Le 20 mai 2020, la Régie de l’énergie du Canada (REC) a rejeté une demande de NOVA Gas Transmission Ltd. (NGTL) visant à obtenir une autorisation de cessation d’exploitation des installations qui font partie du vaste réseau de pipelines et d’installations de NGTL en Alberta et en Colombie-Britannique[2].
NGTL a présenté sa demande principalement sur la base du fait que les installations dont elle veut cesser l’exploitation ne sont plus économiquement viables. Elle a fait valoir que les tarifs pour les volumes contractuels n’étaient pas suffisants pour justifier la poursuite de l’exploitation et de l’entretien des installations étant donné que la continuité de ces activités imposerait un fardeau indu à NGTL et à ses abonnés, ce qui n’était pas dans l’intérêt public. La Commission n’était pas de cet avis, estimant que la demande ne favorisait pas l’intérêt public à ce stade et que la poursuite des activités n’imposerait pas de fardeau indu à NGTL ou à ses abonnés en cas de rejet de la demande[3]. La Commission a fait les constatations suivantes :
- Le critère de l’intérêt public : La Commission a confirmé que l’article 74 de la Loi sur l’Office national de l’énergie (maintenant l’article 241(1) de la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie)[4] ne précise pas de critère que la Commission doit appliquer pour déterminer s’il y a lieu d’accorder une autorisation de cessation d’exploitation. La Commission a estimé que le critère qui s’applique est donc celui de l’intérêt public[5].
- Résiliation de contrat : Dans les circonstances de la demande de NGTL, la cessation d’exploitation des installations entraînerait une interruption permanente du service, ce qui nécessiterait la suspension ou la cession des contrats existants[6]. La Commission a noté que ni elle ni son prédécesseur ne semblent avoir examiné une demande d’autorisation de cessation d’exploitation qui s’accompagnait de la résiliation des contrats existants associés aux installations qui, selon le promoteur, ne sont plus économiquement viables. La Commission a déclaré que les obligations de service dans le cadre de contrats entre parties commerciales ne sont pas absolues et qu’elles ne peuvent pas restreindre la capacité de la Commission à déterminer l’intérêt public. Toutefois, la Commission a jugé qu’il serait raisonnable de croire dans les circonstances que les expéditeurs ne s’attendent généralement pas que leurs contrats puissent être résiliés par NGTL, étant donné que les expéditeurs ont des droits de renouvellement contractuel; que NGTL n’a pas le droit explicite de résilier les contrats dans les circonstances; qu’il n’y a pas d’antécédents établis de résiliation de ces droits par NGTL. Étant donné que la proposition de résiliation des contrats est une question importante, elle devrait être renversée par des preuves démontrant que la cessation d’exploitation est dans l’intérêt public[7].
- Viabilité économique : Conformément à un précédent de l’Office national de l’énergie, la Commission a tenu compte de la viabilité économique des installations (en soi) dont on veut cesser l’exploitation. La Commission a déterminé que l’on doit soupeser les considérations de viabilité économique et les considérations d’intérêt public[8].
- Fardeau injustifié : NGTL a fait valoir que la poursuite des activités des installations dont elle propose de cesser l’exploitation lui imposerait, ainsi qu’à ses abonnés, un fardeau injustifié. La Commission a cependant noté que NGTL n’a fourni aucune preuve de la manière dont l’entreprise détermine le moment où un déficit devient inacceptable, ni de la façon dont où elle compare ce déficit à ceux d’autres installations sur le réseau de NGTL, ni du fait qu’elle est envisagée d’autres modalités tarifaires pour récupérer une partie de la valeur du service, ce qui aurait pu atténuer le fardeau[9].
Dans l’ensemble, en rejetant la demande d’autorisation de cessation d’exploitation, la Commission a considéré qu’il y avait un équilibre raisonnable entre la viabilité économique des installations dont on veut cesser l’exploitation et toutes les considérations d’intérêt public. Fait important, la Commission a constaté que l’évaluation de la viabilité économique de NGTL était erronée, en partie parce que l’entreprise ne tenait pas compte de manière significative de la valeur des services fournis par les installations dont on voulait cesser l’exploitation. En outre, bien que la Commission n’ait pas été convaincue que le rejet de la demande imposerait un fardeau indu à NGTL ou à ses abonnés, elle a également constaté que NGTL n’avait pas tenté de réduire le fardeau pesant sur elle-même et sur ses expéditeurs, ce qui soulève d’autres questions sur l’évaluation et le processus de NGTL qui ont conduit à sa demande d’autorisation de cessation d’exploitation. En fin de compte, la Commission n’a pas été convaincue que la proposition de cessation d’exploitation était dans l’intérêt public à ce stade, mais elle a laissé ouverte la possibilité que NGTL présente ultérieurement une nouvelle demande de cessation d’exploitation.
Compte tenu des préoccupations de la Commission concernant la demande ainsi que des observations de NGTL selon lesquelles l’entreprise possède d’autres petites installations connectées à son réseau avec des contrats restants qui répondent à certains de ses critères de cessation d’exploitation, et qu’au surplus, elle s’attend à une augmentation du nombre de ses installations ayant des coûts d’intégrité importants par rapport aux revenus, la Commission a fortement encouragé NGTL à élaborer un processus plus efficace pour déterminer et évaluer ses installations dans le cadre de ses futures demandes de cessation d’exploitation portant sur des questions telles que la résiliation de contrats et les impacts potentiellement négatifs sur les utilisateurs des installations. La Commission a fourni à NGTL neuf points d’orientation en laissant entendre que le processus de cette dernière en matière d’évaluation et de détermination des installations en vue de leur cessation d’exploitation devrait :
- être prévisible, transparent et équitable;
- assurer un traitement équitable des expéditeurs sur l’ensemble du réseau de NGTL;
- tenir compte des besoins, idées et préoccupations de toutes les parties touchées;
- tenir compte de l’incidence relative de la cessation d’exploitation par rapport au maintien du service sur toutes les parties touchées;
- étudier toutes les options pour réduire tout manque à gagner futur avant de déposer une demande d’autorisation de cessation d’exploitation auprès de la Commission;
- permettre aux expéditeurs d’assurer la planification et de prendre des mesures visant à atténuer véritablement les répercussions d’une interruption possible du service;
- aider les parties touchées à prendre des décisions éclairées, en incluant des critères pour déterminer les cas où le calendrier de cessation d’exploitation devrait être établi de manière à éviter de créer de l’incertitude et ainsi d’obliger les parties à faire des choix coûteux et irréversibles afin de poursuivre leurs activités commerciales avant que la Commission ne rende une décision relativement à la demande de cessation d’exploitation;
- se fonder sur les conclusions de consultations valables sur les droits, le tarif, les installations et les procédures;
- être documenté et mis à la disposition des expéditeurs de NGTL, à tout le moins[10].
Bien que la décision s’adresse à NGTL, elle fournit des orientations à tous les promoteurs qui pourraient envisager de présenter une demande d’autorisation de cessation d’exploitation d’installations réglementées par la REC. La décision renferme des conseils sur les processus dont un promoteur doit tenir compte lorsqu’il détermine les installations pour lesquelles il veut cesser l’exploitation, ainsi que les facteurs qui doivent être pris en considération dans ce processus d’évaluation, en particulier dans les cas où la cessation d’exploitation nécessitera la résiliation de contrats ou aura des effets négatifs sur les abonnés.
L’analyse de la Commission au sujet de l’approche de NGTL pour évaluer la viabilité économique de ses installations et à propos de l’évaluation du fardeau injustifié réalisée par l’entreprise est également instructive. La décision confirme que la viabilité économique ne se limite pas à un simple calcul des revenus et des coûts, car on doit également tenir compte d’autres facteurs, tels que la valeur des services fournis par les installations dont on veut cesser l’exploitation. Les allégations relatives au fardeau injustifié doivent être étayées par des preuves, notamment à propos du fait que le promoteur a examiné les solutions possibles pour réduire le fardeau, par exemple en modifiant les tarifs des installations réglementées par la REC.
Le 20 mai 2020, la Régie de l’énergie du Canada (REC) a rejeté une demande de NOVA Gas Transmission Ltd. (NGTL) visant à obtenir une autorisation de cessation d’exploitation des installations qui font partie du vaste réseau de pipelines et d’installations de NGTL en Alberta et en Colombie-Britannique[2].
NGTL a présenté sa demande principalement sur la base du fait que les installations dont elle veut cesser l’exploitation ne sont plus économiquement viables. Elle a fait valoir que les tarifs pour les volumes contractuels n’étaient pas suffisants pour justifier la poursuite de l’exploitation et de l’entretien des installations étant donné que la continuité de ces activités imposerait un fardeau indu à NGTL et à ses abonnés, ce qui n’était pas dans l’intérêt public. La Commission n’était pas de cet avis, estimant que la demande ne favorisait pas l’intérêt public à ce stade et que la poursuite des activités n’imposerait pas de fardeau indu à NGTL ou à ses abonnés en cas de rejet de la demande[3]. La Commission a fait les constatations suivantes :
Dans l’ensemble, en rejetant la demande d’autorisation de cessation d’exploitation, la Commission a considéré qu’il y avait un équilibre raisonnable entre la viabilité économique des installations dont on veut cesser l’exploitation et toutes les considérations d’intérêt public. Fait important, la Commission a constaté que l’évaluation de la viabilité économique de NGTL était erronée, en partie parce que l’entreprise ne tenait pas compte de manière significative de la valeur des services fournis par les installations dont on voulait cesser l’exploitation. En outre, bien que la Commission n’ait pas été convaincue que le rejet de la demande imposerait un fardeau indu à NGTL ou à ses abonnés, elle a également constaté que NGTL n’avait pas tenté de réduire le fardeau pesant sur elle-même et sur ses expéditeurs, ce qui soulève d’autres questions sur l’évaluation et le processus de NGTL qui ont conduit à sa demande d’autorisation de cessation d’exploitation. En fin de compte, la Commission n’a pas été convaincue que la proposition de cessation d’exploitation était dans l’intérêt public à ce stade, mais elle a laissé ouverte la possibilité que NGTL présente ultérieurement une nouvelle demande de cessation d’exploitation.
Compte tenu des préoccupations de la Commission concernant la demande ainsi que des observations de NGTL selon lesquelles l’entreprise possède d’autres petites installations connectées à son réseau avec des contrats restants qui répondent à certains de ses critères de cessation d’exploitation, et qu’au surplus, elle s’attend à une augmentation du nombre de ses installations ayant des coûts d’intégrité importants par rapport aux revenus, la Commission a fortement encouragé NGTL à élaborer un processus plus efficace pour déterminer et évaluer ses installations dans le cadre de ses futures demandes de cessation d’exploitation portant sur des questions telles que la résiliation de contrats et les impacts potentiellement négatifs sur les utilisateurs des installations. La Commission a fourni à NGTL neuf points d’orientation en laissant entendre que le processus de cette dernière en matière d’évaluation et de détermination des installations en vue de leur cessation d’exploitation devrait :
Bien que la décision s’adresse à NGTL, elle fournit des orientations à tous les promoteurs qui pourraient envisager de présenter une demande d’autorisation de cessation d’exploitation d’installations réglementées par la REC. La décision renferme des conseils sur les processus dont un promoteur doit tenir compte lorsqu’il détermine les installations pour lesquelles il veut cesser l’exploitation, ainsi que les facteurs qui doivent être pris en considération dans ce processus d’évaluation, en particulier dans les cas où la cessation d’exploitation nécessitera la résiliation de contrats ou aura des effets négatifs sur les abonnés.
L’analyse de la Commission au sujet de l’approche de NGTL pour évaluer la viabilité économique de ses installations et à propos de l’évaluation du fardeau injustifié réalisée par l’entreprise est également instructive. La décision confirme que la viabilité économique ne se limite pas à un simple calcul des revenus et des coûts, car on doit également tenir compte d’autres facteurs, tels que la valeur des services fournis par les installations dont on veut cesser l’exploitation. Les allégations relatives au fardeau injustifié doivent être étayées par des preuves, notamment à propos du fait que le promoteur a examiné les solutions possibles pour réduire le fardeau, par exemple en modifiant les tarifs des installations réglementées par la REC.
* Marie Buchinski est associée principale et Stephanie Ridge est avocate chez Bennett Jones LLP (Calgary).