant désormais Abrametz), « The Canadian Law of Judicial Review : Some Doctrine and Cases »[31].

Comme indiqué ci-dessus, le contexte procédural de l’arrêt Abrametz[32] était un appel statutaire avec autorisation de la Cour d’appel de la Saskatchewan. Le juge Rowe, rendant le jugement d’une majorité de 8 contre 1 renversant la Cour d’appel de la Saskatchewan et refusant un sursis d’instance, semble avoir pris soin de limiter la portée de la décision sur la question de la norme de contrôle au contexte des appels statutaires. En d’autres termes, on est amené à spéculer immédiatement sur la raison pour laquelle il n’a pas inclus dans la portée de son bref exposé l’examen du rôle de la norme de contrôle pour les affirmations de questions d’iniquité procédurale dans les demandes de contrôle judiciaire en particulier.

La présente affaire permet à la Cour de clarifier la norme de contrôle applicable aux questions d’équité procédurale et d’abus de procédure en cas d’appel prévu par la loi. … Cela ne déroge pas aux affaires Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa[33] … et Khela[34] … puisque ces décisions concernaient respectivement un contrôle judiciaire et la délivrance de brefs de prérogative[35].

Dans le cadre de la réglementation de l’énergie, l’arrêt couvre explicitement les régimes réglementaires où, comme dans le cas de l’Alberta Utilities Commission (AUC), il existe un appel sur des questions de droit et de juridiction avec autorisation de la Cour d’appel de l’Alberta[36], mais pas la situation dans les juridictions où l’accès au contrôle judiciaire d’un régulateur de l’énergie ne se fait pas par le biais d’un appel statutaire mais par le biais de la procédure normale de demande de contrôle judiciaire[37]. Dans ce contexte limité, le juge Rowe a reconnu que l’arrêt Vavilov[38] était un cas de contrôle de fond et non de procédure, mais il a affirmé que, dans le cas des recours statutaires devant les tribunaux, l’arrêt Vavilov était « catégorique »[39]. Les contestations de fond et de procédure devaient être traitées par référence aux « normes de contrôle d’appel »[40] : la décision correcte pour les questions de droit et l’« erreur manifeste et dominante pour les questions de fait et de droit et de fait mixtes » [traduction][41].

Il est implicite dans l’arrêt du juge Rowe que, lorsqu’il existe un droit de recours devant une juridiction contre une décision administrative, le champ d’application de cette disposition de recours inclut les contestations de l’iniquité procédurale, au moins lorsqu’elle est ouverte (et vraisemblablement aussi lorsqu’elle est limitée aux questions de droit et de juridiction, bien qu’il puisse y avoir une question sur les déterminations procédurales basées sur les faits). Cependant, la raison pour laquelle la majorité a estimé que l’arrêt Vavilov était « catégorique » quant à l’applicabilité des normes d’appel n’est pas du tout claire. Qu’est-ce qui rend la situation en matière de normes de contrôle « catégorique » dans le cas des recours statutaires fondés sur l’iniquité procédurale, mais apparemment incertaine dans le cas de l’application des normes de contrôle de l’arrêt Vavilov dans le cadre du contrôle juridictionnel pour des motifs procéduraux. Plus généralement, comment peut-on dire que la majorité de l’arrêt Vavilov était catégorique quant à l’application des normes de contrôle à l’iniquité procédurale dans un contexte d’appel, alors que la majorité a déclaré spécifiquement que son réalignement des principes des normes de contrôle concernait le contrôle de fond et n’incluait pas les contestations de l’iniquité procédurale? En bref, il semblerait plus exact de qualifier l’application des normes d’appel statutaires aux contestations d’iniquité procédurale d’ajout ou d’extension, et non d’application, de l’arrêt Vavilov. Elle répond partiellement à une question laissée ouverte par l’arrêt Vavilov[42].

L’avertissement selon lequel la Cour n’a pas « dérogé » des arrêts Khosa[43] et Khela[44] parce qu’il s’agissait de cas de contrôle judiciaire sur le plan de la procédure et qu’il ne s’agissait pas d’un appel prévu par la loi n’est pas utile, surtout compte tenu du niveau de controverse entourant la norme de contrôle pour les contestations relatives à l’iniquité procédurale introduites au moyen de demandes de contrôle judiciaire et du sens même de l’arrêt Khela[45]. Compte tenu de cette situation, il n’était pas approprié que la Cour suprême limite ainsi son jugement sur la question de la norme de contrôle judiciaire. Une justification fondée sur le principe selon lequel les cours d’appel ne devraient pas élargir indûment la portée de leurs décisions lorsqu’elles ne sont pas nécessaires pour régler le différend aurait semblé quelque peu vide de sens ici.

Il est encore plus surprenant que la majorité ait choisi de ne pas répondre explicitement au défi détaillé lancé par la juge Côté dans son arrêt dissident[46]. Elle n’a pas accepté comme « catégorique » l’application des normes de Vavilov aux questions d’équité procédurale dans quelque contexte que ce soit, qu’il s’agisse d’un appel prévu par la loi ou d’une demande de contrôle judiciaire. Elle a également remis en question l’affirmation quelque peu désinvolte du juge Rowe selon laquelle la majorité ne remettait pas en question les arrêts Khela[47] et Khosa[48]. En ce qui concerne l’application des normes de Vavilov, il y a également un décalage qui découle de la déclaration suivante de la majorité :

30. La question de savoir s’il y a eu abus de procédure est une question de droit. C’est donc la norme de contrôle de la décision correcte qui s’applique[49].

Cependant, lorsque l’arrêt majoritaire aborde la question du mérite de la contestation d’abus de procédure, l’accent n’est pas tant mis sur les principes juridiques directeurs relatifs à l’abus de procédure que, dans un contexte marqué par les faits, sur l’évaluation des faits pertinents et l’application de la loi à ces faits. C’est le domaine de l’« erreur manifeste et dominante », et non de la décision correcte, comme le reconnaît le juge Rowe[50].

Contrairement à la majorité qui intègre les questions d’équité procédurale dans la formule de l’arrêt Vavilov généralement applicable à l’examen en appel de l’action administrative, la juge Côté a estimé que le droit régissant l’équité procédurale était en grande partie une construction de la common law qui existait indépendamment du mérite de la prise de décision administrative et du contrôle de fond de cette prise de décision selon la norme désormais courante du caractère raisonnable, mais qui était fondamentale à ces deux éléments. En outre, elle a affirmé que

… l’application des principes de common law relève clairement de l’expertise des tribunaux judiciaires[51].

À ce titre, elle a jugé que l’arrêt Vavilov ne s’appliquait pas directement aux questions d’équité procédurale et qu’il n’était pas approprié d’intégrer à un régime d’appel statutaire les normes de contrôle Housen pour les contestations alléguant l’iniquité procédurale. Dans tout l’éventail des décisions statutaires, la norme de contrôle (à moins qu’elle ne soit modifiée par la loi et en conformité avec les normes constitutionnelles[52]) pour le contrôle de l’iniquité procédurale était celle de la décision correcte. Il n’y a pas de différence de principe entre le contrôle d’une décision pour des raisons de procédure dans le cadre d’un régime de recours statutaire et/ou par le biais d’une demande de contrôle judiciaire. Les arrêts Khosa[53] et Khela[54] régnaient toujours. L’équité procédurale était une norme juridique pour laquelle la norme générale de contrôle était celle de la décision correcte[55].

Cependant, la juge Côté n’en reste pas là. Dans son analyse introductive, elle affirme :

Certes, la méthode qu’appliquent les juges majoritaires mène habituellement au même résultat lorsque la loi habilitante établit un mécanisme d’appel[56].

La raison pour laquelle elle pensait qu’il en était ainsi est développée dans les deux sections suivantes de son jugement dissident et se manifeste le plus directement dans sa tentative de réconcilier les déclarations apparemment incohérentes du juge LeBel dans l’arrêt Khela[57]. Au fur et à mesure que la dissidence progressait, elle nuançait son adoption d’une norme globale de bien-fondé en établissant une distinction entre la détermination et l’application des principes juridiques pertinents, d’une part, et les « conclusions de fait sous-jacentes »[58] du décideur, d’autre part. Sur ce dernier point, comme dans l’arrêt Khela[59] et son aspect relatif à l’évaluation du risque, le décideur a droit à la déférence[60]. Elle a également cité des décisions procédurales dans des situations où le décideur disposait d’une marge de manœuvre. Pour autant que la procédure adoptée respecte les « limites de l’équité », le décideur peut faire preuve d’une « grande déférence » dans son choix entre les procédures[61].

En ce qui concerne les objectifs de la juge Côté, cette partie de son jugement fournit une base crédible, voire convaincante, pour réconcilier les déclarations apparemment incohérentes du juge LeBel dans l’arrêt Khela[62]. À ce titre, elle reconnaît à juste titre qu’il existe des éléments de contrôle de l’équité procédurale où, bien que le bien-fondé soit la norme de contrôle primordiale, il sera possible de faire preuve de déférence à l’égard des aspects du processus décisionnel qui font l’objet d’une contestation pour cause d’iniquité procédurale. Bien que la juge Côté ne qualifie pas cette retenue d’équivalent formel du contrôle par l’arrêt Vavilov du caractère raisonnable des éléments d’un processus décisionnel, cela n’a guère d’importance. Ce qui compte vraiment, c’est qu’elle accepte qu’il n’y ait pas d’objection de principe à l’application de normes différentes à différentes parties du processus décisionnel qui fait l’objet d’un contrôle pour des motifs procéduraux. En dehors des zones de contrôle du bien-fondé de la décision, la question de savoir si le processus est décrit en termes de « caractère raisonnable », de « déférence » ou d’« erreur manifeste et dominante » n’a pas vraiment d’importance. En fait, la juge Côté affirme elle-même que, sur le plan pratique, il n’y a peut-être pas beaucoup de différence entre les résultats en fonction du critère fondé sur l’appel prévu par la loi des juges majoritaires et son mélange minoritaire de bien-fondé et de déférence[63].

Cependant, il y a un aspect de l’approche de la juge Côté qui aurait pu conduire à un contrôle plus intrusif pour cause d’iniquité procédurale que celui qui résulterait de l’application par la majorité de la formule Housen[64] telle qu’elle a été adoptée dans l’arrêt Vavilov. Selon la formule Housen, les questions mixtes de fait et de droit font l’objet d’un contrôle selon le critère de l’erreur manifeste et dominante. En revanche, la juge Côté semble ne pas voir de place pour la déférence au-delà du contrôle des « conclusions de fait sous-jacentes ». Cela semble être confirmé par sa déclaration :

Je le répète, l’application aux faits d’une norme juridique est une question de droit assujettie au contrôle selon la norme de la décision correcte[65].

À moins qu’il n’y ait une différence (et je n’en vois pas) entre le processus d’application du droit aux faits constatés et la détermination de questions mixtes de droit et de fait, sur ce point, il existe des différences significatives entre les deux arrêts et leur perception de la place qu’occupe la décision correcte ou le bien-fondé par rapport à l’« erreur manifeste et dominante » ou, son équivalent apparent, la déférence.

La juge Côté accorde également de l’importance à la notion selon laquelle, dans le cadre du contrôle de l’équité procédurale, le rôle de la Cour n’est pas de rechercher une procédure optimale. Une juridiction de contrôle se préoccupe en effet de savoir si la norme minimale permettant de satisfaire à l’obligation générale d’équité procédurale a été respectée[66]. Cependant, je ne trouve rien dans l’arrêt de la majorité qui puisse suggérer que l’application du critère du recours statutaire à l’arrêt Vavilov pour un contrôle sur la base de l’équité procédurale conduirait à quelque chose de plus que le minimum requis par l’obligation d’équité procédurale. Une fois le minimum atteint, l’affaire est terminée. Il n’y a pas de précédent pour « Bien que je reconnaisse que vous avez respecté les normes minimales, vous auriez certainement pu faire mieux que cela » [traduction].

Où en est l’état du droit en ce qui concerne la norme de contrôle applicable aux plaintes pour iniquité procédurale?

  1. Lorsqu’il s’agit d’un recours statutaire, à moins qu’il ne soit modifié par la loi, le critère de contrôle de l’équité procédurale est désormais étendu à celui établi dans l’arrêt Vavilov pour le contrôle des motifs de fond dans le cadre d’un appel — la décision correcte pour les questions de droit, et l’erreur manifeste et dominante pour les questions de fait et les questions mixtes de droit et de fait[67].
  2. Lorsqu’il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire et éventuellement d’un recours accessoire, y compris une action en dommages-intérêts, les arrêts Khosa et Khela restent valables, la décision correcte étant le critère primordial de contrôle de l’équité procédurale.
  3. Cependant, les arrêt Khela et Abrametz, tant majoritaire que minoritaire, admettent qu’il est possible de faire preuve d’une certaine forme de déférence à l’égard des décisions factuelles prises par les décideurs dans le cadre d’une allégation d’iniquité procédurale.
  4. Dans le contexte précédent, il est probablement vrai qu’il n’y a pas de différence significative entre la « déférence » telle qu’elle est formulée à la fois dans l’arrêt Khela et dans l’arrêt minoritaire Abrametz, et le respect qui est implicite dans l’application par la majorité Abrametz du critère de l’erreur « manifeste et dominante » pour de telles déterminations basées sur les faits.
  5. Au moins dans le contexte des appels statutaires, le jugement majoritaire Abrametz (par opposition à celui de la minorité) étend cette position de déférence nécessairement implicite dans la norme de l’« erreur manifeste et dominante » aux questions mixtes de droit et de fait.
  6. Il est peu probable que, dans le contexte des demandes de contrôle judiciaire ou des contestations accessoires, la norme de contrôle de l’application du droit aux faits par un décideur et, de façon équivalente, la détermination d’une question mixte de droit et de fait, soit la norme du bien-fondé de la décision.
  7. Étant donné que la majorité ne s’est pas clairement engagée dans les arrêts antérieurs de la Cour suprême dans les arrêts Khosa et Khela, il peut néanmoins subsister des doutes quant au bien-fondé en tant que norme générale ou point de départ pour la conduite du contrôle judiciaire d’iniquité procédurale dans le contexte des demandes de contrôle judiciaire et des attaques accessoires.

Il est également important de reconnaître, dans toute analyse de la norme de contrôle de l’iniquité procédurale, que, que ce soit par le biais d’un appel, d’une demande de contrôle judiciaire ou d’une attaque accessoire, il existe différents contextes dans lesquels de telles questions seront soulevées.

Bien que cela ne soit pas fréquent de nos jours, il peut arriver que l’on se demande si le seuil du droit à l’équité procédurale a même été franchi[68]. Par la suite, l’un des scénarios les plus courants pour une allégation d’iniquité procédurale sera, comme dans les arrêts Khosa, Khela, Blencoe et Abrametz, l’éventail des diverses composantes historiques de la common law du contenu de l’équité procédurale, telles que l’absence de partialité, l’accès aux documents pertinents, la représentation par un avocat et, bien sûr, même si c’est inhabituel, le retard excessif et l’abus de procédure. En règle générale, tant pour le seuil que pour le contenu, il existe des critères établis qui ont évolué au fil du temps. Déterminer avec succès les critères pertinents est à juste titre considéré comme une question de droit, mais la question de savoir s’il s’agit toujours d’une question de droit sur laquelle les tribunaux ont le dessus est une question tout à fait différente.

Le droit actuel, y compris l’arrêt majoritaire dans Abrametz, favorise dans l’ensemble la position selon laquelle de tels exercices de détermination devraient faire l’objet d’un contrôle judiciaire, indépendamment du contexte, sur la base du bien-fondé. Cependant, dès que l’on s’éloigne des normes établies par la common law pour s’attaquer à la mise en œuvre de politiques statutaires ou même de politiques procédurales internes, la situation peut changer.

Exprimons le problème sous sa forme peut-être la plus directe : supposons un ensemble de procédures réglementaires autorisées par la loi qui ont été forgées dans le chaudron de consultations internes et avec les parties prenantes et qui trouvent leur justification dans des documents de politique et de position. Est-il approprié qu’une cour de révision examine sur la base d’une norme axée sur le bien-fondé les détails de ces procédures (que ce soit dans le contexte d’une contestation directe ou de leur application à une procédure particulière) en termes de conformité avec les normes procédurales de la common law et en faisant appel à la prééminence des tribunaux en matière de procédure? Est-il justifié de refuser au tribunal ou à l’agence le respect auquel ils ont généralement droit dans le cadre de l’exercice de leurs pouvoirs discrétionnaires substantiels? Qu’est-ce qui rend leur jugement sur des questions de procédure souvent spécifiques au contexte plus suspect que l’exercice de leurs pouvoirs discrétionnaires substantiels conférés par la loi?

Pour autant que le tribunal détermine correctement les tests ou critères de common law applicables à ces demandes (comme dans le cas d’une demande de représentation par un avocat), il existe un argument solide, qu’il s’agisse d’un recours statutaire ou d’une demande de contrôle judiciaire, selon lequel le respect doit être accordé à l’application raisonnée par un tribunal du critère correctement apparié aux faits pertinents d’une demande procédurale contestée.

En conclusion, je voudrais simplement suggérer qu’il y a des questions plus nuancées à traiter par les tribunaux dans ce domaine et qui impliquent un argument en faveur d’un contrôle déférent des règles et décisions procédurales au-delà des catégories limitées décrites dans les arrêts Khela et Abrametz. Il est également important de garder à l’esprit que, que ce soit par le biais de lois de base ou de législation subordonnée ou d’une loi non contraignante, les obligations procédurales sont de loin le produit d’exercices « législatifs », dont le résultat a souvent impliqué une évaluation intégrée des besoins procéduraux à la lumière d’une compréhension complète des détails et des complexités des objectifs substantiels du régime réglementaire concerné.

iii. Contrôle judiciaire de la législation subordonnée – et duels de cours d’appel – l’arrêt Katz

Dans plusieurs arrêts rendus au cours de l’année 2022, les cours d’appel ont adopté des positions divergentes sur la pertinence de l’arrêt Vavilov et de sa méthodologie en matière de norme de contrôle judiciaire de lois subordonnées engageantes dans toutes leurs diverses manifestations. Ce désaccord s’est reflété dans les commentaires théoriques et professionnels sur la jurisprudence et la position judiciaire appropriée pour la conduite de ces exercices de contrôle judiciaire[69].

Au centre de la controverse (judiciaire, professionnelle et théorique) se trouve la question de savoir si, dans le sillage de l’arrêt Vavilov, le contrôle judiciaire de la législation subordonnée défini au sens large s’inscrit dans le cadre du contrôle de la présomption de raisonnabilité approuvé par la majorité. Ou bien, les précédents à l’arrêt Vavilov qui assuraient le contrôle par référence au concept ultra vires prévalent-ils encore ou, à tout le moins, ont-ils une prétention à la légitimité?

Pour le juge Stratas de la Cour d’appel fédérale, dans deux arrêts en particulier[70], la réponse à cette question était apparemment simple. L’objectif de l’arrêt Vavilov était d’établir un modèle permettant de discerner la norme de contrôle appropriée pour les contestations de fond (mais non de procédure) dans l’ensemble du processus décisionnel administratif. Contrairement à ce qui s’est passé pour les contestations d’iniquité procédurale, il n’y a pas eu d’exclusions expresses du contrôle au fond dans la portée de l’arrêt Vavilov rendu par la majorité. Bien que la majorité n’ait pas traité explicitement de cette question, comme l’a souligné le juge d’appel Stratas[71], dans l’arrêt Vavilov[72], la majorité, dans le contexte du rejet de l’existence continue de véritables questions de compétence[73], a incorporé des références aux précédents de la Cour suprême sur la conduite de contrôles judiciaires de lois subordonnées[74].

Dans chacun de ces deux précédents, Green v Law Society of Alberta[75] et West Fraser Mills Ltd. v British Columbia (Workers’ Compensation Appeal Tribunal)[76], la Cour s’est livrée, du moins en partie, à un contrôle par référence à des normes de raisonnabilité. De plus, cette partie de l’analyse de l’arrêt Vavilov ne laisse nullement entendre que le contrôle de la législation subordonnée se situe au-delà de la portée et des ambitions de l’arrêt et de l’universalité du modèle recalibré. Pour le juge Stratas, il faut plutôt en déduire qu’elle relève également du modèle et que la modalité traditionnelle de contrôle sous la rubrique de l’ultra vires et impliquant en fait un contrôle du bien-fondé n’a pas survécu à l’arrêt Vavilov. Plus précisément, l’arrêt Vavilov représentait une annulation implicite de l’arrêt Katz Group Canada Inc. c Ontario (Santé et Soins de longue durée)[77], un arrêt antérieur de 2013 de la Cour, dans lequel la juge Abella a procédé à un contrôle de la législation subordonnée en se référant au principe ultra vires et, en fait, a effectué un contrôle du bien-fondé, une forme d’analyse maintenant apparemment rejetée par l’arrêt Vavilov. En d’autres termes, pour le juge Stratas, l’arrêt Katz n’était plus une bonne loi et les principes du précédent lui dictaient d’appliquer l’arrêt Vavilov[78] et de soumettre la législation subordonnée dans chacune des deux affaires à un contrôle du caractère raisonnable.

Il y a toutefois des complications. Dans Médicaments novateurs, le 5 décembre 2022, le juge Stratas a rendu l’arrêt d’une formation de la Cour d’appel fédérale composée par ailleurs des juges d’appel Locke et Woods. Bien que la juge d’appel Woods ait souscrit à la décision selon laquelle le règlement contesté a survécu à la contestation, elle s’est dissociée[79] des parties[80] de l’arrêt du juge Stratas dans lesquelles il a justifié son application de l’arrêt Vavilov sur le fond ainsi que sur la base de précédents contraignants.

Les eaux se sont encore embrouillées lorsque, le lendemain même, le juge d’appel de Montigny a rendu l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Association du transport aérien international c Office des transports du Canada[81]. Dans cet arrêt, auquel les juges d’appel Pelletier et Locke ont souscrit, le juge de Montigny s’est inquiété de l’affirmation selon laquelle l’arrêt Katz n’était plus une bonne loi[82]. Il a notamment fait référence[83] à l’arrêt de la Cour suprême du Canada sur la réglementation de l’énergie de 2021 dans les Renvois relatifs à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre[84]. Dans cette affaire, la majorité a examiné si les pouvoirs discrétionnaires étendus conférés au gouverneur en conseil pour, entre autres, prendre des règlements, permettaient en fait d’empiéter de manière inconstitutionnelle sur la juridiction des provinces. En rejetant cet argument, la majorité de la Cour s’est appuyée sur l’arrêt Katz (et sur l’arrêt Vavilov) pour conclure que tout exercice de ce type de pouvoir exécutif devait être compatible avec les objectifs par ailleurs constitutionnels de la loi et avec d’autres dispositions spécifiques de celle-ci. Tout manquement à cet égard exposerait l’exercice de l’autorité à un contrôle judiciaire. Il n’a pas été fait mention du caractère raisonnable ou de la déférence. Au moins dans ce contexte et à ces fins, l’arrêt Katz a survécu[85].

Le juge d’appel de Montigny a également affirmé que le contrôle du caractère déraisonnable selon le modèle de l’arrêt Vavilov s’adaptait difficilement au contrôle de la législation subordonnée[86]. Dans ce contexte, il s’est référé favorablement[87] à la position extrajudiciaire adoptée par son ancien collègue, le juge d’appel Evans. Evans est d’avis que, puisque les promulgateurs des lois subordonnées ne sont pas explicitement ou même implicitement dotés de la capacité de décider des questions de droit, le modèle de l’arrêt Vavilov pour le contrôle judiciaire ne devrait pas s’appliquer. Le contrôle ultra vires devrait persister dans le domaine des attaques contre les lois subordonnées; il n’est pas identique au contrôle pour erreur juridictionnelle, désormais répudié, applicable à d’autres formes de prise de décision administrative[88].

C’est également dans un autre contexte de réglementation de l’énergie que la Cour d’appel de l’Alberta, dans l’arrêt TransAlta Generation Partnership v Alberta (Minister of Municipal Affairs)[89], a appliqué les normes Katz ultra vires au contrôle d’une directive ministérielle fondée sur la loi, en se fondant sur le fait que Katz n’avait pas été annulé ou modifié. Ce faisant[90], la Cour s’est appuyée à la fois sur l’arrêt Vavilov et sur les Renvois relatifs à la loi sur la tarification de la pollution par les gaz à effet de serre pour soutenir que l’arrêt Katz n’avait pas été annulé et que les modalités traditionnelles du contrôle ultra vires avaient survécu à l’arrêt Vavilov.

En ce qui concerne le maintien de l’autorité de Katz, la Cour d’appel[91] s’est référée à deux paragraphes de l’arrêt majoritaire dans la Tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre[92]. Dans les deux cas, la majorité a cité l’arrêt Katz en l’approuvant et en se référant en particulier au paragraphe de l’arrêt Katz contenant la déclaration suivante :

Pour contester la validité d’un règlement, il faut démontrer qu’il est incompatible avec l’objectif de sa loi habilitante ou avec le cadre du mandat prévu par la Loi[93].

Ce qui est cependant déroutant, c’est que la majorité dans la Tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre cite l’arrêt Vavilov ainsi que l’arrêt Katz pour affirmer que :

… le pouvoir discrétionnaire du gouverneur en conseil est limité à la fois par l’objet de la [Loi] et par les indications précises énoncées dans la loi à cet égard relativement aux décisions d’assujettissement[94].

Bien qu’à première vue, cela puisse être interprété comme un contrôle ultra vires, le paragraphe cité[95] de Vavilov apparaît dans la partie de l’arrêt rendu majoritairement qui décrit les considérations contextuelles qui forment les critères de raisonnabilité de l’arrêt Vavilov. Cela soulève également la question de savoir si la Cour suprême a intégré une version du contrôle traditionnel de l’excès de pouvoir dans le modèle Vavilov pour évaluer le caractère raisonnable des décisions (y compris la promulgation de lois subordonnées). Si c’est le cas, la réalité est peut-être que toute cette controverse n’est que du bruit pour rien. C’est peut-être trop cynique. Cependant, si cette analyse est juste, dans les domaines où la portée du régime législatif applicable est en cause, pour ce qui est de « la raison d’être et la portée du régime législatif en vertu desquelles il est adopté »[96], il pourrait y avoir peu de différence, voire aucune, entre le contrôle du bien-fondé au nom de Katz et le contrôle du caractère raisonnable de la législation subordonnée au nom de Vavilov. Néanmoins, le temps de mettre fin à ce type de spéculation est certainement arrivé. Il faut donc espérer que, dans un avenir proche, la Cour suprême aura l’occasion de mettre un terme à tout cela.

iv. Qu’en est-il de l’absence d’une norme de contrôle judiciaire pour les appropriations réglementaires?

Dans l’affaire Annapolis Group Inc. c Municipalité régionale d’Halifax[97], la Cour suprême du Canada a élargi[98], par une majorité de cinq contre quatre, le champ d’application des principes régissant le droit à indemnisation en cas d’appropriation par interprétation d’une propriété privée, une question d’intérêt dans le domaine de la réglementation de l’énergie. L’allégation d’appropriation par interprétation découle du fait que la Municipalité régionale d’Halifax (MRH) a rezoné la propriété en question et, par la suite, a refusé les demandes du propriétaire pour diverses formes de développement, actions pour lesquelles la MRH a refusé d’indemniser le Annapolis Group En fin de compte, Annapolis Group a intenté une action contre la MRH en invoquant l’enrichissement sans cause, l’abus de pouvoir dans l’exercice d’une fonction publique et l’utilisation inappropriée des pouvoirs de réglementation dans le but de saisir en vertu d’une interprétation de la loi le terrain du Annapolis Group pour l’utiliser comme parc public sans compensation. L’affaire a été portée devant la Cour suprême du Canada dans le cadre d’une requête de la MRH visant à faire annuler le troisième de ces motifs, à savoir l’utilisation inappropriée des pouvoirs réglementaires, et la décision finale a été que, compte tenu de l’élargissement par la majorité de la portée de ce qui constituait une appropriation par interprétation, l’affaire devait être jugée sur ce point ainsi que sur les deux autres motifs sur lesquels la MRH avait concédé.

D’un certain point de vue, il s’agissait du territoire de Roncarelli c Duplessis[99] et de Canada (Procureur général) c TeleZone Inc.[100] — des demandes civiles d’indemnisation pour l’utilisation alléguée de pouvoirs statutaires à des fins inappropriées — mais elles n’ont été citées ni par la majorité ni par la minorité. De même, dans aucun des deux arrêts il n’a été tenu compte du fait qu’il s’agissait en l’espèce du contrôle judiciaire, bien que dans un contexte de responsabilité civile, d’une série de décisions prises en vertu de pouvoirs statutaires. L’accès à la révision judiciaire n’est pas mentionné comme une possibilité ou une obligation[101] avant le jugement d’une action civile pour usage abusif d’un pouvoir statutaire. L’affaire s’est plutôt déroulée à la manière d’une action civile ordinaire dans laquelle une question de droit était cruciale pour les chances de succès du Annapolis Group sur les faits. En bref, quels étaient le droit et les critères pertinents concernant les appropriations par interprétation ou réglementaires et, compte tenu de ce droit, Annapolis Group avait-elle des chances raisonnables de réussir dans sa demande d’indemnisation ou de dommages-intérêts?

Ici aussi, des questions se posent quant à l’universalité des principes de contrôle de fond énoncés dans l’arrêt Vavilov. De plus, en l’espèce, il semble que l’on ne reconnaisse pas que l’arrêt Vavilov pourrait être pertinent et que la MRH, dans son évaluation de la portée et de l’application des règles régissant les appropriations par interprétation ou réglementaires, pourrait avoir droit à un certain degré de déférence ou de contrôle du caractère raisonnable.

La raison pour laquelle il en est ainsi doit nécessairement être une question de conjecture. Une possibilité est que le droit relatif à l’expropriation est sui generis et, en particulier dans le contexte des appropriations par interprétation ou réglementaires, le produit d’un ensemble historiquement distinctif de principes de common law qui sont greffés sur les exercices pertinents du pouvoir statutaire. À cet égard, il peut y avoir un lien implicite avec l’arrêt Vavilov, surtout dans la mesure où la majorité dans cet arrêt[102] inclut dans les catégories de décisions sujettes à un contrôle du caractère déraisonnable les interprétations du pouvoir législatif qui sont « incompatibles avec les principes applicables de la common law ».

III. DIVERS

i. Équité procédurale, attentes légitimes et directives ministérielles

Dans l’affaire TransAlta General Partnership[103], la Cour d’appel de l’Alberta a examiné une contestation de la validité de lois subordonnées (sous la forme de directives ministérielles autorisées par la loi) et une allégation d’iniquité procédurale découlant de la publication de ces directives. Les directives fixent des normes pour l’imputation de l’amortissement lors de l’établissement de la valeur des propriétés industrielles réglementées à des fins fiscales municipales. Les quatre requérants exploitaient des centrales électriques alimentées au charbon. Bien que les preuves présentées à la Cour ne soient pas définitives, il y avait probablement au moins deux autres exploitations de ce type dans la province. Les quatre requérants avaient conclu des accords « sans charbon » avec le gouvernement provincial, en vertu desquels ils recevaient des sommes annuelles substantielles. Les directives ministérielles prévoyaient qu’il n’y aurait pas d’ajustements de la dépréciation découlant de la cessation ou de la réduction des émissions des centrales au charbon dans le cadre d’un accord « sans charbon» ou de la législation provinciale ou fédérale.

Les quatre entreprises ont contesté cet aspect des directives pour divers motifs de fond, mais aussi parce qu’elles avaient été privées de l’équité procédurale avant la publication des directives. Elles ont également allégué qu’elles avaient une attente légitime en matière de consultation et que cette attente n’avait pas été satisfaite. Tant en première instance[104] que devant la Cour d’appel de l’Alberta, il a été admis que la norme de contrôle pour la détermination des questions procédurales était celle du bien-fondé[105].

L’allégation d’iniquité procédurale a soulevé la question fondamentale de savoir si les quatre requérants avaient droit à un certain niveau d’équité procédurale ou à des droits de participation avant la promulgation de la directive contestée. S’agissait-il d’une fonction « législative » exclue selon la jurisprudence pertinente?[106] Ou bien s’agissait-il d’une fonction « administrative » par nature, déclenchant ainsi un droit à au moins un certain niveau d’équité procédurale?

En outre, la Cour a cité Brown et Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada[107]. Les caractéristiques pertinentes d’une fonction « législative » sont qu’elle doit être

… d’application générale et, lorsqu’elle est exercée, elle ne vise pas une personne en particulier [et] que son exercice repose essentiellement sur des considérations générales d’ordre public, plutôt que sur des faits relatifs à des individus ou à leur conduite [traduction][108].

Dans le contexte actuel, la Cour d’appel n’a apparemment pas été impressionnée par l’argument selon lequel les requérants n’étaient que quatre et que l’ensemble du groupe spécifique à l’heure actuelle n’en comptait pas plus de deux de plus. Les directives s’appliqueraient à tous les autres propriétaires soumis à un accord « sans charbon ». Cela signifie que les directives sont des « règles d’application générale et ne visent pas une entité individuelle » [traduction][109]. Le fait que les directives puissent les affecter différemment des autres propriétaires n’a pas d’importance[110].

À ces fins, la Cour d’appel a avancé comme contrepoint l’affaire Tesla Motors Canada ULC c Ontario (Ministry of Transportation)[111]. Le gouvernement de l’Ontario y avait annulé un programme de subvention pour l’achat de voitures électriques, mais avait instauré une période de transition de deux mois. Cependant, sans tenir la moindre audience, le ministre a envoyé une lettre à Tesla selon laquelle ses clients ne pouvaient pas profiter de la période de grâce. Dans ce cas, l’effet sur Tesla était « distinct et unique »[112] et découlait du « ciblage intentionnel… à des fins non pertinentes » [traduction][113]. En revanche, TransAlta n’avait aucun argument de ce genre pour transformer la mesure législative du ministre en une « décision administrative » assujettie aux principes d’équité procédurale.

En ce qui concerne l’argument fondé sur l’attente légitime, la Cour d’appel a noté l’incertitude quant à la question de savoir si la doctrine de l’attente légitime pouvait générer un droit à une audition dans le cas de fonctions législatives auxquelles aucune obligation de ce type ne s’attacherait autrement[114]. Toutefois, étant donné que, de toute façon, la preuve présentée à la Cour n’a pas « établi une représentation claire, sans ambiguïté et sans réserve [traduction][115] », la demande était vouée à l’échec. Bien que la Cour ne s’attarde pas sur les éléments de preuve sur lesquels les requérants se sont appuyés, comme indiqué dans les allégations, le mieux que l’on puisse dire est qu’il y a eu des discussions de diverses natures avec une série de représentants du gouvernement de la part de certains des quatre requérants, mais rien qui puisse être qualifié de représentation suffisamment explicite pour justifier un engagement continu[116].

Bien que cette affaire représente une analyse et une application conventionnelles du critère du seuil d’équité procédurale et des principes de l’attente légitime, elle est néanmoins, compte tenu des précédents contraignants, limitée dans sa réponse aux arguments des requérants et à toute conception plus large du droit concernant le déclenchement à la fois de l’équité procédurale et de l’attente légitime.

La démarcation entre le général et le spécifique aux fins du déclenchement d’une obligation d’équité procédurale aurait pu être précisée de manière plus complète. De plus, le déploiement de Tesla est problématique. Le fait que Tesla ait été « intentionnellement ciblé par un ministre à des fins non pertinentes »[117] peut certainement renforcer le dossier du requérant, mais davantage dans le sens d’un motif de contrôle autonome. Le fait que la prise de décision fasse appel à l’équité procédurale n’est pas nécessairement lié, ni même de manière pertinente, à des considérations de mauvaise conduite de la part d’un fonctionnaire du gouvernement. Plus important encore, l’arrêt illustre le fait que, sans approbation législative ou acceptation volontaire, les procédures de notification et de commentaire n’ont que peu ou pas de rôle à jouer pour franchir le seuil des droits à l’équité procédurale. La common law continue de ne pas répondre à ce défi.

En se concentrant sur la question de savoir s’il y avait eu « une déclaration claire, non ambiguë et sans réserve » [traduction][118] selon laquelle il y aurait une consultation, la Cour d’appel (et c’est peut-être la faute de l’avocat) n’examine jamais explicitement s’il s’agit d’une situation où le comportement (par opposition aux paroles) des représentants du gouvernement aurait pu donner lieu à une demande d’attente légitime. Ici aussi, bien sûr, les faits sont cruciaux, et il se peut qu’ils n’aient pas fourni de bases réalistes pour un tel argument. Plus généralement, cette affaire perpétue la position conservatrice adoptée par les tribunaux canadiens en ce qui concerne la portée des principes de l’attente légitime. Elle montre aussi clairement que le droit canadien est encore loin de reconnaître l’attente légitime comme fondement d’une action de fond, au moins dans des cas exceptionnels[119].

ii. L’obligation de franchise

Dans l’examen de de l’an dernier[120], j’ai évoqué la demande du personnel de l’Alberta Utilities Commission (AUC) chargé de l’application de l’Alberta Utilities Commission Act[121] à la Commission elle-même, en vertu des articles 8 et 63 de l’Alberta Utilities Commission Act (AUC), d’engager une procédure d’application de la réglementation contre ATCO, sous diverses personnes morales, et en particulier ATCO Electric Ltd. pour violation de l’Electric Utilities Act[122] de l’Alberta dans le cadre d’une demande de report de taux qu’elle avait déposée auprès de la Commission[123]. Parmi les allégations formulées par le personnel de la Commission chargé de l’application de la loi dans sa demande d’autorisation d’entamer une procédure d’application de la loi, figure le fait qu’ATCO a agi de manière à dissimuler des informations pertinentes afin de minimiser la possibilité d’un refus réglementaire. À l’appui de ses allégations, le personnel chargé de l’application de la loi de l’AUC, outre des allégations spécifiques, a affirmé qu’ATCO avait, de manière plus générale, manqué à son « devoir fondamental d’honnêteté et de franchise envers son organisme de réglementation » [traduction][124], obligation qui exigeait que les informations qu’elle fournissait à la Commission soient « complètes, justes et exactes »[traduction][125].

Le point culminant de cette affaire en 2022 a été l’approbation par la Commission d’un accord de règlement conclu entre le personnel de l’AUC chargé de l’application de la loi et ATCO Electric[126]. Cet accord exigeait d’ATCO, entre autres sanctions, le paiement d’une pénalité administrative de 31 millions de dollars. Le vice-président Doug Larder, dans les motifs qu’il a invoqués pour approuver l’accord de règlement, a approuvé l’acceptation et la description par le personnel chargé de l’application de la loi de l’obligation d’honnêteté et de franchise qui incombe à ceux qui participent aux procédures réglementaires menées par la Commission[127]. Il a également constaté l’existence d’une telle obligation dans les règles de l’ISO, le code de conduite inter-affiliés et l’Electric Utilities Act, dont ATCO a admis avoir tous enfreint[128].

Le vice-président Larder explique également avec force dans quelle mesure ce manque de franchise et de transparence a engendré, outre des coûts financiers, une forme distincte de préjudice pour les contribuables :

Le deuxième aspect du préjudice causé aux contribuables est difficile à quantifier, mais très grave. Les actions d’ATCO Electric causent un préjudice plus vaste aux contribuables et à tous les autres participants au système de réglementation. Pour prendre ses décisions, la Commission doit pouvoir tenir pour acquis que l’information présentée par le service public est complète, juste et exacte. Il s’agit d’une prémisse fondamentale de l’Electric Utilities Act et de notre système de réglementation en général, comme il est indiqué ci-dessus. Les contraventions d’ATCO Electric représentent un abus de confiance flagrant, qui a miné la confiance du public dans le processus de réglementation de la Commission et la confiance de la Commission envers ATCO Electric. Quel que soit le préjudice financier subi, ce préjudice est en soi important [traduction][129].

La déclaration du vice-président Larder parle d’elle-même et représente un ajout important et une justification des obligations sous-jacentes de bonne foi des entités réglementées dans le contexte des auditions réglementaires, et peut-être, plus généralement, dans le cadre du processus réglementaire[130].

L’obligation de franchise peut également s’appliquer dans les deux sens, comme le souligne Paul Daly dans un récent blogue[131] décrivant la mesure dans laquelle, dans les territoires de compétence autres que le Canada, les répondants gouvernementaux (au sens large) ont une obligation de franchise au sens d’une « divulgation complète et équitable » dans l’intérêt du tribunal de contrôle judiciaire et des demandeurs de contrôle judiciaire[132]. Il s’agit, bien entendu, d’une obligation dont les avocats sont déjà redevables dans le cadre de procédures civiles, pénales et administratives. Cependant, il est également utile de la situer en tant qu’obligation de l’entité défenderesse elle-même dans le contexte de toutes les formes de procédures de contrôle judiciaire et pas seulement dans le cadre de poursuites pénales. Daly espère évidemment que les précédents canadiens viendront s’ajouter à la liste des tribunaux anglais, irlandais, nord-irlandais et australiens qui ont reconnu et développé cette obligation. Il sera donc intéressant de voir si cela a une quelconque résonance dans la conduite du contrôle judiciaire au Canada.

iii. Recours en cas de retard dans l’exercice des fonctions et pouvoirs administratifs

Dans chacun des deux arrêts de principe, Blencoe[133] et Abrametz[134], sur les retards dans l’exercice des pouvoirs administratifs, le contexte factuel était celui d’un requérant ou d’un appelant faisant l’objet d’allégations de mauvaise conduite. L’arrêt Blencoe découlait d’une plainte pour violation d’un code des droits de la personne et l’arrêt Abrametz d’un manquement aux normes de conduite professionnelle. L’exposition à de telles procédures qui, dans l’arrêt Abrametz, ont été décrites par la majorité comme sui generis au moins dans le cas de procédures disciplinaires professionnelles et certainement pas criminelles[135], a néanmoins impliqué des considérations de réputation et d’autres considérations affectant la carrière pour ceux qui cherchent à obtenir un contrôle judiciaire. Il s’agit également de procédures dans lesquelles la réponse corrective la plus importante espérée par le requérant ou l’appelant est un sursis permanent.

En revanche, lorsque le requérant ou le requérant qui allègue un retard est la « victime » de la faute alléguée, les perspectives pertinentes seront souvent quelque peu différentes. Dans ce cas, leurs préoccupations concernant les retards seront fondées, entre autres, sur la menace que ceux-ci font peser sur l’intégrité et la viabilité finale de la procédure, ainsi que sur leur désir d’obtenir gain de cause et réparation. Ils voudront tout le contraire d’une suspension permanente de la procédure. Pour eux, le recours sous forme d’injonction obligatoire ou d’ordonnance de type mandamus ordonnant une audience accélérée sera la forme de recours la plus efficace.

La même réponse corrective prédominera également dans les cas où un demandeur ou un requérant cherche à obtenir un avantage ou une licence de la part de l’État. Son intérêt est d’obtenir cet avantage ou cette licence le plus rapidement possible ou, à tout le moins, une ordonnance interdisant tout retard supplémentaire dans la prise de décision par rapport à l’octroi effectif de la licence ou de l’avantage.

Cependant, il est surprenant de constater que, compte tenu de la rapidité avec laquelle les rouages de l’État tournent souvent, il existe peu de précédents concernant des demandeurs de prestations ou de licences qui demandent de telles formes de mesures de redressement obligatoires. Toutefois, dans un contexte de réglementation de l’énergie, l’arrêt rendu en 2020 par la juge Romaine dans l’affaire Prosper Petroleum Ltd v Her Majesty the Queen in Right of Alberta[136], concernant une demande d’approbation d’un projet de sables bitumineux, en fournit un exemple. En juin 2018, l’organisme de réglementation de l’énergie de l’Alberta a estimé que le projet était dans l’intérêt public et l’affaire a ensuite été soumise à l’approbation du Cabinet, comme l’exige la loi pertinente. Plus de dix-neuf mois plus tard, le Cabinet n’avait toujours pas rendu de décision malgré les demandes du promoteur.

La juge Romaine, appliquant les critères standard pour une injonction interlocutoire obligatoire et une mesure de redressement de la nature d’un mandamus, et rejetant l’argument selon lequel, du moins dans ce contexte, il s’agit de recours inadmissibles contre la Couronne[137], a jugé que, selon la prépondérance des inconvénients, Prosper Petroleum avait prouvé qu’il y avait eu un retard abusif pouvant être soumis à un contrôle. Dans ce contexte, la juge Romaine a noté que le requérant ne cherchait pas à obtenir une décision en sa faveur, mais à ce que le Cabinet prenne effectivement une décision[138]. La Cour a donc accordé une injonction provisoire obligatoire et une ordonnance de mandamus ordonnant au Cabinet de prendre cette décision dans les dix jours.

Bien que cette victoire se soit avérée quelque peu à la Pyrrhus dans la mesure où la juge d’appel Strekaf[139] a ensuite fait droit à la demande de la Couronne de suspendre la procédure dans l’attente de la décision de la Cour d’appel sur l’appel de la décision de la juge Romaine[140]. Néanmoins, cela ne remettait pas en question les principes sur lesquels la juge Romaine avait fondé l’octroi du redressement. La juge Strekaf a précisé qu’elle ne se prononçait pas sur le bien-fondé de l’appel et qu’elle se contentait d’affirmer que, selon le critère d’octroi d’un sursis en attendant l’appel, l’Alberta avait franchi le seuil d’une question « sérieuse » devant être jugée[141]. Pour apaiser en partie la déception de Prosper Petroleum, la juge Strekaf a également tenu compte du fait que l’Alberta s’était engagée à procéder à l’appel de manière accélérée si elle obtenait le sursis[142].

Ce qui est maintenant important à la suite de l’arrêt Abrametz, c’est que, sans aucune réserve ni limitation au contexte de la discipline professionnelle ou à d’autres formes de procédures de plainte, le juge Rowe a approuvé dans l’arrêt Abrametz l’utilisation du mandamus et d’une ordonnance d’audience accélérée comme recours en cas de retard abusif ou procédural injuste. Il a également admis que, à condition que les voies de recours internes aient été épuisées, ces ordonnances pouvaient être rendues « avant même qu’un abus de procédure n’existe », ce qui permettrait d’éviter les inquiétudes quant à la possibilité que le requérant échoue en raison d’un retard excessif dans l’obtention d’une réparation[143].

La question laissée en suspens est de savoir dans quelle mesure les demandeurs d’avantages ou de licences ont accès à ce type de recours lorsqu’il y a un retard systémique dans un tribunal à forte activité. Quand serait-il approprié pour une cour de révision d’ordonner la résorption de l’arriéré ou bien l’octroi de la licence ou de l’avantage demandé? N’est-il jamais approprié, sauf lorsque des droits constitutionnels sont en jeu, qu’une cour ordonne directement la dépense de ressources pour remédier à un retard systémique? Il s’agit cependant d’une question qui a peu de chances de se poser dans le cadre de la réglementation de l’énergie[144].

iv. Je suis toujours debout

Dans l’affaire Colombie-Britannique (Procureur général) c Conseil des Canadiens avec déficiences[145], dans le contexte d’une contestation de la constitutionnalité d’une loi relative aux patients atteints de troubles mentaux détenus involontairement, la Cour suprême du Canada a réexaminé son arrêt datant d’une décennie sur la qualité pour agir dans l’intérêt public dans le cadre d’un litige constitutionnel : Canada (Procureur général) c Downtown Eastside Sex Workers United Against Violence Society[146]. En confirmant la capacité du Conseil à poursuivre le procès pour sa contestation constitutionnelle, la Cour suprême a affiné et développé son élaboration des principes pertinents dans l’arrêt Downtown Eastside Sex Workers.

Dans son ouvrage « View from the Top : Administrative Law in the Supreme Court of Canada, 2022 »[147], John Evans propose une analyse complète de l’arrêt. Plutôt que de répéter et encore moins de résumer cette analyse, je me contenterai de souligner quatre points.

  1. Bien que l’arrêt ne traite pas spécifiquement de cette question, M. Evans JA affirme que l’on peut en déduire que l’arrêt de la Cour suprême traite également de la qualité pour agir dans l’intérêt public dans le cadre de recours en matière de droit administratif.
  2. Comme l’illustre l’arrêt Downtown Eastside Sex Workers[148], les personnes qui intentent des actions au nom de l’intérêt public afin de renforcer leur droit à la qualité pour agir ajouteront comme partie quelqu’un qui est directement affecté. En l’espèce, les deux parties en question se sont désistées. Cependant, la Cour suprême a déclaré qu’il n’était pas nécessaire que le tribunal soit également saisi d’un requérant ou d’un demandeur remplissant les conditions normales de qualité pour agir[149]. D’une manière générale, une telle partie n’était pas nécessaire et, même lorsque l’octroi de la qualité pour agir dans l’intérêt public dépendait de l’existence d’un « contexte factuel concret[150] » et bien développé, il existait clairement des substituts à un codemandeur ou à un plaignant directement concerné. Néanmoins, la présence d’un tel codemandeur ou plaignant pourrait être pertinente et utile pour fournir un contexte factuel suffisant pour répondre aux normes requises par la Cour sur ce point.
  3. Contrairement à la Cour d’appel de la Colombie-Britannique[151], la Cour suprême, après une longue analyse[152], a conclu que les considérations relatives à la légalité et à l’accès à la justice n’avaient pas un « poids particulier »[153] parmi les facteurs liés au modèle de Downtown Eastside Sex Workers pour évaluer les demandes de qualité pour agir dans l’intérêt public. « Aucun objet, principe ou facteur n’a préséance dans l’analyse »[154].
  4. En particulier dans les situations où une question d’intérêt public est traitée dans le cadre d’une motion de radiation, les décisions favorables peuvent toujours faire l’objet d’une réévaluation à des stades ultérieurs du litige[155].

Tous ces aspects de l’arrêt contribuent à une élaboration précieuse des principes et des impératifs pratiques pour l’évaluation d’une demande de qualité pour agir dans l’intérêt public, que ce soit dans le contexte d’une procédure constitutionnelle ou administrative.

 

* David J. Mullan, Professeur émérite, Faculté de droit, Queen’s University. Certaines parties de ce document doivent beaucoup aux échanges avec John M. Evans, ancien juge de la Cour d’appel fédérale.

  1. 2019 CSC 65, [2019] 4 RCS 653 [Vavilov].
  2. Ibid.
  3. Ibid.
  4. En décrivant sa mission, l’arrêt rendu majoritairement dans Vavilov, ibid aux paras 2, 10–11, 16, 23, parle de réformer et de clarifier le droit relatif au contrôle judiciaire de l’action administrative pour des motifs de fond dans les termes les plus généraux. La seule réserve apparente est que le contrôle sur la base de la justice naturelle et/ou de l’équité procédurale n’est pas inclus : voir para 23 (bien que voir mon exposé plus complet dans David J. Mullan, « Évolution du droit administratif pertinent au droit et à la réglementation de l’énergie en 2020 » (2021) 9:1 Publication trimestrielle sur la règlementation de l’énergie 21, en ligne : ERQ <energyregulationquarterly.ca/fr/regular-features/2020-developments-in-administrative-law-relevant-to-energy-law1#sthash.4ujc1NI9.dpbs>). Cependant, cette réserve mise à part, la majorité, au paragraphe 11, a déclaré que son objectif était de « veiller à ce que le cadre qu’elle adopte tienne compte de tous les types de prise de décision administrative » [traduction].
  5. Bien qu’à ce sujet, voir l’exposé plus loin dans II (iv), « What Gives? », ci-dessous.
  6. Supra note 1.
  7. Ibid.
  8. Ibid.
  9. SOCAN c Entertainment Software Association, 2022 CSC 30 Dans leur dissidence sur cette question, les juges Karakatsanis et Martin (aux paras 115–19) ont rejeté la création d’une catégorie supplémentaire dans laquelle la présomption de contrôle du caractère raisonnable est réfutée. Les trois catégories existantes reconnues dans l’arrêt Vavilov étaient exhaustives).
  10. Voir l’arrêt Vavilov, supra note 1 au para 138. Dans de tels cas, l’attention se porte inévitablement sur le résultat.
  11. Ou, en d’autres termes, les tribunaux doivent-ils traiter les questions d’équité procédurale en fonction d’une correction non déférente? Cependant, pour un jugement antérieur selon lequel la norme de contrôle judiciaire n’a aucun rôle à jouer dans les contestations de l’équité procédurale, voir Moreau-Bérubé c Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), 2002 CSC 11, [2002] 1 RCS 249 au para 74 (le juge Arbour prononçant le jugement de la Cour).
  12. J’utilise ici le terme « légiféré » pour couvrir toute la gamme des instruments autorisés par la loi : par exemple, les règlements du gouverneur ou du lieutenant-gouverneur en conseil, les règles de procédure des agences et des tribunaux administratifs, les arrêtés municipaux. Cependant, comme nous le verrons, l’approche du contrôle judiciaire de ces instruments peut ne pas être universelle. Il peut également y avoir un problème en ce qui concerne le contrôle judiciaire de divers instruments procéduraux internes ou non contraignants qui ne sont pas spécifiquement autorisés par la loi.
  13. 2022 CSC 29 [Abrametz].
  14. 2000 CSC 44, [2000] 2 RCS 307 [Blencoe].
  15. Abrametz n’a pas fait valoir que le retard avait donné lieu à un manque d’équité lors de l’audience, mais a limité sa contestation à l’abus de procédure : supra note 13 aux paras 41–42.
  16. SS 1990-91, c L-10.1.
  17. 2020 SKCA 81.
  18. Supra note 14.
  19. Ibid.
  20. RSBC 1996, c. 241.
  21. Ibid.
  22. Supra note 13.
  23. 49 B.C.L.R. (3d) 216.
  24. 2008 CSC 9, [2008] 1 CSC 190.
  25. Supra note 13.
  26. Voir l’arrêt du juge Rowe pour la majorité dans l’arrêt Abrametz, supra note 13 au para 79.
  27. 2014 CSC 24, [2014] 1 RCS 502 [Khela].
  28. Ibid au para 79.
  29. Ibid au para 89.
  30. 2015 CAF 160 aux paras 67–71.
  31. David Stratas, « The Canadian Law of Judicial Review: Some Doctrine and Cases » (2022) aux p 88–95, en ligne (pdf) : SSRN <papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2924049>. Ancien juge de la Cour d’appel fédérale, John M. Evans s’est plus explicitement fondé sur un jugement dans « Fair’s Fair: Judging Administrative Procedures » (2018) 28 CJAL&P 112, et maintenant, en référence à Abrametz, voir son ourvrage « View from the Top: Administrative Law in the Supreme Court of Canada, 2022 », un supplément à Brown et Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada, (Toronto: Thomson Reuters, 1998) (ouvrage à feuillets mobiles mis à jour en 2022).
  32. Supra note 13 à la p 4.
  33. 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339 [Khosa]. Au para 43, s’appuyant prétendument sur l’arrêt Dunsmuir, le juge Binnie, prononçant l’arrêt de la majorité, a affirmé que le contrôle de l’équité procédurale est effectué sur la base du bien-fondé.
  34. Supra note 27.
  35. Supra note 13 aux paras 26, 28.
  36. Alberta Utilities Commission Act, SA, c A-37.2, ss 29(1) et (2).
  37. Voir, p. ex., Energy and Utilities Board Act, SNB, c E-9.18, s 52(1).
  38. Supra note 1.
  39. Abrametz, supra note 13 au para 27.
  40. Ibid.
  41. Ibid au para 29. Comme il est établi dans le contexte d’un procès civil par Housen v Nikolaisen, 2002 CSC 33, [2002] 2 RCS 235.
  42. Supra note 1.
  43. Supra note 33 à la p 8.
  44. Supra note 27.
  45. Ibid.
  46. Abrametz, supra note 13 aux pp 160–85, dont le titre de la partie A est « Inconsistency with Khela » (incompatibilité avec Khela).
  47. Supra note 27 à la p 6.
  48. Supra note 33.
  49. Abrametz, supra note 13 au para 30.
  50. Ibid aux paras 103–24, et plus particulièrement au para 124.
  51. Ibid au para 168.
  52. Ibid au para 172.
  53. Supra note 33.
  54. Supra note 27.
  55. Abrametz, supra note 13 aux paras 165–69.
  56. Ibid au para 169.
  57. Supra note 27.
  58. Abrametz, supra note 13 au para 174.
  59. Supra note 28 au para 6.
  60. Abrametz, supra note 13 au para 174.
  61. Ibid aux paras 176–77 (citant une fois de plus Khela, et, inter alia, Conseil des Canadiens avec déficiences c VIA Rail Canada Inc., 2007 CSC 15, [2007] 1 RCS 650 au para 231, et Baker c Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) [1999] 2 RCS 817 au para 27).
  62. Supra note 27.
  63. Abrametz, supra note 13 au para 164.
  64. Supra note 41.
  65. Abrametz, supra note 13 au para 182.
  66. Ibid aux paras 178–79.
  67. Y compris, vraisemblablement, les recours procéduraux pour cause de violation de la Charte.
  68. Voir cependant, dans un contexte de réglementation de l’énergie, TransAlta Generation Partnership v Alberta (Minister of Municipal Affairs), 2022 ABCA 381 aux paras 88–102, et rejetant l’application des principes d’équité procédurale à la délivrance de directives autorisées par la loi. Je reviendrai sur cet aspect de l’arrêt TransAlta Generation plus loin dans cet examen.
  69. Les références à la plupart des analyses professionnelles et théoriques ainsi que la jurisprudence se retrouvent dans l’arrêt de la Cour d’appel de l’Alberta dans TransAlta Generation Partnership v Alberta (Minister of Municipal Affairs), ibid aux paras 45–49, et l’arrêt du juge d’appel Stratas dans Médicaments novateurs Canada c Canada (Procureur général), 2022 CAF 210 aux paras 26–29, 43.
  70. Portnov c Canada (Procureur général), 2021 CAF 171, et Médicaments novateurs Canada c Canada (Procureur général), ibid, répondant à une position contraire prise par la Cour d’appel de l’Alberta dans Auer v Auer, 2022 ABCA 375 et TransAlta Generation Partnership, supra note 68.
  71. Voir Médicaments novateurs Canada, ibid au para 34.
  72. Supra note 1 aux paras 65–67.
  73. Dans Dunsmuir, la majorité, supra note 24 au para 59, avait cité United Taxi Drivers’ Fellowship of Southern Alberta v Calgary (Ville), 2004 CSC 19, [2004] 1 RCS 485, une cause concernant une contestation de la validité d’un règlement municipal, comme exemple d’une vraie question de juridiction à soumettre à un contrôle du bien-fondé.
  74. Vavilov, supra note 1 au para 66, dans lequel la majorité semble utiliser la difficulté de faire la distinction entre le bien-fondé, le vires ou le contrôle juridictionnel de lois subordonnées et son exercice, et « l’application sans exception d’une loi habilitante », le meilleur exemple étant le cas d’un large octroi d’autorité pour promulguer des lois subordonnées en accord avec les objectifs de la loi habilitante. Tout cela pour justifier l’exclusion des concepts de juridiction et de vires de la rubrique du droit canadien du contrôle judiciaire.
  75. 2017 CSC 20, [2017] 1 RCS 360.
  76. 2018 CSC 22, [2018] 1 RCS 635.
  77. 2013 CSC 64, [2013] 3 RCS 810.
  78. Et, dans la seconde affaire, Médicaments novateurs Canada, supra note 69 au para 27, que, comme l’exigent les règles de jurisprudence de la Cour d’appel fédérale, il applique son propre arrêt antérieur pour la Cour d’appel dans Portnov, supra note 70 aux paras 26–27.
  79. Ibid au para 67.
  80. Ibid aux paras 28–43.
  81. 2022 CAF 211.
  82. Ibid aux paras 186–90.
  83. Ibid au para 190.
  84. 2021 CSC 11. Dans son opinion dissidente, aux paras 600–07, le juge Rowe a situé le contrôle des règlements sur la base de la division des pouvoirs comme une question ultra vires. Cependant, de manière plus générale, le juge Rowe appliquerait la méthode du caractère raisonnable de l’arrêt Vavilov au contrôle des lois subordonnées.
  85. Ibid au para 73 et 87 plus particulièrement. Il convient cependant de noter que tant le juge Stratas dans l’arrêt Médicaments novateurs, supra note 45 au para 69, et de Montigny, supra note 81 au para 191, ont tenu à préciser que le résultat aurait été le même quelle que soit la méthodologie adoptée.
  86. Ibid au para 189.
  87. Ibid.
  88. John M Evans, « Reviewing Delegated Legislation After Vavilov: Vires or Reasonableness? » (2021) 34 CJAL&P 1. Il n’est pas clair si l’arrêt Vavilov exclurait également de son champ d’application tous les décideurs qui n’ont pas la capacité de traiter des questions de droit ou s’il s’agit simplement d’un ajout au caractère législatif de la prise de décision comme raison de caractériser le contrôle de la législation subordonnée comme étant classé de manière appropriée comme un exemple de contrôle ultra vires. Voir également Auer v Auer, supra note 70, où le juge d’appel Pentelechuk (le juge Crighton concourant) exprime bon nombre des mêmes arguments et préoccupations en rejetant l’argument selon lequel l’arrêt Vavilov a inférentiellement annulé l’arrêt Katz. Tout en étant d’accord avec la majorité pour dire que les directives législatives pertinentes étaient valides, le juge d’appel Feehan est arrivé à cette conclusion en se fondant sur un mélange des critères de l’arrêt Vavilov pour le contrôle du caractère raisonnable et des critères dérivés de l’arrêt Katz.
  89. Supra note 69 aux paras 40–53, suivant Auer v Auer.
  90. Ibid au para 48. La Cour, au para 45, cite également l’article du juge d’appel Evans comme l’avait fait le juge d’appel Pentelechuk dans Auer, ibid au para 39.
  91. Ibid.
  92. Supra note 84 aux paras 73, 87.
  93. Katz, supra note 77.
  94. Renvois relatifs à la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, supra note 84 au para 73.
  95. Vavilov, supra note 1 au para 108.
  96. Ibid, citant Catalyst Paper Corp. c North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 RCS 5 au para 15.
  97. 2022 CSC 36.
  98. Selon la position prise par la Cour en 1996 dans Chemin de fer Canadian Pacifique c Vancouver (Ville), 2006 CSC 5, [2006] 1 RCS 227.
  99. [1959] RCS 121.
  100. 2010 CSC 62, [2010] 3 RCS 585.
  101. En fait, le juge Binnie, prononçant l’arrêt de la Cour dans Telezone, ibid aux paras 18–23, cela n’aurait pas été considéré comme une forme d’attaque accessoire ou, compte tenu des faits de l’affaire, nécessitant au préalable une demande de contrôle judiciaire comme condition préalable.
  102. Supra note 1 au para 111.
  103. Supra note 69.
  104. 2021 ABQB 37.
  105. Supra note 69 au para 8.
  106. Les autorités pertinentes se trouvent, ibid au para 88.
  107. (Toronto: Thomson Reuters, 1998) (feuilles mobiles mis à jour en 2022, publication 2), ch. 7 à la p 38.
  108. Supra note 69 au para 90.
  109. Ibid au para 94.
  110. Ibid au para 98.
  111. 2018 ONSC 5062 [Tesla].
  112. Supra note 69 au para 97, citant Tesla, ibid au para 59.
  113. Ibid au para 98.
  114. Ibid au para 102. Cependant, la Cour fait référence à l’opinion dissidente du juge Evans dans l’affaire Apotex Inc c Canada (Procureur général), [2000] 4 CAF 264 (CA) aux paras 99–127, dans laquelle il s’est dit favorable à l’application du principe de l’attente légitime même lorsque la fonction était législative et qu’une obligation d’équité procédurale ne s’imposait pas par ailleurs. Par la suite, la position d’Evans a de nouveau été rejetée dans l’affaire Syndicat canadien de la fonction publique c Canada (Procureur général), 2018 CAF 518, paras 56, 84, 157.
  115. Ibid, tiré de Canada (Procureur général) c Mavi, 2011 CSC 30, [2011] 2 RCS 504 au para 68.
  116. Ibid aux paras 34–36.
  117. Tesla, supra note 111 au para 98.
  118. À tout le moins, la Cour d’appel cite effectivement Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 RCS 559 au para 95; Ibid au para 100, reconnaissant que l’attente légitime peut résulter d’une conduite comprenant les pratiques antérieures ainsi que les représentations.
  119. Reconnu pour la première fois en Angleterre il y a plus de vingt ans dans R v North and East Devon Health Authority, ex parte Coughlan [2001] QB 213. Comparer la position canadienne énoncée dans l’arrêt, ibid au para 101, rejetant la possibilité.
  120. David J. Mullan, « Évolution du droit administratif pertinent au droit et à la réglementation de l’énergie en 2020 » (2021) 9:1 Publication trimestrielle sur la règlementation de l’énergie 21, en ligne : ERQ <energyregulationquarterly.ca/fr/regular-features/2020-developments-in-administrative-law-relevant-to-energy-law1#sthash.XZc4GK1E.dpbs>
  121. SA 2007, c A-37.2.
  122. SA 2003, c E-5.1.
  123. Demande du personnel de l’AUC pour engager une procédure judiciaire en vertu des articles 8 et 63 de l’Alberta Utilities Commission Act, 29 novembre 2021, en ligne (pdf): <efiling-webapi.auc.ab.ca/Document/Get/719764>.
  124. Ibid au para 2(d).
  125. Ibid au para 141.
  126. Décision de l’AUC 27013-D01-2022.
  127. Ibid aux paras 70–74, 91.
  128. Ibid au para 70.
  129. Ibid au para 91.
  130. L’accord de règlement soulève en fait d’autres questions relatives au droit administratif qui auraient également pu faire partie de cet examen : la mesure dans laquelle la loi relative à l’approbation des accords de règlement dans les affaires de droit pénal trouve un écho dans le domaine des procédures d’application de la réglementation (voir les para 64-69 et également la règle 013 de l’UAC; Rules on Criteria Relating to the Imposition of Administrative Penalties); la participation des organismes d’intérêt public au processus de règlement; et l’adéquation des sanctions imposées.
  131. Paul Daly, « An Introduction to the Duty of Candour » (5 janvier 2023), en ligne : Administrative Law Matters <www.administrativelawmatters.com/>; Voir aussi, Paul Daly, «The Prospects for Candour in Canada: The Importance of the ‘Record’» (23 janvier 2023), en ligne : <www.administrativelawmatters.com/>.
  132. Citant Donaldson MR dans R v Lancashire County Council, ex parte Huddleston [1986] 2 All ER 941 à 945.
  133. Supra note 14.
  134. Supra note 13.
  135. Ibid au para 54.
  136. Prosper Petroleum Ltd. v Her Majesty the Queen in Right of Alberta, 2020 ABQB 127 [Prosper].
  137. Ibid aux paras 3–31.
  138. Ibid aux paras 24, 29.
  139. 2020 ABCA 85.
  140. Pour d’autres litiges concernant ce projet, voir Fort McKay First Nation v Prosper Petroleum Ltd, 2020 ABCA 163, concernant la contestation par une Première Nation de la décision d’approbation de l’organismes de réglementation de l’énergie de l’Alberta, attendant toujours à ce moment la décision du Cabinet. J’ai abordé cet aspect des procédures dans « Évolution du droit administratif pertinent au droit et à la réglementation de l’énergie en 2020 », (2021) 9:1 Publication trimestrielle sur la règlementation de l’énergie 21, en ligne :  ERQ <energyregulationquarterly.ca/fr/regular-features/2020-developments-in-administrative-law-relevant-to-energy-law1#sthash.d17WeeON.dpbs>.
  141. Prosper, supra note 139 au para 20.
  142. Ibid au para 29.
  143. Supra note 12 aux paras 78–82, et plus particulièrement au para 80.
  144. En dehors du cadre du droit pénal, la question des remèdes aux retards systémiques a trouvé un terrain fertile dans le domaine des commissions salariales judiciaires. Pour un arrêt relativement récent, voir Newfoundland and Labrador Assn. of Provincial Court Judges v Newfoundland and Labrador, 2018 NLSC 140.
  145. 2022 CSC 27 [Conseil des Canadiens].
  146. 2012 CSC 4, [2012] 2 RCS 524.
  147. Supra note 31.
  148. En plus de la Société, une ancienne travailleuse du sexe de longue date était également une demanderesse.
  149. Conseil des Canadiens, supra note 145 aux paras 63–67.
  150. Ibid au para 66.
  151. 2020 BCCA 241, 41 BCLR (6e) 47.
  152. Conseil des Canadiens, supra note 145 aux paras 28–59.
  153. Ibid au para 56.
  154. Ibid au para 59.
  155. Ibid aux paras 69–70.

 

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