Hydro-Québec et ses projets de transmission aux États-Unis

Bon an mal an, Hydro-Québec (HQ), la société d’État verticalement intégrée du Québec, exporte environ 33,5 TWh. En 2019, HQ a exporté 33,7 TWh — ce qui représentait 16 % de toute l’électricité vendue par la société, mais 22 % de son revenu net. Aujourd’hui, les exportations restent plus rentables que les ventes nationales. Environ 75 % des exportations d’HQ sont destinées à trois États américains : New York, le Massachusetts et le Vermont. Le reste est vendu en Ontario et au Nouveau-Brunswick.

HQ et le gouvernement du Québec travaillent depuis des décennies à l’augmentation des exportations d’électricité vers les États-Unis, notamment en proposant de nouvelles lignes de transmission. L’électricité disponible pour l’exportation est renouvelable et, grâce aux grands réservoirs d’HQ, constitue une source d’énergie sûre et stable. À la lumière de ces éléments, il serait raisonnable de penser que ces exportations seraient bien accueillies et que l’opposition à leur égard serait limitée.

L’histoire nous apprend que ce n’est pas le cas. Tout comme l’industrie pétrolière canadienne s’est butée à des obstacles avec ses pipelines, les projets de transport du Québec ont suscité une opposition vigoureuse et efficace à l’étranger. De plus, les arguments avancés contre les exportations du Québec recoupent souvent ceux utilisés contre les pipelines; et à la surprise d’une grande partie de la classe politique québécoise, les références « vertes » de l’hydroélectricité du Québec ne suffisent pas à assurer le succès des projets d’exportation.

Dans le présent article, nous examinons les cinq plus grands projets d’exportation du Québec au cours des trois dernières décennies et résumons les leçons tirées de ceux-ci, ainsi que la façon dont les projets d’exportation peuvent être configurés à l’avenir pour accroître leurs chances de réussite.

GRANDE-BALEINE

Nous sommes en 1986. Le premier ministre nouvellement élu du Québec, Robert Bourassa, vient d’annoncer son intention de construire le projet hydroélectrique Grande-Baleine, dans le Nord du Québec. Le projet ajouterait 3 090 MW aux plus de 10 000 MW que compte déjà le complexe La Grande.

L’électricité produite à Grande-Baleine doit être exportée vers les États de New York et de la Nouvelle-Angleterre. En 1988, la New York Power Authority (NYPA) a signé sous conditions un contrat d’achat d’électricité de 17 milliards de dollars sur 21 ans avec Hydro-Québec. Ce contrat est essentiel pour faire de Grande-Baleine une valeur sûre et constitue une excellente nouvelle pour l’économie de la province.

En 1992 cependant, le contrat avec la NYPA est en lambeaux. Deux ans plus tard, le projet Grand-Baleine échoue définitivement.

Qu’est-ce qui a mal tourné? Le gouvernement du Québec a commis une erreur cruciale en entreprenant le projet Grande-Baleine avec peu d’empressement à consulter (et encore moins à faire participer) les Cris et les Inuits les plus touchés par le projet. Les Cris et les Inuits ont riposté, ce qui a donné lieu à des poursuites judiciaires longues et acrimonieuses, ainsi qu’à des débats publics qui ont galvanisé l’opposition au projet.

Le gouvernement du Québec et HQ ont tout simplement été pris au dépourvu.

Les Cris et les Inuits ont avantageusement utilisé les tribunaux et les médias. Ils ont accusé le Québec non seulement de détruire un environnement fragile, mais aussi de commettre un « génocide culturel » en inondant de vastes étendues de leurs terres ancestrales.

Le point culminant de la campagne des Cris et des Inuits a été l’arrivée très télégénique à New York, le Jour de la Terre en 1990, d’une embarcation de 24 pieds transportant 60 Cris et Inuits descendant le fleuve Hudson à la pagaie, au terme d’un périple de plus de 1900 km et de cinq semaines. L’annonce préalable a assuré une couverture médiatique maximale. Celle-ci a, à son tour, rallié les organismes non gouvernementaux américains et d’autres groupes de pression à la cause.

En 1991, la NYPA a demandé à HQ une prolongation d’un an avant de confirmer le contrat d’électricité précédemment signé. Un an plus tard, la NYPA a décidé de ne pas reconduire le contrat. Bien que les facteurs économiques aient été la principale cause de l’annulation, des considérations environnementales et autres considérations sociales ont rendu la décision beaucoup plus facile à prendre et à défendre.

Le projet Grande-Baleine a finalement été mis en veilleuse par le premier ministre Jacques Parizeau en 1994, après une pause pour sauver la face. Le Québec avait tiré une précieuse leçon de cet épisode : ce qui se passe chez soi résonne sur les marchés d’exportation.

En conséquence, le Québec a entrepris de réparer ses relations avec la nation crie. En 2002, le premier ministre Bernard Landry et le grand chef Ted Moses du Grand Conseil des Cris ont signé la Paix des Braves, d’une durée de 50 ans. La Paix des Braves est un accord global prévoyant, entre autres, une compétence conjointe sur une grande partie du territoire occupé par les barrages et réservoirs hydroélectriques de la Baie James dans le Nord du Québec.

Malgré les demandes répétées des autres Premières Nations, le Québec a refusé de reproduire la Paix des Braves, préférant conclure des accords plus limités.

NORTHERN PASS

En 2008, HQ et deux entreprises américaines de services publics, Northeast Utilities et NSTAR (ces deux entreprises ont ensuite fusionné en 2012 pour former Eversource Energy), ont convenu de développer le projet Northern Pass de 1 200 MW.

Le projet faisait en sorte que les promoteurs américains du projet financent, construisent et exploitent environ 290 km de nouvelle ligne de transmission de la frontière entre le Québec et le New Hampshire à Franklin (New Hampshire), où elle serait ensuite connectée aux installations existantes du réseau. HQ devait être responsable de la partie québécoise du projet.

Très tôt, le choix de l’emplacement de la future ligne de transmission a inquiété les groupes de tourisme, de loisirs et environnementaux, qui était préoccupés par l’impact du projet sur l’environnement du New Hampshire, notamment ses grandes forêts protégées. Toutefois, ce n’était pas la seule critique formulée à l’encontre du projet.

Les opposants ont souligné qu’une grande partie de l’électricité serait consommée au Massachusetts et non au New Hampshire (cette allégation était importante, car le projet devait invoquer le pouvoir d’expropriation le long de nombreuses sections de son tracé). Entre autres considérations, les opposants se sont également demandé si le projet réduirait les tarifs d’électricité, ont remis en question les références vertes des grands réservoirs d’HQ et le traitement réservé par le Québec à la Première Nation innue, et se sont inquiétés de l’impact du projet sur les pratiques forestières locales et sur la propre industrie de l’énergie renouvelable du New Hampshire.

Bien que le projet ait été modifié pour apaiser certaines de ces préoccupations, notamment en promettant d’enterrer une partie de la ligne, au début de 2018, le comité d’évaluation des sites du New Hampshire a voté à l’unanimité pour refuser le Northern Pass. La décision a été portée en appel devant la Cour suprême du New Hampshire. Lorsque l’appel a été rejeté en juillet 2019, le gouverneur Sununu du New Hampshire a publié ce communiqué de presse laconique :

« La Cour a été claire : il est temps de passer à autre chose. Il y a encore de nombreux projets d’énergie propre à des tarifs électriques plus bas à explorer et à développer pour le New Hampshire et le reste de la Nouvelle-Angleterre. » [Traduction] [1]

Le communiqué de presse est révélateur, car il laisse entendre que les importations d’électricité à grande échelle en provenance du Québec ne sont pas indispensables aux aspirations environnementales de la Nouvelle-Angleterre. En d’autres termes : ce qui était l’orthodoxie au Québec au début des années 2000 pouvait ne plus être vrai en Nouvelle-Angleterre une décennie plus tard. Eversource Energy a abandonné le projet Northern Pass peu après la publication du communiqué de presse du gouverneur.

NEW ENGLAND CLEAN ENERGY CONNECT

New England Clean Energy Connect (NECEC) est un projet de transmission de 1 200 MW du Québec au Massachusetts, en passant par Lewiston (État du Maine). Le projet vise à transporter l’électricité achetée à HQ en vertu d’un contrat d’achat d’électricité de 9,45 TWh par an sur une période de 20 ans. Bien que la majeure partie de l’électricité sera consommée au Massachusetts, le Maine se voit garantir 500 000 MWh par an pour la même période comme mesure incitative afin de permettre au projet NECEC de traverser l’État.

Le projet nécessite la construction de 233 km de lignes de transmission à haute tension, la plupart suivant les emprises électriques existantes, avec seulement environ 85 km sur une nouvelle emprise à déboiser dans les terres forestières exploitées de Forks (État du Maine), jusqu’à la frontière du Québec. Il est intéressant de noter que l’emprise sera beaucoup plus étroite que ce qui est habituellement prévu, ce qui réduit considérablement l’empreinte environnementale de la ligne.

Le 15 janvier 2021, les promoteurs du projet NECEC, y compris HQ, ont confirmé publiquement qu’après un long processus de près de trois ans, le projet avait obtenu tous les principaux permis étatiques et fédéraux et était désormais « prêt à démarrer ». En temps normal, cette étape marquerait le début de la construction du projet.

Pas dans le Maine, cependant.

Le jour même où les promoteurs du projet ont publié leur communiqué de presse, la Cour d’appel fédérale de Boston a émis une injonction suspendant les travaux sur la section Forks-Québec du projet dans la région du Haut-Kennebec. Les groupes environnementaux contestaient la régularité de la délivrance de l’un des permis fédéraux.

Une semaine plus tard, le 21 janvier 2021, une coalition de groupes opposés au projet NECEC a remis une pétition d’environ 100 000 signatures au secrétaire d’État du Maine. La pétition enjoignait le secrétaire à placer sur le bulletin de vote de novembre une initiative citoyenne exigeant rétroactivement l’approbation de la législature de l’État pour les lignes de transmission sur une distance de plus de 50 milles et interdisant la construction de lignes électriques dans la région du HautKennebec. En fait, elle empêcherait le projet NECEC d’aller de l’avant.

Bien que l’injonction ait été levée le 14 mai 2021 et que la construction pouvait reprendre sur la partie Forks-Québec du projet, le secrétaire d’État a accepté la pétition et a ajouté l’initiative citoyenne sur le bulletin de vote du 2 novembre 2021. Par conséquent, le risque politique continue de mettre en péril le projet. La question sur laquelle les électeurs seront appelés à se prononcer est la suivante :

« Voulez-vous interdire la construction de lignes de transmission électrique à fort impact dans la région du Haut-Kennebec et exiger que l’assemblée législative approuve tous les autres projets de ce type partout dans le Maine, tous deux rétroactivement à 2020, et exiger que l’assemblée législative, rétroactivement à 2014, approuve par un vote des deux tiers de tels projets utilisant des terres publiques? » [Traduction] [2]

L’opposition au projet NECEC semble avoir une base plus large sur le terrain par rapport au projet Northern Pass. Elle semble également mieux financée. Selon l’opposant, l’opposition est fondée sur l’un des éléments suivants :

(i) La politique du ressentiment et du grief rural. Le projet traverse le deuxième district congressionnel du Maine, l’un des plus ruraux des États-Unis et un district qui a livré un vote électoral pour le président Trump. Le Maine (comme le Nebraska) attribue certains de ses électeurs par circonscription congressionnelle. Tous les habitants du Nord du Maine ne pensent pas que permettre aux lignes électriques à haute tension de traverser leurs forêts pour desservir la ville de Boston soit une bonne chose en soi.

(ii) L’insatisfaction et la méfiance à l’égard de la compagnie d’électricité locale, Central Maine Power, l’un des principaux promoteurs du projet NECEC. Les promesses de tarifs plus bas et d’un meilleur service n’ont pas eu l’effet escompté.

(iii) La concurrence avec les grands producteurs d’électricité en place, y compris les producteurs d’électricité renouvelable.

Certains partisans du projet NECEC ont répondu en attaquant les intentions de bonne foi de leurs adversaires et de leurs bailleurs de fonds aux poches profondes. Ce faisant cependant, ils s’en prennent à la manière dont la politique est menée aux États-Unis — une plainte qui, lorsqu’elle est formulée par des étrangers, tombe généralement dans l’oreille d’un sourd. Toutefois, plus important encore, en agissant ainsi, les partisans ne répondent pas directement aux préoccupations de leurs adversaires, y compris les électeurs de la deuxième circonscription congressionnelle du Maine.

En raison des enjeux, il n’est pas certain que le résultat du vote de novembre prochain dans le Maine règle la question. L’affaire pourrait continuer à traîner pendant un certain temps devant les tribunaux.

CHAMPLAIN-HUDSON POWER EXPRESS

L’État de New York a des plans ambitieux pour passer à 70 % d’électricité renouvelable d’ici 2030.

Le 15 octobre 2020, le New York Department of Public Service a confirmé que l’hydroélectricité existante est admissible aux crédits d’énergie renouvelable lorsqu’elle est livrée dans la ville de New York. C’est une première dans cet État, et cela permet à l’hydroélectricité d’HQ d’être concurrentielle.

Dans la poursuite de l’objectif de l’État, New York a lancé en janvier 2021 une demande de propositions pour la fourniture de 1 500 MW d’électricité renouvelable dans la ville de New York. HQ a répondu avec le promoteur américain du Champlain-Hudson Power Express (CHPE), nommément Transmission Developers, une entreprise du portefeuille de Blackstone.

Le CHPE est un projet « prêt à démarrer » visant à construire une ligne de transmission de 1 250 MW depuis la frontière entre le Québec et l’État de New York jusqu’à l’arrondissement Queens de la ville de New York.

Le projet CHPE est structuré de manière à mettre à profit un grand nombre des leçons tirées des propositions précédentes. Tout d’abord, le projet CHPE traverse un seul territoire, soit l’État de New York, pour atteindre ses clients cibles. Cela diminue considérablement l’opposition fondée sur la question de savoir si les avantages locaux sont suffisants. Deuxièmement, ce projet sera soit submergé sous le lac Champlain et les rivières Hudson et Harlem, soit enterré le long des emprises existantes. Cela réduira considérablement les impacts visuels et autres impacts environnementaux habituels des infrastructures de transmission à haute tension. Troisièmement, il a été annoncé récemment que la ligne de transmission du projet du côté québécois de la frontière serait gérée par une coentreprise entre HQ et le Conseil mohawk de Kahnawà:ke. HQ ne conclut pas de coentreprises de transmission au Québec, et cette coentreprise devrait augmenter les chances d’appui de la part des Premières Nations à l’égard du projet CHPE et des exportations d’électricité d’HQ en général. Quatrièmement, le projet CHPE a consacré plus de 8 ans à un vaste effort de communication avec les communautés situées le long du tracé et bénéficie d’un soutien municipal considérable.

LIEN NEW ENGLAND CLEAN POWER

Ce projet est similaire à celui du CHPE et a le même promoteur, soit Transmission Developers. Il consiste en la construction d’une ligne de transmission de 1 000 MW au Vermont. La ligne partirait de la frontière Québec-Vermont et se rendrait à Ludlow, au Vermont, où elle serait reliée aux installations de transmission existantes. Tout comme le projet CHPE, il est prévu que la ligne soit immergée sous le lac Champlain ou enterrée le long des emprises existantes. Le projet n’a pas actuellement trouvé preneur, mais HQ pourrait s’en servir pour saisir des occasions futures sur le marché de la Nouvelle-Angleterre si le projet NECEC est abandonné.

LEÇONS APPRISES

De nombreuses leçons peuvent être tirées des déboires d’Hydro-Québec aux ÉtatsUnis.

Communautés Locales : Les consultations avec les communautés locales tout au long du parcours d’un projet sont désormais une évidence, mais elles doivent être significatives et, tout aussi important, être perçues comme telles. Comme Tip O’Neill, l’influent président de la Chambre des représentants de 1977 à 1987, était célèbre pour avoir dit : « Toute politique est locale » [traduction]. Des électeurs mobilisés peuvent exercer une forte pression sur leurs élus et faire dérailler des projets, même ceux dont les bénéfices sont avantageux à long terme.

« Mettez de l’ordre dans vos affaires » : Les opposants formuleront toutes sortes de critiques à l’encontre d’un projet, et leur recherche d’arguments s’étendra bien au-delà de leur territoire. Il est donc important pour un promoteur de contrôler ce qu’il peut contrôler. L’exemple récent suivant illustrera ce point. Depuis des décennies, un certain nombre de Premières Nations du Québec demandent à négocier un arrangement semblable à la Paix des Braves avec les Cris. Le Québec a refusé. Le 5 août 2020, la Première Nation innue de Pessamit et la Première Nation Atikamekw de Wemotaci ont émis un communiqué de presse, demandant, entre autres, que Québec et HQ les compensent pour l’hydroélectricité produite sur leur territoire. HQ a répondu, par l’intermédiaire d’un porte-parole, qu’il était surpris et qu’il trouvait cette déclaration publique peu utile à l’exportation d’électricité vers la Nouvelle-Angleterre et l’État de New York, c’est-à-dire pour les projets NECEC et CHPE. Peu de temps après, la nation Penobscot du Maine a publié un communiqué de presse s’opposant au NECEC et soutenant les Premières Nations innue et Atikamekw, accroissant ainsi la pression publique locale contre le projet NECEC.

Avantages économiques démontrables à court et à long terme : Northern Pass et NECEC ont démontré de manière éloquente comment le sentiment « pas dans ma cour » est particulièrement fort lorsqu’un projet de ligne de transmission est principalement destiné à des fins hors de l’État. Les projets doivent apporter des avantages directs démontrables aux localités situées le long de leur tracé.

Visibilité : Les lignes de transmission et leurs couloirs ne sont pas sans impact sur l’environnement. À moins d’être enterrées ou submergées, elles sont très visibles et peuvent avoir un effet d’éclatement sur le paysage ainsi qu’un effet négatif sur la faune. Pour maximiser le succès des projets futurs, il est préférable d’utiliser les emprises existantes ou d’être aussi discret visuellement que possible.

« Le temps n’est pas votre allié » : Les lignes de transmission à haute tension sont des projets à longue gestation dont la mise en service peut prendre une décennie ou plus. Pendant cette période, leurs avantages économiques et technologiques peuvent s’éroder. Au cours de la dernière décennie, les coûts associés à l’énergie renouvelable provenant de l’éolien et du solaire ont considérablement diminué et leur fiabilité s’est accrue. Par conséquent, les nouveaux moyens de production sont concurrentiels, même dans le Nord-Est des États-Unis, très peuplé. L’approbation fédérale américaine, en mai 2021, du premier parc éolien offshore du pays, soit le projet d’énergie éolienne offshore Vineyard Wind 1 de 800 MW au large des côtes du Massachusetts, illustre de manière éloquente ce point.

Commerce à double sens : Les projets de transmission d’énergie tels que celui du NECEC sont mercantiles par nature, et le temps des projets d’exportation traditionnels à sens unique touche peut-être à sa fin.

Un document de travail de février 2020 du MIT Center for Energy and Environmental Policy Research intitulé « Two-Way Trade in Green Electrons : Deep Decarbonization of the Northeastern U.S. and the role of Canadian Hydropower » a conclu que l’utilisation optimale des installations hydroélectriques et des réservoirs d’HQ consiste à recourir à ceux-ci pour équilibrer la capacité des producteurs d’électricité renouvelable intermittente. Dans le cadre de ce régime, HQ vend de l’électricité à un État lorsque les ressources éoliennes ou solaires de cet État sont insuffisantes et achète, en retour, de l’électricité lorsqu’il y a un surplus d’électricité renouvelable. En conservant l’eau dans ses réservoirs, HQ « stockerait » en pratique l’énergie pour une utilisation ultérieure et deviendrait la « batterie » du Nord-Est des États-Unis.

Ce mode de fonctionnement complémentaire permet non seulement de réduire les coûts des services publics, mais présente également l’avantage d’être plus facile à vendre sur le plan politique, car les « flux électriques bidirectionnels » ne déplacent pas les producteurs locaux d’énergie renouvelable, ni les emplois et les investissements qu’ils engendrent.

Il est intéressant de noter que le commerce bidirectionnel est précisément mentionné comme une opportunité future dans la proposition du projet CHEP.

BOUCLE ATLANTIQUE

Dans son discours du Trône du 24 septembre 2020, le gouvernement du Canada a annoncé son soutien à la « boucle de l’Atlantique », un projet qui vise à « founrir les surplus énergétiques à des communautés qui délaissent le charbon ».

En termes simples, la boucle de l’Atlantique, telle qu’elle est actuellement envisagée, interconnecterait les réseaux électriques du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse avec ceux du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador. Cela permettrait au Nouveau-Brunswick et à la Nouvelle-Écosse de faire la transition vers des sources d’électricité plus propres, tout en favorisant leurs secteurs locaux d’énergie renouvelable, le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador agissant à deux titres : fournisseurs d’électricité de base et fournisseurs de services de « batteries » lorsque les ressources éoliennes ou solaires locales sont insuffisantes.

La boucle de l’Atlantique pourrait, bien sûr, être prolongée jusqu’au Nord-Est des États-Unis pour former un réseau intégré encore plus grand. Les meilleures possibilités d’exportation du Québec se trouvent peut-être à l’est plutôt qu’au sud.

Une plus grande intégration du réseau dans l’Est du Canada — et, espérons-le, dans le Nord-Est des États-Unis — servirait également de modèle au Manitoba et à la Colombie-Britannique, deux provinces dotées d’une capacité hydroélectrique considérable et voisines consommatrices de combustibles fossiles.

* Erik Richer La Flèche est associé chez Stikeman Elliott à Montréal.

  1. Gouverneur du New Hampshire, communiqué, « Governor Sununu Statement on Northern Pass » (19 juillet 2019), en ligne : <www.governor.nh.gov/news-and-media/governor-sununu-statement-northern-pass>.
  2. Département du Secrétariat d’État – État du Maine, communiqué, « Secretary Bellows announces final wording of referendum question » (24 mai 2021), en ligne : <www.maine.gov/sos/news/2021/referendumquestionwording.html>.

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