Défaite du Maryland devant la Cour suprême : une victoire pour les consommateurs, la concurrence et les États

En raison d’une production insuffisante dans des secteurs où le transport est limité, les enchères de capacité de PJM faisaient en sorte de pousser à la hausse les prix de gros au Maryland. La Maryland Commission a mis en œuvre une solution en trois parties : (1) sélectionner dans le cadre de la concurrence un producteur grossiste pour desservir le secteur limité. (2) Ordonner aux détaillants de service public du Maryland de conclure des accords pour une capacité à long terme avec le producteur gagnant au prix offert par ce dernier en situation de concurrence. (3) Élaborer le contrat de manière à ce que le service public, en se basant sur les dollars des contribuables au détail, paie au producteur toute différence entre le prix de PJM autorisé par la FERC et le prix du contrat avec le producteur, à condition que le producteur ait été sélectionné durant l’enchère de capacité de PJM. Le New Jersey a passé une loi obligeant une solution similaire.

Les tribunaux fédéraux et les tribunaux de circuits fédéraux ont statué que la Federal Power Act devance les mesures des États. Le Maryland a porté la cause en appel devant la Cour suprême des É.U.

En avril 2016, cette dernière a invalidé l’ordre du Maryland1. En garantissant un niveau de compensation pour le producteur grossiste différent de la compensation de PJM autorisée par la FERC, le Maryland « [Traduction] n’avait pas tenu compte du tarif de gros inter-États requis par la FERC »2. Étant donné qu’en vertu du Federal Power Act, le Congrès a fait de l’établissement des tarifs de gros un domaine exclusif de la FERC, l’ordre de l’État n’était pas valide en vertu de la théorie du « champ occupé ». Le vote du tribunal était de 8-0.

Les vrais gagnants

Les consommateurs : La décision empêche les États d’utiliser les contribuables captifs pour subventionner les mises des producteurs dans des marchés de grossistes organisés. Les États étant confrontés à des prix de gros élevés devront se tourner vers des chemins plus productifs. Un de ces chemins consiste à réduire la demande des consommateurs : grâce à des tarifs fixés selon le temps d’utilisation qui alignent les prix sur les coûts; grâce à de nouveaux compteurs et thermostats qui aident les consommateurs à contrôler leurs coûts et grâce à des panneaux solaires et des investissements écoénergétiques pour nos citoyens à faible revenu, afin qu’ils puissent également contrôler leurs coûts3. Le tribunal a également écrit que les États peuvent utiliser des « [Traduction] incitations fiscales, des concessions de terre, des subventions directes, la construction d’installations de production étant la propriété de l’État ou une nouvelle règlementation du secteur énergétique […] Tant que l’État ne place pas de condition sur le paiement des fonds après avoir remporté l’enchère, le programme de l’État ne souffrirait pas du défaut fatidique qui rend le programme du Maryland inacceptable. »4

Concurrence : La concurrence fait la promotion de l’intérêt du public lorsque les vendeurs sont en compétition en fonction des mérites (qualité et coût). Dans les marchés régionaux organisés, la qualité est couverte par des normes minimales en matière de fiabilité et des pénalités sont prévues pour ceux qui n’arrivent pas à se conformer. Par conséquent, dans les enchères actuelles, la concurrence est fondée sur le coût. L’aide financière ordonnée par le Maryland, lorsqu’elle est offerte sous condition que le producteur ait été sélectionné par une enchère, permet à ce dernier de miser un montant inférieur à son coût, le comportement précis qui fait tomber la théorie de la concurrence. La source de production préférée du Maryland peut toujours participer aux enchères et remporter, mais elle doit le faire sur ses propres mérites inhérents, et non sur des mérites artificiels aidés par les consommateurs captifs du Maryland. Lorsque les gagnants sont choisis en fonction du prix le plus bas plutôt que sur celui le plus subventionné, la concurrence fonctionne et le public en profite.

États : La décision élimine une façon pour un État d’agir de manière contraire aux autres États. Oui, la position juridique du Maryland a été appuyée par plusieurs États. Imaginez-vous un peloton d’exécution circulaire. Pour chaque État qui fait comme le Maryland, substituer la compensation préférée de l’État par la compensation autorisée par la FERC, alors chaque enchérisseur aidé par l’État ferait une mise inférieure au coût réel. Le prix de PJM pour la capacité de production se situerait sous le coût de remplacement à long terme. Les chutes de prix à court terme mèneraient à des ruptures de production à long terme.

Les États pourraient pallier aux ruptures et se protéger contre les prix de gros plus élevés, en ordonnant à leurs services publics de construire leur propre centrale de production plutôt que de l’acheter sur le marché des grossistes. Toutefois, ils retourneraient à une règlementation fondée sur le taux de rendement plutôt que sur la concurrence régionale, risquant la perte d’économies d’échelle régionales et des dépenses excédentaires des services publics, ces dernières en raison du préjugé « Averch-Johnson » bien connu des services publics pour des actifs fondés sur les taux5. Comme le savent bien les professionnels des années 1980, les déductions non permises représentent la seule arme de l’organisme de règlementation contre le biais de base sur les tarifs. Mais les déductions non permises ne fonctionnent pas bien dans les environnements trop gros pour faire faillite. En effet, la Cour suprême de la Lousianne a déjà maintenu une décision de la commission de l’État permettant les coûts imprudents dans les tarifs, en se fondant sur le fait que les déductions pourraient affaiblir le service public dans une mesure allant à l’encontre de l’intérêt du public6. Voulez-vous un exemple actuel? Allez examiner la centrale de Kemper de la Mississippi Power Company. En cherchant à obtenir l’approbation de la commission d’État, les témoins de l’entreprise ont insisté pour dire qu’ils avaient « confiance » dans leur estimation des coûts de 2,4 milliards de dollars, mais opposés à un plafond des coûts établis par la commission. Le coût dépasse maintenant les 6 milliards de dollars et l’entreprise demande l’aide des contribuables7.

Les frontières de l’État limite la créativité. Lorsque nous agissions à titre d’État, nous pensons petit plutôt que gros, retirant une contrainte locale plutôt que de construire un marché régional. Nous pensons à nous plutôt qu’à eux, favorisant des projets renouvelables construits dans notre État à des projets à plus faible coût construits dans d’autres États. Et nous pensons aux coûts pour notre État comparativement aux coûts totaux, s’opposant à des projets qui aident une région, car nous n’aimons pas la part des coûts qui est affectée à notre État8.

Établissement des prix c. déplacement de courbe

Certains raisonnements des sceptiques de la Cour suprême de demandent : Qu’est-ce qui distingue la version se soutien de la production du Maryland des mesures des autres États que la Cour n’a pas touchées? Ma compréhension : Les États ne peuvent pas établir le prix de gros, mais peuvent affecter le prix de gros. La « [Traduction] ligne claire »9 de la Federal Power Act sépare les (a) politiques qui établissent la compensation pour des vendeurs en gros particuliers des (b) politiques qui déplacent la courbe de demande et de l’offre dans le marché des grossistes pour tous les acheteurs et les vendeurs. La FPA sépare l’établissement des prix du déplacement de courbe. Le déplacement de courbe affecte le prix courant, mais n’établit pas le prix courant. Rien n’empêche les États d’agir sur la courbe de l’offre et celle de la demande. Il faut examiner ces deux exemples10 :

L’État déplace la courbe de l’offre : Un État peut réduire le coût des entrées pour la production à l’intérieur de l’État. Par exemple, il peut réduire les taxes sur la propriété, de vente ou sur le revenu; il peut donner ou subventionner des terrains et des améliorations; il peut fournir la formation aux employés et il peut réduire les exigences environnementales. Chacune de ces mesures de l’État déplace les courbes de l’offre de l’entreprise de production de l’État vers la droite. Ce déplacement de la courbe de l’offre fait en sorte que pour n’importe quel prix courant, les entreprises de l’État chercheront à augmenter l’offre, car leurs coûts de production seront plus bas (à tout le moins égaux). Ce déplacement vers la droite des courbes de l’offre du producteur de l’État mènera à un déplacement vers la droite de la courbe de l’offre du marché régional; par conséquent, cela abaissera le prix courant régional (à tout le moins égal). Les politiques de l’État auront affecté, indirectement, le prix courant sous la compétence du FERC. Mais chaque compensation de vendeur sera toujours déterminée, directement et entièrement, par le prix courant sous la compétence de la FERC. Il n’y a aucune « correction » de toute compensation de vendeur en gros dans le cadre d’un paiement subventionné par les contribuables ayant été ordonnée par l’État, comme dans le cas de l’ordre invalidé du Maryland.

L’État déplace la courbe de la demande : L’État peut offrir des chandails et des ampoules fluorescentes, resserrer les codes du bâtiment, taxer la consommation, établir des prix de détail élevés durant les périodes de pointe ou payer les consommateurs pour réduire la demande et la consommation. Ces mesures déplacent la courbe de demande de l’État vers la gauche faisant en sorte que la courbe de l’offre du marché du gros la croise à un prix plus bas. Encore une fois, ce prix plus bas, un prix de compétence de la FERC, est affecté par l’État, mais n’est pas établi par l’État. L’effet de l’État sur le prix est indirect, et non direct.

Par conséquent, voici les distinctions pertinentes pour les États : entre le déplacement de courbe (oui) et l’établissement de prix (non), entre avoir un effet sur le prix (oui) et l’établissement du prix (non), entre avoir un effet sur les prix indirectement (oui) et directement (non). Il n’a jamais été question de remettre en cause la possibilité de l’État d’offrir de l’aide financière, d’une certaine façon, aux vendeurs ou aux acheteurs, ce qui consiste à déplacer la courbe. L’erreur du Maryland a été de changer la compensation pour un vendeur en gros précis, en reliant la subvention garantie par les contribuables à la participation du vendeur au marché de vente en gros.

Examen introspectif

Beaucoup d’argent et de temps a été mis dans une cause perdante, même après deux procès et deux tribunaux de circuits fédéraux devant un total de huit juges qui ont expliqué l’erreur de l’État en termes pratiquement identiques. Comme il est expliqué dans mon essai du mois dernier : « FPA «Power Grab»: On Whose Foot is the Shoe? », pratiquement chaque contestation moderne de l’État devant la compétence de la FERC a échoué11. Les commissions d’État, et nous qui les conseillons, devront cerner et corriger les forces culturelles internes qui mènent à ces échecs. Un tel examen de l’âme sera plus productif que de persister dans la voie que chacun des 16 juristes, tous ceux qui ont pris part aux décisions du Maryland et du New Jersey, qui étaient mauvaises.

La bonne forme de coopération

« [Traduction] [La] Federal Power Act, comme toutes les lois de fédéralisme coopératif, envisage une relation fédérale-État marquée par l’interdépendance »12. La coopération est requise pour l’interdépendance. Mais la « coopération » doit vouloir dire une coopération vers l’objectif réglementaire de tarifs justes et raisonnables13. La « coopération » ne veut pas dire des États qui coopèrent pour miner les politiques de la FERC. Et la « coopération » ne veut pas dire que la FERC dévie de ses propres obligations simplement en achetant la paix avec les États. Si l’acceptation de l’exemption demandée par l’État pour la règle du prix de l’offre minimum menait à des prix inférieurs à la concurrence, cela ne serait pas une coopération pratique. Si on ordonne aux organisations régionales de transport (ORT) de rejeter les mises, en réponse à la demande des États qui les excluent mène à des prix supérieurs à la concurrence, cela n’est pas une coopération pratique. (La dernière était la seule erreur de l’ordonnance 74514. Lorsqu’un État limite la participation pour répondre à la demande, la courbe de la demande demeure artificiellement vers la droite, causant des prix inutilement élevés pour les consommateurs dans tous les États de la région.) La FERC ne devrait pas dire « oui » aux États simplement pour gagner des points pour la « coopération ».

* * *

Lors de son entrée à la Maison-Blanche en août 1974, le président Ford a dit : « [Traduction] Notre Constitution fonctionne. » Comme elle l’a fait ici. La Clause de suprématie de la Constitution protège les biens communs, les biens nationaux tels que définis par le Congrès, des mesures prises par un État qui peuvent être néfastes pour les citoyens dans d’autres États. La Cour suprême a misé juste. C’est maintenant au tour des États.

* Avocat et témoin expert, Hempling a conseillé des organismes de réglementation et législatifs de partout en Amérique du Nord et est souvent appelé à prononcer des discours à des congrès internationaux. Il est professeur auxiliaire à Georgetown University Law Center, où il enseigne des cours en litiges et sur la réglementation des services publics. Son livre, Regulating Public Utility Performance: The Law of Market Structure, Pricing and Jurisdiction, duquel certaines portions du présent article ont été tirées, a été publié par l’American Bar Association en 2013. Il est également l’auteur d’un livre d’essais sur l’art de la réglementation, Preside or Lead? The Attributes and Actions of Effective Regulators. Hempling a obtenu un baccalauréat avec distinction de Yale University (1) en économie et en sciences politiques et (2) en musique, ainsi qu’un doctorat en jurisprudence avec grande distinction de Georgetown University Law Center. Pour plus de détails, voir
www.scotthemplinglaw.com.

  1. Hughes v PPL EnergyPlus, No 14-614 (19 avril, 2016).
  2. Ibid à la p 15.
  3. Sur cette dernière question, il faut examiner le rapport remarquable de la National Association for the Advancement of ColoredPeople, Just Energy Policies: Reducing Pollution and Creating Jobs (2014), <http://www.naacp.org/pages/just-energy-policies-report>.
  4. Hughes, supra note 1 à la p 15.
  5. Harvey Averch & Leland L Johnson, “Behavior of the Firm Under Regulatory Constraint”, (1962) 52:5 Am Econ Rev 1052.
  6. Gulf States Utilities Co v Louisiana Public Service Commission, 578 So (2d) 71 (La 1991) (maintien la permission de la commission de coûts imprudents de la centrale nucléaire River Bend).
  7. Divulgation complète : J’étais un consultant à la commission dans le dossier d’approbation de la centrale.
  8. Pour voir des raisons de réduire l’influence de l’« État », voir Parag Khanna, « A New Map for America », The New York Times (17 avril 2016). L’auteur a écrit :
  9. « [Traduction] Les États ne sont pas sur le point de disparaître, mais du point de vue économique et social, le pays se déplace tranquillement vers des formations régionales et métropolitaines plus souples… [Nous devrions] mettre l’accent non pas sur les frontières entre les États, mais sur les frontières de l’infrastructure, des chaînes d’approvisionnement et des voies de télécommunications… [T]rop souvent, les décisions sur l’investissement en matière d’infrastructures sont prises au niveau de l’État (voire le pays), et se terminent à la frontière de l’État. »
  10. Federal Power Commission v Southern California Edison Co, 376 US 205, 215-16 (1964) (maintenant que le « [Traduction] Congrès visait à établir une ligne claire, facilement vérifiable, entre la compétence de l’État et fédérale »).
  11. Les deux prochains paragraphes sont basés sur mon article, “Pricing in Organized Wholesale Electricity Markets: Can We Make the Bright Line any Brighter?” dans Infrastructure (American Bar Association printemps 2015).
  12. Scott Hempling, “FPA ‘Power Grab’: On Whose Foot is Show?”, <http://www.scotthemplinglaw.com/fpa-power-grab>. Cet essai faisait mention de 8 causes perdues. Il y en a 10 en réalité : La décision Hughes de la Cour suprême et une décision du troisième tribunal itinérant que j’ai omises lors de l’essai du mois dernier : New Jersey Board of Public Utilities v FERC, 744 F (3d) 74, 79-80 (Third Cir. 2014) (rejetant la contestation du New Jersey concernant l’élimination de la FERC de l’exemption pour la production soutenue par l’État).
  13. Hughes, supra note 1, Sotomayor, J. ayant des motifs concordants.
  14. Ibid, voir encore les motifs concordants du juge Sotomayor, expliquant que la Cour « [Traduction] a [u] tili [sé] l’object de la Federal Power Act comme «pierre de référence ultime» dans sa quête de préemption ».
  15. Demand Response Compensation in Organized Wholesale Energy Markets, Order No 745, 134 FERC 61,187 (15 mars 2011).

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