Le 10 août 2023, le Canada a publié un projet de Règlement sur l’électricité propre[1] (le Règlement), qui est destiné à constituer une partie essentielle de l’approche du Canada visant à réduire ses émissions nettes de gaz à effet de serre (GES) à zéro à l’échelle de l’économie d’ici 2050. Le Règlement établit des normes de rendement strictes en matière d’intensité des émissions de GES qui s’appliqueront à l’électricité produite à partir de combustibles fossiles au Canada. Comme l’indique le Résumé de l’étude d’impact de la réglementation qui accompagne le Règlement, celui-ci a été choisi comme l’instrument le plus efficace et le plus approprié pour résoudre le problème. Plus précisément, le Résumé de l’étude d’impact de la réglementation indique ce qui suit :
Compte tenu de l’urgence de la lutte contre le changement climatique et des objectifs du Canada en la matière, à savoir devenir une économie carboneutre d’ici 2050, un changement transformationnel sera nécessaire dans tous les secteurs de l’économie canadienne, y compris le secteur de la production d’électricité.
Dans l’avis gouvernemental annonçant le Règlement, il est indiqué que le Règlement a été élaboré autour de trois principes fondamentaux :
- maximiser les réductions de GES pour atteindre la carboneutralité du réseau électrique d’ici 2035;
- maintenir l’abordabilité de l’électricité pour les Canadiens et les entreprises canadiennes; et
- maintenir la fiabilité du réseau pour soutenir une économie forte et répondre aux besoins énergétiques croissants du Canada.
Calendrier et application du Règlement
À partir du 1er janvier 2025, le Règlement s’appliquera à toute unité de production d’électricité (UPE) ayant :
- a une capacité de production d’électricité égale ou supérieure à 25 mégawatts (MW);
- produit de l’électricité à l’aide de combustibles fossiles (ce qui inclut l’hydrogène gazeux);
- est raccordée à un réseau électrique assujetti aux normes de la North American Electric Reliability Corporation (NERC).
Une UPE qui répond aux critères d’applicabilité au 1er janvier 2025 doit être enregistrée auprès du ministre fédéral de l’Environnement avant la fin de l’année 2025. Toute UPE mise en service après le 1er janvier 2025 doit être enregistrée dans les 60 jours suivant sa mise en service.
Puisque le Règlement exige que les UPE soient raccordées à un réseau électrique assujetti aux normes de la NERC avant qu’il ne s’applique, les UPE autonomes et isolées seront exemptées. Cela signifie que le Règlement et l’imposition de la norme de rendement décrite ci-dessous ne s’appliqueront pas à de nombreuses collectivités nordiques du Canada qui dépendent actuellement de génératrices diesel et de réseaux de transport d’électricité localisés pour leur approvisionnement en électricité.
Norme de rendement en matière d’intensité des émissions
Les UPE qui exportent plus d’électricité vers un réseau électrique assujetti aux normes de la NERC qu’elles n’en importent d’un réseau électrique assujetti aux normes de la NERC (c’est-à-dire que ses exportations nettes sont supérieures à zéro gigawattheure) au cours d’une année civile sont assujetties à une norme de rendement relative à l’intensité moyenne annuelle d’émissions de 30 tonnes d’équivalent CO2 (éq. CO2) par gigawattheure (GWh) de production d’électricité.
La norme de rendement s’applique aux diverses UPE selon une approche progressive. À partir du 1er janvier 2035, la norme de rendement s’appliquera :
- aux UPE qui brûlent du charbon ou du coke de pétrole;
- aux UPE mises en service le 1er janvier 2025 ou après cette date; et
- aux UPE qui ont augmenté leur capacité de production d’électricité de 10 % ou plus depuis l’enregistrement de l’UPE.
Étant donné qu’une UPE préexistante pourrait devoir subir d’importantes modifications pour se conformer à la norme de rendement, le Règlement prévoit un délai supplémentaire pour l’imposition de la norme de rendement aux UPE mises en service avant le 1er janvier 2025. Pour toute UPE qui était auparavant une unité de combustion au charbon et qui a été convertie en unité de combustion au gaz naturel, l’application de la norme de rendement sera retardée jusqu’au 1er janvier 2035 ou jusqu’au 1er janvier de l’année civile au cours de laquelle le paragraphe 4(2) du Règlement limitant les émissions de dioxyde de carbone provenant de la production d’électricité thermique au gaz naturel aura commencé à s’appliquer à l’UPE. Pour toutes les autres UPE, la norme de rendement ne sera imposée que le 1er janvier 2035 ou 20 ans après la date de mise en service de l’UPE.
Exceptions à la norme de rendement
Le Règlement prévoit trois exceptions à la norme de rendement :
- Les UPE qui utilisent le captage et le stockage de carbone (CSC). La norme de rendement est calculée sur la base de la quantité d’émissions globales d’éq. CO2 au cours de l’année civile provenant de la combustion de combustibles fossiles dans une UPE. Cependant, la quantité d’émissions d’éq. CO2 captée et stockée de manière permanente dans un projet de CSC peut être soustraite des émissions globales d’éq. CO2. Les projets de CSC approuvés comprennent : (i) l’injection dans un aquifère salin profond dans le seul but de stocker l’éq. CO2; et (ii) l’injection dans un réservoir de pétrole épuisé dans le but d’améliorer la récupération du pétrole. Les projets de CSC admissibles peuvent être situés au Canada ou aux États-Unis. Les UPE qui utilisent le CSC dans le cadre de leur stratégie de mise en conformité sont autorisées à avoir une intensité d’émission moyenne allant jusqu’à 40 tonnes d’éq. CO2 par GWh, à condition qu’elles puissent démontrer qu’elles sont capables de fonctionner à 30 tonnes d’éq. CO2 par GWh sur la base de données d’émissions réelles. L’exception liée au CSC n’est disponible que jusqu’à la première des deux dates suivantes : sept ans après la mise en service du système de CSC ou le 31 décembre 2039.
- Exploitation d’une UPE pendant les périodes de demande d’énergie de pointe. Les UPE qui ne brûlent pas de charbon peuvent émettre jusqu’à 150 kilotonnes d’éq. CO2 au cours d’une année civile, à condition qu’elles ne soient pas en exploitation plus de 450 heures par année civile.
- Exploitation en cas d’urgence. Une UPE peut demander au ministre de l’Environnement une dérogation à la norme de rendement dans deux types de situations d’urgence. La première circonstance comprend une situation d’urgence due à « un événement extraordinaire, imprévisible et irrésistible » [traduction]. Il n’est pas clair, ce qui constitue un « événement irrésistible » ou ce que l’on entend par ce terme. La deuxième circonstance comprend les scénarios dans lesquels le gouvernement émet une proclamation ou un décret d’urgence ou déclare une situation d’urgence en raison d’une pénurie anticipée de carburant, ou dans des situations où il y a une pénurie réelle ou anticipée de carburant, mais où le carburant est nécessaire pour protéger la sécurité nationale du Canada, participer à des activités militaires ou soutenir des efforts d’aide humanitaire.
Articles supplémentaires
Le Règlement contient également des articles supplémentaires relatifs au calcul de l’intensité des émissions, à la fréquence d’échantillonnage, à la conservation des données et à la présentation de rapports annuels.
Période de commentaires
Les commentaires concernant le Règlement seront acceptés jusqu’au 2 novembre 2023. Le Règlement final devrait être publié en 2024.
* Dufferin Harper est associé au bureau de Blakes à Calgary.
- « Règlement sur l’électricité propre » (version non officielle, 10 août 2023), en ligne : Gouvernement du Canada <www.canada.ca/fr/services/environnement/meteo/changementsclimatiques/plan-climatique/reglement-electricite-propre.html>. [REIR] [REP], art 3.